Bon
Samedi
Hier j’ai péroré sur demain…
Mais je me rends compte avec effarement qu’aujourd’hui est le demain d’hier…
Et que le temps est passé si vite que je suis dos au mur…
Tiendrai-je aujourd’hui mes engagements d’hier?
Bien sûr que non.
Relisez bien la phrase.
Tiendrai-je aujourd’hui…
Or moi j’avais dit demain…
Donc pour respecter ma promesse, je ne suis tenue à rien aujourd’hui puisque je n’avais mentionné que demain…
Mais je me rends compte que demain n’est qu’une utopie, un stratagème de paresseuse et de procrastinatrice, une construction mentale, une rouerie qui déguise l’indolence en projet, et que demain n’existe que dans la calebasse des léthargiques, comme la Saint GlinGlin.
C’est une feinte des esprits malins, un engagement apocryphe, c’est comme vouloir dépasser son ombre ou joindre les mains en coupe pour attraper le vent…
Zoe a un jour traversé une énorme plage dans une course effrénée et rageuse, haletante, pour rattraper l’ombre qui l’a impitoyablement précédée…
Elle a perdu la course et s’est retournée, désespérée, vers sa mère qui a ouvert les bras en signe d’impuissance…
Il est des causes perdues d’avance malgré les efforts déployés, mais aussi des évidences qui ne connaissent aucune exception…
Dépasser son ombre, gagner l’horizon, rendre muet l’écho de sa voix …
Atteindre demain qui d’une habile et rapide contorsion se mue en aujourd’hui…
Et même…
Même…
Si on n’y prête pas assez attention…
En hier…
Hier devrait être déclaré Jour de Catastrophe Nationale…
Hier je devais…
Appeler le syndic, aller voir tata Fortunée, acheter une poêle à frire, rendre la jupe arrachée des mains d’une cliente qui m’a fait l’espace d’un instant virevolter sur une musique onirique, dévoilant des gambettes de patineuse…
Et dire à tous ceux qu’on aime qu’on les aime…
Pour hier c’est trop tard …
Pour demain c’est une illusion…
Mais pour aujourd’hui…
Ah ! Pour aujourd’hui …
On doit le dire et le répéter pour ne jamais laisser s’insinuer le doute ou l’incertitude dans les interstices sombres qui ombrent souvent le quotidien …
Hier est si vite arrivé…
Cette course-là, on peut la gagner…
La nouvelle poêle attendra…
L’amour ne se périme pas, mais il est si suave et moelleux quand il est murmuré tout frais sorti du cœur dans un aujourd’hui dont personne ne peut garantir la pérennité…
Que cette journée signe le chant du cygne de l’hiver amer d’être détrôné par l’arrivée des verts tendres du printemps en embuscade…
Je vous aime
Je vous embrasse
PS:
Je ne voulais pas y revenir, mais ne laissez personne dire de vous « Elle ou Il m’aimait peut-être… »
Peut-être est le fossoyeur des illusions…
Le rince doigts de l’amertume.
© Michèle Chabelski
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