Quand le « correspondant » du Monde relate avec retard et un mépris déplacé le voyage de Bennett à Moscou

Le grand journaliste Louis Imbert

Pourtant « sur place », Louis Imbert nous donne aujourd’hui à midi « l’info » sur le « voyage » de Bennett, ce « quasi néophyte en relations internationales » qui « s’est contenté de décrire l’invasion russe de l’Ukraine à la manière d’une catastrophe divine, un désastre naturel sans causes ni responsables » et qui tient « une occasion historique pour son pays, puissance nucléaire non assumée, petit allié de Washington au Proche-Orient, de parler au monde d’autre chose que de lui-même… »

Guerre en Ukraine : face à Moscou, Israël se pose en médiateur

Le premier ministre de l’Etat hébreu, Naftali Bennett, s’est entretenu avec Vladimir Poutine, samedi, à Moscou et a échangé par téléphone avec Emmanuel Macron. Rien n’a filtré de cette tentative de médiation, menée par ce quasi néophyte en relations internationales.

Le premier ministre israélien Naftali Bennett, le 7 mars 2022, à Jérusalem.
Le premier ministre israélien Naftali Bennett, le 7 mars 2022, à Jérusalem. MENAHEM KAHANA / AFP

Jamais un premier ministre israélien ne s’était saisi d’une telle responsabilité. En se rendant au Kremlin, samedi 5 mars, pour s’entretenir durant trois heures avec Vladimir Poutine de la guerre qu’il mène en Ukraine, Naftali Bennett a laissé bouche bée diplomates et observateurs en Israël. Il tient une occasion historique pour son pays, puissance nucléaire non assumée, petit allié de Washington au Proche-Orient, de parler au monde d’autre chose que de lui-même.

Rien n’a filtré du fond de cette médiation, menée en plein shabbat par ce dirigeant issu de l’extrême droite religieuse, ancien des forces spéciales, ex-entrepreneur et ministre de la défense, en poste depuis moins d’un an. M. Bennett a-t-il passé ou clarifié des messages, cherché à maintenir ouvert un canal de discussion, à obtenir un cessez-le-feu ? En conseil des ministres, dimanche, il s’est donné « peu de chances de réussite », mais a évoqué « un devoir moral ».

Ce quasi-néophyte en relations internationales s’est contenté de décrire l’invasion russe de l’Ukraine à la manière d’une catastrophe divine, un désastre naturel sans causes ni responsables. Sa prudence, constante et unique sur la scène occidentale, lui a valu récemment des critiques de la part du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, ainsi qu’en Israël.

Dimanche, l’ambassadeur d’Ukraine dans son pays, Yevgen Korniychuk, s’est dit pourtant « reconnaissant ». M. Bennett a suivi « une suggestion amicale » de son pays, dit-il, en se faisant intercesseur, après des mois de contacts. Tant avec M. Zelensky, auquel il a refusé de livrer des armes avant le conflit, qu’avec M. Poutine, qui avait refusé, avant la guerre, une précédente proposition de médiation. « Israël est le seul Etat démocratique à avoir d’excellentes relations avec les deux parties. Minsk [capitale biélorusse où s’est ouverte en 2015 une séquence diplomatique censée mettre fin au conflit dans le Donbass, enterrée par l’invasion russe] ne peut plus être un lieu [de négociations] pour nous (…). Nous cherchons un autre lieu et Jérusalem est une possibilité », veut croire ce diplomate.

« Tiédeur »

Les garants des accords de Minsk, dont la France, paraissent aujourd’hui « brûlés » à Moscou. Cependant, M. Bennett s’efforce de présenter son initiative comme une action prise de concert avec les démocraties occidentales. Selon le site Walla, il a notamment informé de son départ, dès vendredi, le conseiller à la sécurité nationale américain, Jake Sullivan. Il est difficile d’imaginer que Washington ait sollicité sa tentative. La Maison Blanche paraît trop occupée à rassembler le plus large soutien en faveur de sanctions contre Moscou.

Mais elle ne l’a pas dissuadé et lundi, le secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken, devait s’entretenir en Lituanie avec son homologue israélien, Yaïr Lapid. « La représentante américaine à l’ONU a critiqué Israël pour sa tiédeur, avant que nous ne finissions par voter la résolution en assemblée générale condamnant l’invasion russe [le 2 mars]. Mais la musique que nous entendons à Washington est différente : ils comprennent la situation particulière d’Israël, et ils ne nous font pas de reproches », estime un ancien diplomate israélien.Lire aussi  A l’aéroport Ben-Gourion de Tel Aviv, les prémices d’une vague d’immigration juive ukrainienne

Le fait qu’Israël n’ait pas adopté de sanctions significatives contre la Russie ne paraît pas gêner. « Il est possible, cependant, que Washington l’encourage à couper discrètement l’accès de Moscou à certaines armes cyber israéliennes utilisées par l’appareil militaire », note un diplomate occidental. Notamment des outils de surveillance informatique.

Depuis Moscou, M. Bennett s’est rendu en Allemagne, pour dîner avec Olaf Scholz, quelques jours après une visite du chancelier à Jérusalem. Il a aussi échangé par téléphone avec Emmanuel Macron, qui l’avait informé de ses discussions récentes avec le chef du Kremlin, selon l’Elysée. Dimanche, il a encore poursuivi ces contacts, par téléphone, y compris avec Vladimir Poutine.

Fragile équilibre

M. Bennett n’est pas là par hasard. Israël figure au premier cercle des nations affectées par cette guerre, de par sa communauté issue de l’ex-URSS (15 % de la population). Dès 2011, M. Poutine reconnaissait un statut particulier à ce pays, « pratiquement russophone ». Le gouvernement ne ménage pas ses efforts pour aider ceux qui le souhaitent, parmi les 200 000 juifs d’Ukraine éligibles à l’alya (l’émigration en Israël), à quitter le pays. Le poids historique de cette entreprise n’échappe à aucun Israélien, alors qu’Odessa, « Jérusalem d’Europe », est menacée.Lire aussi  Article réservé à nos abonnésGuerre en Ukraine : à Kiev, la « douleur insondable » des juifs poussés à l’exode par l’offensive russe

Israël est par ailleurs familier de la logique de guerre russe : il comprend son usage de la force dans les relations internationales, et prend au sérieux ses menaces nucléaires. L’armée entretient un dialogue constant avec Moscou, dont les troupes assurent depuis 2015 la survie du régime syrien, à sa frontière. Ces échanges n’ont jamais permis à Israël de juguler l’influence à Damas de l’Iran, son grand ennemi régional. Mais en soulignant constamment les promesses non tenues de Moscou, l’Etat hébreu a légitimé ses propres frappes contre les intérêts iraniens dans le pays. Sans jamais prendre l’armée russe par surprise.

Ce fragile équilibre, Israël craint de le voir bouleversé par la marche à l’abîme dans laquelle Moscou s’est engagé. Etat paria en devenir, menacé d’un appareil de sanctions comparable à ce que l’Iran subit depuis 2018, la Russie pourrait être tentée d’exercer son pouvoir de nuisance en Syrie. Téhéran peut aussi espérer se rapprocher de Moscou et gagner en marge de manœuvre. Enfin, Israël suit de près la tentation de M. Poutine de lier la guerre en Ukraine aux négociations internationales sur le nucléaire iranien, qui s’achevaient à Vienne avant la guerre.

Pour l’heure, M. Bennett mène ces démarches à la tête d’une étroite équipe « commando », avec deux conseillers pour la sécurité nationale et la diplomatie, en concertation avec Yaïr Lapid, le puissant ministre des affaires étrangères. Une figure se détache dans cette équipe : Zeev Elkin, le responsable israélien qui a fréquenté le plus longuement M. Poutine.Lire aussi  Article réservé à nos abonnésOmer Bartov : « En parlant de “dénazifier” l’Ukraine, Poutine veut justifier sa politique expansionniste »

Natif d’Ukraine – son frère résidait avant-guerre à Kharkiv –, M. Elkin a assisté l’ex-premier ministre Benyamin Nétanyahou dans la plupart de ses rencontres avec le chef du Kremlin depuis 2009. Ministre de la construction, c’est lui qui a joué le rôle de Cassandre, dès février, au sein du cabinet de sécurité, en mettant en garde ses confrères incrédules contre une invasion russe de l’Ukraine, qu’il jugeait déjà probable.

Louis Imbert (Jérusalem, correspondant)

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1 Comment

  1. Qu’attendre d’autre de la part d’une raclure anti-israélienne de l’Immonde ?
    Une prouesse israélienne ne peut que les attrister.
    Que le cul leur pèle.

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