Gaël-Georges Moullec. Intervention du Président de la Fédération de Russie

Après une journée qui a vu la tenue en direct à la télévision d’une session du Conseil de sécurité, le président russe Vladimir Poutine a annoncé que la Russie reconnaissait les Républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk. Cette reconnaissance a été immédiatement suivie par la signature d’un accord d’Amitié, de coopération et d’aide mutuelle entre la Russie et les deux républiques. A la base de ces accords, les décrets n°71 et 72 du président de la Fédération de Russie ordonnent au ministère russe de la Défense que les Forces Armées de la Russie assument « des fonctions de maintien de la paix » sur les territoires des Républiques populaires de Donetsk et Lougansk. Alors que les troupes russes prennent position sur ces nouveaux territoires, il est clair que le Rubicon a été franchi par le président russe.

La Revue Politique et Parlementaire est la première publication française à vous proposer la traduction de la totalité de l’intervention du chef de l’état russe prononcée à la télévision le soir du 21 février 2022 pour expliquer sa décision. Ce texte est important car il permet de disposer dans leur exhaustivité des éléments de justification du point de vue de Moscou d’une intervention qui, aujourd’hui, remet clairement en question les accords de Minsk signés en 2014.

L’importance du moment fait déjà de cette intervention un Document d’Histoire.


Intervention du chef de l’état russe prononcée à la télévision le soir du 21 février 2022 pour expliquer sa décision

Chers citoyens de Russie ! Chers amis !

Le sujet de mon discours concerne les événements en Ukraine et pourquoi cette question est si importante pour nous, pour la Russie. Bien entendu, mon adresse s’adresse également à nos compatriotes d’Ukraine. Je vais devoir parler longuement et en détail. La question est très sérieuse.

La situation dans le Donbass est redevenue critique et aiguë. Et aujourd’hui, je m’adresse directement à vous, non seulement pour faire le point sur ce qui se passe, mais aussi pour vous informer des décisions qui sont prises et des éventuelles étapes ultérieures dans cette direction.

Je tiens à souligner une fois de plus que l’Ukraine n’est pas pour nous un simple pays voisin. Elle fait partie intégrante de notre propre histoire, de notre culture et de notre espace spirituel. Il s’agit de nos amis, de nos parents, non seulement de nos collègues, amis et anciens collègues de travail, mais aussi de nos parents et des membres de notre famille proche.

Depuis les temps anciens, les habitants des terres historiques du sud-ouest de l’ancienne Russie se sont appelés Russes et orthodoxes. Il en était ainsi avant le XVIIe siècle, lorsqu’une partie de ces territoires a été réunifiée avec l’État russe, et après.

Il nous semble qu’en principe, nous sommes tous au courant, que nous parlons de faits connus. Toutefois, pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui, pour expliquer les motifs des actions de la Russie et les objectifs que nous nous sommes fixés, il est nécessaire de dire au moins quelques mots sur l’histoire de la question.

Permettez-moi donc de commencer par le fait que l’Ukraine moderne a été entièrement créée par la Russie, ou plus précisément, par la Russie bolchevique et communiste. Le processus a commencé presque immédiatement après la révolution de 1917, et Lénine et ses compagnons d’armes l’ont fait d’une manière très brutale pour la Russie elle-même – par la sécession, en arrachant des parties des territoires historiquesde la Russie. Personne, bien sûr, n’a demandé quoi que ce soit aux millions de personnes qui y vivaient.

Puis, à la veille et après la Grande Guerre patriotique, Staline a ajouté à l’Union soviétique et transféré à l’Ukraine des terres qui appartenaient auparavant à la Pologne, à la Roumanie et à la Hongrie. En guise de compensation, Staline a donné à la Pologne certaines de ses terres allemandes ancestrales et, en 1954, Khrouchtchev, on ne sait pourquoi, a pris la Crimée à la Russie et l’a également donnée à l’Ukraine. En fait, c’est ainsi que s’est formé le territoire de l’Ukraine soviétique.

Mais je veux maintenant accorder une attention particulière à la période initiale de la création de l’URSS. Je pense que c’est très important pour nous. Nous devrons, comme on dit, partir de loin.

Permettez-moi de vous rappeler qu’après la révolution d’octobre 1917 et la guerre civile qui a suivi, les bolcheviks ont commencé à construire un nouvel État bien qu’il y ait de nombreux désaccords entre eux. Staline, qui cumule en 1922 les fonctions de secrétaire général du Comité central du PCR(b) et de commissaire du peuple pour les nationalités, propose de construire le pays sur les principes de l’autonomisation, c’est-à-dire de donner aux républiques – les futures unités administratives-territoriales – de larges pouvoirs au fur et à mesure de leur adhésion à l’État unifié.

Lénine critique ce plan et propose de faire des concessions aux nationalistes, comme il les appelle à l’époque – les « indépendants ». Ce sont les idées de Lénine sur une structure étatique essentiellement confédérative et sur le droit des nations à l’autodétermination jusqu’à la sécession qui ont constitué le fondement de l’État soviétique : d’abord en 1922, elles ont été consacrées dans la Déclaration sur l’Union des républiques socialistes soviétiques, puis, après la mort de Lénine, dans la Constitution de l’URSS de 1924.

Dès là de nombreuses questions se posent immédiatement. Et la première d’entre elles, la principale : pourquoi était-il nécessaire de satisfaire, sans compter, les ambitions nationalistes sans cesse croissantes aux confins de l’ancien empire ? Transférer d’immenses territoires, souvent sans lien entre eux, à des unités administratives nouvellement créées, et souvent formées de manière arbitraire – les Républiques de l’Union. Je répète, les territoires transférés l’ont été avec la population de la Russie historique [qui y habitait].

De plus, dans les faits, ces unités administratives ont reçu le statut et une forme d’entités étatiques nationales. Je me demande une fois de plus : pourquoi fallait-il faire des cadeaux aussi généreux, dont ils n’avaient même pas révé, aux nationalistes les plus ardents, tout comme pourquoi donner aux Républiques le droit de se séparer de l’État unifié sans aucune condition ?

À première vue, ça n’a pas de sens, c’est une folie. Mais ce n’est qu’à première vue. Il y a une explication. Après la révolution, la tâche principale des bolcheviks était de conserver le pouvoir à tout prix, précisément à tout prix. Pour cela, ils étaient capables de tout : les conditions humiliantes du traité de Brest, à une époque où l’Allemagne du Kaiser et ses alliés se trouvaient dans une situation militaire et économique des plus difficiles, à un moment où l’issue de la Première Guerre mondiale était en fait prédéterminée, cela pour satisfaire aux demandes, à tous les désirs des nationalistes à l’intérieur du pays.

Du point de vue du destin historique de la Russie et de ses peuples, les principes léninistes de construction de l’État n’étaient pas seulement une erreur, c’était, comme on dit, bien pire qu’une erreur. Après l’effondrement de l’URSS en 1991, cela est devenu parfaitement clair.

Bien sûr, les événements du passé ne peuvent être modifiés, mais nous devons pour le moins en parler directement et honnêtement, sans aucune réserve et sans aucune coloration politique. Je ne peux qu’ajouter, en ce qui me concerne, que des considérations sur une situation politique conjoncturelle, aussi effective et avantageuses qu’elles puissent paraître à un moment donné, ne doivent et ne peuvent en aucun cas constituer la base sur laquelle repose les principes fondamentaux de l’État.

Je n’accuse personne de quoi que ce soit maintenant, la situation du pays à l’époque et après la guerre civile, ou encore à la veille de celle-ci, était incroyablement difficile, critique. Tout ce que je veux dire aujourd’hui, c’est que c’était comme ça. C’est un fait historique. En fait, comme je l’ai déjà dit, la politique bolchevique a abouti à l’émergence de l’Ukraine soviétique, qui, encore aujourd’hui, peut être appelée à juste titre « L’Ukraine de Vladimir Lénine ». Il en est l’auteur et l’architecte. Cela est totalement confirmé par les documents d’archives, y compris les directives strictes de Lénine sur le Donbass, qui a été littéralement encastré au sein de l’Ukraine. Et maintenant, de  » reconnaissants descendants  » [de cette Ukraine] démolissent les monuments à Lénine. Ils appellent cela la « décommunisation ».

Vous en voulez de la décommunisation ? Eh bien, ça nous convient parfaitement. Mais nous ne nous arrêtons pas à mi-chemin. Nous sommes prêts à vous montrer ce que signifiepour l’Ukraine une véritable décommunisation.

Pour en revenir à l’histoire de la question, je répéterai qu’en 1922, l’URSS a été formée sur le territoire de l’ancien Empire russe. Mais la vie elle-même a immédiatement montré qu’il était tout simplement impossible de maintenir un territoire aussi vaste et complexe, ni de le gouverner en se basant sur les principes amorphes, de facto confédéraux [qui étaient]proposés. Ils étaient complètement déconnectés de la réalité et de la tradition historique.

Il est logique que la Terreur rouge, une transition rapide vers une dictature stalinienne, la domination de l’idéologie communiste et le monopole du parti communiste sur le pouvoir, les nationalisations et la planification de l’économie nationale – tout cela a transformé en pratique les principes déclarés mais inapplicables de l’État en une déclaration vide de sens en une simple. En réalité, les Républiques de l’Union[soviétique] n’avaient aucun droit souverain, ils n’existaient tout simplement pas. Dans la pratique, un État strictement centralisé et totalement unitaire a été créé.

En fait dans la pratique Staline a pleinement réalisé non pas les idées de Lénine, mais ses propres idées sur l’État. Cependant, il apporté aucune modification pertinente pertinents dans les documents fondamentaux ; dans la Constitution du pays, il n’a pas révisé formellement les principes léninistes proclamés lors de la naissance de l’URSS. Cela semblait alors inutile – tout fonctionnait sous le régime totalitaire, et extérieurement, il semblait beau, attrayant et même ultra-démocratique.

Et pourtant, il est dommage que les bases fondamentales, formellement légales, sur lesquelles tout notre État a été construit n’aient pas été rapidement expurgées des fantaisies odieuses et utopiques inspirées par la révolution, mais absolument destructrices pour tout pays normal. Mais personne ne pensait à l’avenir, comme cela a souvent été le cas dans notre pays.

Les dirigeants du parti communiste semblaient être convaincus qu’ils avaient réussi à former un système de gouvernement solide, qu’ils avaient finalement résolu la question nationale grâce à leurs politiques. Mais la falsification, la substitution des concepts, la manipulation de la conscience publique et la tromperie ont été coûteuses. Le bacille de l’ambition nationaliste n’avait pas disparu, et la bombe initiale qui avait été posée pour miner l’immunité de l’État contre la contagion du nationalisme n’attendait que son heure soit venue. Une telle bombe, je le répète, était le droit de sortir de l’URSS.

Au milieu des années 80, dans un contexte de problèmes socio-économiques croissants et de crise évidente de l’économie planifiée, la question nationale, dont l’essence n’est pas une quelconque attente et aspiration non satisfaite des peuples de l’Union, mais surtout l’appétit croissant des élites locales, devient de plus en plus pressante.

Cependant, la direction du PCUS, au lieu d’analyser en profondeur la situation, de prendre des mesures adéquates, en premier lieu dans l’économie, et d’effectuer une transformation graduelle, réfléchie et délibérée du système politique et de la structure de l’État, s’est limitée à un verbiage pur et simple sur la restauration du principe léniniste d’autodétermination.

De plus, alors que la lutte pour le pouvoir se déroulait au sein même du parti communiste, chacun des camps opposés a commencé à stimuler, encourager et jouer inconsidérément sur le sentiment nationaliste, promettant à ses partisans potentiels tout et n’importe quoi. Au milieu des bavardages superficiels et populistes à propos de la démocratie et d’un avenir radieux construit soit sur la base d’une économie de marché, soit sur une économie planifiée, mais dans des conditions d’appauvrissement réel et de déficit total, le pouvoir n’a jamaispensé aux inévitables conséquences tragiques pour le pays.

Puis le pouvoir a suivi un chemin bien tracé visant à la satisfaction des ambitions des élites nationalistes, nourries dans les rangs de leur propre parti, oubliant que le PCUS n’avait plus, et Dieu merci, les instruments indispensables pour garder le pouvoir et le pays lui-même. [Ces instruments étant] la terreur d’État et une dictature de type stalinien. Etcela au moment même où le fameux rôle de leader du parti, tel un brouillard matinal, disparaissait sous leurs yeux.

En septembre 1989, le plénum du Comité central du PCUS a adopté un document fatidique – la soi-disant « politique des nationalités du Parti dans les conditions modernes » qui constitue la plate-forme du PCUS. Elle contenait les dispositions suivantes : « Les républiques de l’Union ont tous les droits correspondant à leur statut d’États socialistes souverains.

Autre point : « Les organes représentatifs suprêmes des républiques de l’Union peuvent faire appel et suspendre les décrets et ordonnances du gouvernement de l’Union sur leurs territoires ».

Enfin : « Chaque république de l’Union dispose de sa propre citoyenneté, qui s’applique à tous ses habitants ».

N’était-il pas évident de savoir à quoi mèneraient de telles formulations et décisions ?

Ce n’est ni le lieu ni le moment d’aborder des questions de droit étatique ou constitutionnel, de définir la notion même de citoyenneté. Mais la question se pose quand même : dans ces circonstances déjà difficiles, pourquoi fallait-il ébranler le pays de cette manière ? Les faits restent des faits.

Deux ans avant l’effondrement de l’URSS, son sort était déjàpratiquement scellé. Maintenant ce sont les radicaux et les nationalistes, y compris et surtout en Ukraine, qui s’attribuent le mérite d’avoir conquis leur l’indépendance. Comme nous pouvons le constater, ce n’est pas le cas. L’effondrement de notre pays un et indivisible a été causé par les erreurs historiques et stratégiques des dirigeants bolcheviques, par la direction du PCUS, commises à différents moments de la construction de l’État, de la politique économique et de la politique des nationalités. L’effondrement de la Russie historique appelée alors URSS est à mettre sur leur conscience.

Malgré toutes ces injustices, ces tromperies et le vol pur et simple commis contre la Russie, notre peuple, précisément le peuple, a reconnu les nouvelles réalités géopolitiques apparus après l’effondrement de l’URSS et a reconnu les nouveaux États indépendants. Et ce n’est pas tout : la Russie elle-même, qui se trouvait dans une situation très difficile à l’époque, a aidé ses partenaires de la CEI, y compris ses collègues ukrainiens, dont les demandes de soutien matériel ont commencé à affluer immédiatement après la déclaration d’indépendance. Et notre pays a apporté ce soutien dans le respect de la dignité et de la souveraineté de l’Ukraine.

Selon les estimations des experts, qui sont confirmées par un simple calcul de nos prix de l’énergie, du volume des prêts préférentiels, les préférences économiques et commerciales que la Russie a accordés à l’Ukraine, se sont montées à un bénéfice total pour le budget de l’Ukraine, entre 1991 et 2013, à environ 250 milliards de dollars.

Mais c’est loin d’être tout. À la fin de 1991, les obligations de l’URSS envers les pays étrangers et les fonds internationaux s’élevaient à environ 100 milliards de dollars. Et initialement, il était supposé que ces prêts seraient remboursés par toutes les anciennes républiques soviétiques de manière solidaire, proportionnellement à leur potentiel économique. Cependant, la Russie a repris la totalité de la dette soviétique et l’a remboursée intégralement. Elle a finalement achevé ce processus en 2017.

En contrepartie, les nouveaux États indépendants devaient renoncer à certains de leurs avoirs de l’époque soviétique présents à l’étranger. Des accords en ce sens ont été conclus avec l’Ukraine en décembre 1994. Toutefois, Kiev n’a pas ratifié ces accords et, plus tard, a tout simplement refusé de les mettre en œuvre, revendiquant le fonds diamantaire, la réserve d’or ainsi que des biens et d’autres actifs anciennement soviétiques à l’étranger.

Et pourtant, malgré les problèmes bien connus, la Russie a toujours coopéré avec l’Ukraine de manière ouverte, honnête et, je le répète, dans le respect des intérêts de ce pays. Nos liens se sont développés dans divers domaines. Par exemple, en 2011, le chiffre d’affaires du commerce bilatéral a dépassé 50 milliards de dollars. Je dois noter que le volume des échanges commerciaux de l’Ukraine avec tous les pays de l’Union européenne en 2019, c’est-à-dire même avant la pandémie, était inférieur à ce chiffre.

Dans le même temps, il est frappant de constater que les autorités ukrainiennes préféraient agir de manière à bénéficier de tous les droits et avantages dans leurs relations avec la Russie, mais sans contracter aucune obligation.

Au lieu d’un partenariat, c’est l’oisiveté qui a prévalu, laquelle a parfois pris un caractère absolument cavalier de la part des autorités officielles de Kiev. Il suffit de se souvenir du chantage permanent dans le domaine du transit énergétique et du vol criant de [notre] gaz.

J’ajouterai que Kiev a essayé d’utiliser le dialogue avec la Russie comme un prétexte pour négocier avec l’Occident, en le faisant chanter sous la menace de se rapprocher de Moscou, tout cela en tentant d’obtenir des avantages pour son compte ; sinon l’influence russe en Ukraine grandirait.

Dans le même temps, les autorités ukrainiennes ont commencé, et je tiens à le souligner, dès les premiers pas, à construire leur État sur la négation de tout ce qui nous unit. Ces autorités ont cherché à déformer la conscience et la mémoire historique de millions de personnes, de générations entières vivant en Ukraine. Il n’est pas surprenant que la société ukrainienne ait été confrontée à la montée d’un nationalisme extrême, qui a rapidement pris la forme d’une russophobie agressive et d’un néonazisme. D’où l’implication des nationalistes et des néonazis ukrainiens dans les bandes terroristes du Caucase du Nord et leurs revendications territoriales de plus en plus vives à l’encontre de la Russie.

Un rôle a aussi été joué par de forces extérieures, qui ont utilisé un vaste réseau d’ONG et de services secrets pour cultiver leur clientèle en Ukraine et promouvoir leurs représentants au pouvoir.

Il est également important de comprendre que l’Ukraine n’a jamais eu une tradition réelle pour un véritable État. Depuis 1991, elle a suivi la voie d’une copie mécanique des modèles étrangers, détachée à la fois de l’histoire et des réalités ukrainiennes. Les institutions politiques de l’État ont été constamment remaniées pour convenir aux clans qui se formaient rapidement, avec leurs propres intérêts égoïstes qui n’ont rien à voir avec les intérêts du peuple ukrainien.

L’objectif du soi-disant choix de civilisation pro-occidental du gouvernement oligarchique ukrainien n’était et n’est pas de créer de meilleures conditions pour le bien-être de la population, mais plutôt de servir servilement les rivaux géopolitiques de la Russie en conservant les milliards de dollars volés aux Ukrainiens et cachés par les oligarques sur des comptes bancaires occidentaux.

Certains groupes financiers industriels, les partis et les hommes politiques qu’ils ont pris en charge se sont d’abord appuyés sur les nationalistes et les radicaux. D’autres groupese sont félicités d’avoir en apparence de bonnes relations avec la Russie, de maintenir une diversité culturelle et linguistique et sont ainsi parvenus au pouvoir grâce aux votes des citoyens qui soutenaient de tout cœur ces aspirations, y compris des millions de personnes dans le sud-est du pays. Mais une fois en poste, ces groupes ont immédiatement trahi leurs électeurs, abandonné leurs promesses de campagne et mis en œuvre des politiques sous la pression des radicaux, poursuivant parfois leurs anciens alliés – les organisations de la société civile qui prônaient le bilinguisme et la coopération avec la Russie. Ces groupes ont profité du fait que les personnes qui les soutenaient étaient, en règle générale, respectueuses de la loi, modérées dans leurs opinions, habituées à faire confiance aux autorités, et contrairement aux radicaux, ne montraient pas d’agressivité et ne recouraient pas à des actions illégales.

Les radicaux, à leur tour, deviennent insolents et leurs griefs augmentent d’année en année. Ils leur a été facile d’imposer à plusieurs reprises leur volonté à un gouvernement faible, lui-même infecté par le virus du nationalisme et de la corruption, et ont habilement substitué aux véritables intérêts culturels, économiques et sociaux du peuple et à la souveraineté réelle de l’Ukraine toutes sortes de spéculations sur des questions nationales et des signes extérieurs d’appartenance ethnique.

L’Ukraine ne connait d’Etat stable. Les procédures politiques et électorales ne servent que de couverture, d’écran pour la redistribution du pouvoir et des biens entre les différents clans oligarchiques.

La corruption, qui est sans aucun doute un défi et un problème pour de nombreux pays, y compris la Russie, a pris un caractère particulier en Ukraine. Elle a littéralement imprégné, corrodé l’État ukrainien, l’ensemble du système, toutes les branches du pouvoir. Les radicaux ont profité du mécontentement justifié des gens, ont utilisé la contestation et ont transformé en 2014 les manifestations de Maïdan à un coup d’État. Ce faisant, ils ont reçu une aide directe des pays étrangers. Le soutien matériel de l’ambassade des États-Unis au soi-disant camp de protestation sur la place de l’Indépendance à Kiev se serait élevé à un million de dollars par jour. D’autres sommes très importantes ont été transférées sans vergogne directement sur les comptes bancaires des dirigeants de l’opposition. Et nous parlons ici de dizaines de millions de dollars. Mais combien d’argent ont réellement reçu les personnes blessées, les familles de ceux qui sont morts dans les affrontements provoqués dans les rues et sur les places de Kiev et d’autres villes ? Il est préférable de ne pas poser de questions à ce sujet.

Les radicaux qui avaient pris le pouvoir ont organisé la persécution, une véritable terreur contre ceux qui s’élevaient contre leurs actions anticonstitutionnelles. Les politiciens, les journalistes et les personnalités publiques ont fait l’objet de moqueries et d’humiliations publiques. Les villes ukrainiennes ont été submergées par une vague de pogroms et de violence, une série de meurtres bruyants et impunis ont été commis. On ne peut s’empêcher de frémir devant la terrible tragédie d’Odessa, où des manifestants pacifiques ont été brutalement assassinés et brûlés vifs dans la Maison des syndicats. Les criminels qui ont commis ces atrocités n’ont pas été punis et personne ne les recherche. Mais nous connaissons leurs noms et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour les punir, les retrouver et les traduire en justice.

Maidan n’a pas rapproché l’Ukraine de la démocratie et du progrès. Avec le coup d’État, les nationalistes et les forces politiques qui les soutenaient ont finalement bloqué la situation et poussé l’Ukraine dans l’abîme de la guerre civile. Huit ans après ces événements, le pays est divisé. L’Ukraine connaît une crise socio-économique aiguë.

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