Alors que ce matin nous obsède tous cette image prise par satellite d’un convoi militaire russe de plus de 60 kilomètres se dirigeant vers Kiev et que parallèlement le président ukrainien appelle à interdire la Russie de « tous les ports » et « aéroports du monde », pour montrer que l’humanité est capable de se défendre »,
Alors que ce matin Bruno Le Maire promet « une guerre économique et financière totale à la Russie » visant à « provoquer l’effondrement de l’économie russe » et évoque ces sanctions « appliquées » jusqu’à ce que « Vladimir Poutine revienne à de meilleures intentions en Ukraine »,
De partout fusent des prises de position en soutien à l’Ukraine, l’offensive déclenchée par Vladimir Poutine ayant provoqué des réactions dans des secteurs d’ordinaire peu ouverts aux prises de positions politiques.
Après que Facebook et Instagram, rejoints par YouTube, aient bloqué « avec effet immédiat «les chaîne des media russes Russia Today (RT) et Sputnik,
Elena Kovalskaya, directrice du Théâtre d’État et du Centre culturel Vsevolod Meyerhold de Moscou, a annoncé sa démission en signe de protestation : « Il est impossible de travailler pour un meurtrier et de lui percevoir un salaire », écrit-elle, alors que le Théâtre Maïakovski de Moscou pour sa part a interdit à ses acteurs de faire aucun commentaire sur l’invasion de l’Ukraine par la Russie, tout commentaire négatif étant amené à être considéré comme une « trahison ».
Disney et Sony, pour leur part, ont décidé des mesures de rétorsion en suspendant la sortie de leurs films en Russie, Disney déclarant par ailleurs travailler avec des ONG pour fournir une aide d’urgence et d’autres formes d’assistance humanitaire aux réfugiés.
L’art lyrique n’est pas en reste : des artistes lyriques ont rapidement affiché sur leurs réseaux sociaux leur soutien au peuple ukrainien, mettant en délicatesse ceux qui se taisaient et amenant ceux-là à se positionner. De grands chefs comme le Russe Semyon Bychkov et l’Ukrainienne Oksana Lyniv ont condamné l’attaque, d’autres comme Lorenzo Viotti qui dirige actuellement Thaïs à la Scala de Milan se sont inscrits dans le même mouvement, et le chef d’orchestre Vladimir Jurowski ayant démarré son concert à Berlin avec le Rundfunk-Sinfonieorchester avec l’hymne ukrainien.
A noter : des artistes proches du Président russe commencent à être mis en cause : Valery Gergiev est sommé par la Scala de condamner l’invasion de l’Ukraine, faute de quoi les contrats qui le lient au théâtre scaligère seront résiliés. De même, le Carnegie Hall de New York a fait savoir à Gergiev qu’il serait remplacé, rejoint par le maire de Munich où Gergiev dirige le Munich Philharmonic ou le Rotterdam Philharmonic, prêt à annuler l’ensemble des concerts réalisés avec lui.
Jusqu’à quand le patron du théâtre Mariinsky à Saint-Pétersbourg pourra-t-il se murer dans le silence ? Son agent artistique autrichien Marcus Felsner l’a lâché à son tour, déclarant qu’il était devenu impossible et clairement indésirable de défendre les intérêts du maestro. Personnellement j’ai le cœur brisé, c’est le jour le plus triste de ma vie professionnelle. Valery Gergiev est par ailleurs persona non grata à la Philharmonie de Paris où Gergiev devait diriger une intégrale des symphonies de Tchaïkovski avec l’Orchestre de Paris, et e produire en avril avec celui du Mariinsky et en mai avec les Müncher Philharmoniker.
La soprano russe Anna Netrebko a publié pour sa part un texte où elle déclare : « Il n’est pas juste d’obliger les artistes ou toute personnalité publique à exprimer leurs opinions politiques en public et à dénoncer leur patrie. Cela devrait être un choix libre. Je ne suis pas une personne politique. Je ne suis pas un expert en politique. Je suis un artiste et mon but est d’unir au-delà des clivages politiques ».
Au Teatro de San Carlo de Naples, la soprano ukrainienne Liudmyla Monastyrska et la mezzo-soprano russe Ekaterina Gubanova se sont étreintes longuement au moment des rappels, envoyant au monde via ce geste symbolique un message de paix.
Le pianiste Denis Matsuev, qui avait été en accord avec la politique de Vladimir Poutine dans le passé, était absent vendredi lors du Deuxième Concerto pour piano de Rachmaninov.
La Russie a enfin été exclue de la Coupe du monde de football par son organisatrice, la Fifa, qui a annoncé lundi, via un communiqué commun avec la Confédération européenne UEFA, la suspension des sélections nationales et des clubs russes « jusqu’à nouvel ordre » en réaction à l’invasion de l’Ukraine.
Depardieu? Lui qui n’a de cesse de vanter sa nouvelle patrie, la Russie, cette « grande démocratie », et de faire les éloges de Vladimir Poutine, vient d’appeler l’AFP: « La Russie et l’Ukraine ont toujours été des pays frères. Je suis contre cette guerre fratricide. Je dis: ‘Arrêtez les armes et négociez!' », a-t-il déclaré.
Et Roman Arkadievitch Abramovitch? Celui dont les media, il y a une poignée de jours, titraient avec une rare élégance sur « le chèque à six chiffres » offert à Yad Vashem? TJ reviendra très vite sur … l’embarras du propriétaire de Chelsea, pointé du doigt pour ses liens avec Vladimir Poutine et menacé de sanctions d’un côté, et « en même temps » appelé par l’Ukraine pour essayer de trouver une solution…
Sarah Cattan