Sarah Cattan. Françoise Rudetzki. Que la Terre lui soit légère

La fondatrice de l’association SOS Attentats et initiatrice de la création du fonds de garantie des victimes du terrorisme s’est éteinte dans la nuit de mardi à mercredi à Paris.

Le 11 mars dernier, Françoise Rudetzki était la figure incontournable de la Journée européenne d’Hommages aux Victimes du Terrorisme au Grand Trianon de Versailles où elle défendit ce qui demeurait à ses yeux le meilleur système au monde désormais en place en France pour tenter d’indemniser et réparer les victimes d’attentats et évoqua le futur Musée-mémorial du terrorisme en cours de création.

On l’a vue à plusieurs reprises dans la salle du procès des attentats du 13 novembre 2015, venue sur le fauteuil roulant qu’elle nommait son scooter assister aux moments clés des audiences.

L’histoire de Françoise Rudetzki se confond douloureusement avec l’histoire française du terrorisme du demi-siècle qui vient de s’écouler. Née juive dans une famille décimée par la Shoah, jeune, belle et sportive, cette jeune femme élégante aux boucles brunes  et à qui la vie souriait dirigeait encore une affaire florissante lorsque sa vie bascule : elle dînait le 23 décembre 1983 avec son mari pour leurs dix ans de mariage au Grand Véfour sous les arcades du Palais-Royal à Paris lorsqu’une bombe explose. Celle qui lit dans un magazine que l’attentat a fait plus de peur que de mal alors qu’une porte métallique lui a broyé  les jambes découvre que le restaurant est remis en état en trois semaines alors que rien n’est prévu pour les femmes et les hommes victimes du terrorisme.

Après 7 semaines de réanimation, 78 opérations et une centaine d’anesthésies générales et alors  

qu’elle se bat pour survivre et marcher à nouveau, elle prend conscience de l’indifférence dans laquelle se débattent les victimes du terrorisme. Ce sera la création en 1986 de l’association SOS Attentats, cofondée avec son mari et marquant le début de la vague d’attentats meurtriers qui allaient ensanglanter Paris, liés au conflit au Proche-Orient : le principe défendu sera celui d’un fonds pour réparer les victimes, non par les deniers de l’Etat mais par ceux des assurances avec une contribution de solidarité sur chaque contrat d’assurance qui existe encore aujourd’hui, 5,90 euros étant prélevés sur chaque contrat.

Les progrès seront constants dans la prise en charge au fur et à mesure des attentats des années 1990. L’indemnisation garantie par l’État, c’est elle. Le statut de victime civile de guerre dans les cas de terrorisme, c’est elle. La prise en charge psychologique des traumatisés, c’est elle. Le combat incessant pour faire prévaloir la justice et la morale dans les juridictions du monde entier, c’est encore elle.

Un amendement à l’Assemblée nationale porte le nom de celle qui alla négocier directement à L’Elysée pour imposer une place aux victimes face aux institutions judiciaires.

Mobilisée aussi sur le plan mémoriel, elle plaidera pour la création d’une médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme, et le musée mémorial du terrorisme ouvrira ses portes en 2027 : Françoise Rudetzki a toujours insisté sur l’importance de la mémoire dans la réparation des victimes des terrorismes qu’il ne fallait pas oublier.

Dans Triple peine, elle retrace en 2004 sa vie, du souvenir de la déportation d’une partie de sa famille à son combat pour survivre aux séquelles de l’explosion, une transfusion l’ayant contaminée au sida et à l’hépatite C et à son combat pour que justice soit rendue dans les affaires terroristes.

Jusqu’au bout, elle aura milité pour la reconnaissance et la prise en charge des victimes d’attentats, a déclaré sa fille Deborah Rudetzki en annonçant sa mort, alors que l’association Life for Paris, qui rassemble de nombreuses victimes des attentats du 13-Novembre, a salué dans un communiqué la grandeur d’âme unique de cette femme d’exception.

Françoise Rudetzki, membre du conseil d’administration du Fonds de Garantie des Victimes d’Actes de Terrorisme et autres infractions (FGTI), membre du conseil d’administration Paris Aide aux Victimes (PAV), auteur d’une mission de réflexion qui a abouti à la création du Centre national de Ressources et de Résilience (CN2R) en 2018, avait également publié en 2016 Après l’attentat et Triple Peine.

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

2 Comments

  1. Je salue le courage et la détermination de cette grande dame dans son combat pour la justice envers les victimes d’attentats terroristes.
    Que sa mémoire soit bénie.

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*