Pierre Saba – Antisémitisme alimentaire

Régulièrement, avec une intensité supérieure à l’approche d’élections, le Rassemblement national (RN) précise, par l’intermédiaire de ses dirigeants, les interdictions des abattages rituels prévues à son programme électoral.

Cette fois encore, l’électorat a droit à un développement désormais usuel et identique sur l’abattage rituel musulman (halal) et mosaïque (shkhita), alors qu’ils présentent des différences structurelles d’élaboration.

La prétention du RN est, selon ses représentants, le respect de la condition animale par l’interdiction de la souffrance.

S’agissant de l’abattage rituel musulman (Halal/Licite)

Il relève du sacrifice (zabiha, ou zakat-sedaka / aumône). La tête de l’animal doit être tournée vers La Mecque (Arabie saoudite). Le sacrificateur demande préalablement l’autorisation divine de procéder à l’abattage. Puis, il traite successivement des veines jugulaires, de l’artère carotide et procède par exsanguination. L’exsanguination consiste à provoquer sur l’animal une saignée de quantité suffisante à sa mort.

S’agissant de l’abattage rituel mosaïque (Shkhita)

Il est opéré par le shokhet (abatteur) avec une lame contrôlée et aiguisée (khalaf) de façon à garantir la rapidité et l’absence de douleur lors de l’opération et de l’exsanguination. Afin de garantir l’hygiène de l’animal, les organes et notamment les poumons sont vérifiés.

Le principe de la « shekhya » assure l’absence de souffrance de l’animal durant son exécution.

A cette fin, le retard et l’interruption de l’action sont prohibés, le mouvement de la lame doit être continu, la pression de la lame est interdite (derassa).

Par-dessus tout, le glissement de la lame sur le cou de l’animal à la hauteur du polygone de Willis provoque une perte de conscience immédiate et subite qui élimine toute souffrance de l’animal (hagrama).

Conséquences des grossièretés du RN sur l’abattage rituel mosaïque (skhita)

Ces conséquences sont lourdes et multiples. En voici les principales.

1– L’étendue de l’erreur du RN sur la shkhita complète son niveau zéro de connaissance du dossier.

2– L’expression publique hostile à la shkhita sans contradiction immédiate dommage considérablement l’honneur et la dignité des abatteurs, des organismes employeurs-prescripteurs et des consommateurs.

3– Les allégations du RN relatives à la prétendue douleur ou autres termes inquiétants ou péjoratifs, tous non attestés, diffament les personnes et groupes de personnes qui respectent cette considération confessionnelle.

4– Au-delà des protestations désormais d’usage des organismes représentatifs et d’encadrement du Judaïsme français, il leur revient d’engager des poursuites judiciaires à l’encontre des contrevenants du RN, en obtenant, le cas échéant et aisément, compte tenu du sujet, de la levée des immunités parlementaires.

5– Les fausses informations relatives à la shkhita présage par l’absence de connaissance ou la malveillance de ceux qui les profèrent quel peut-être le niveau assumé par le RN sur les autres dossiers de la Nation.

6– Il est difficilement supportable d’écouter, en sus, la volonté énoncée solidairement et avec acharnement par le RN de toute importation en France de viandes abattues selon les règles mosaïques.

7– L’énoncé grossier de ces projets fondés sur des erreurs, des lacunes ou des malveillances, constituent une stigmatisation supplémentaire à l’endroit du Judaïsme français, des Français de confession juive observant ou non la shkhita, une fragilisation supplétive de leurs situations sécuritaires, publiques et privées, et une incitation ajoutée à l’émigration qui, même au compte-goutte, est déjà en cours.

Le RN est à la porte de l’Elysée.

Pierre Saba