Les gentils Houthis et les vilains saoudiens? Par Michèle Mazel

Ce joli conte oriental pour les temps modernes se passe au Yémen, mythique patrie de la reine de Saba. 

Il raconte l’histoire des valeureux membres de la tribu yéménite des Houthis qui se révoltent à la fin du siècle dernier contre le gouvernement légitime qu’ils accusent de corruption. Les vilains saoudiens volent au secours de ce gouvernement.

Il faut dire que l’Arabie saoudite est séparée du Yémen par une longue frontière.

Les Saoudiens qui sont des Sunnites n’aiment pas les gentils Houthis qui sont des Chiites et qui encouragent la minorité chiite à se rebeller contre la monarchie. Heureusement les gentils Iraniens, qui sont eux-aussi des Chiites, n’aiment pas la famille royale saoudienne et voudraient bien provoquer sa chute et la remplacer par un régime chiite.

Ils soutiennent donc les Houthis et les approvisionnent en armes de plus en plus sophistiquées.   Grâce à eux les gentils Houthis réussissent au terme de combats acharnés à conquérir une grande partie du pays dont la capitale. En 2015 ils dissolvent le parlement.

Le Conseil de Coopération du Golfe, qui réunit Arabie saouditeOman, le KoweïtBahreïn, les Émirats arabes unis et le Qatar, tous  des méchants sunnites, condamne le coup d’Etat. Le secrétaire général des Nations Unies demande le retour du président légitime et le Conseil de sécurité des Nations unies demande aux gentils Houthis de quitter le pouvoir.

Ils n’en tiennent évidemment aucun compte. Le président Rouhani salue la prise du pouvoir par les Houthis.

Pourtant les forces loyalistes s’organisent et des combats sanglants faisant de nombreuses victimes continuent.  Fin mars 2016 l’aviation des vilains saoudiens   à la tête d’une coalition de puissances sunnites – Egypte, Soudan, Maroc et   membres du Conseil de Coopération du Golfe à l’exception d’Oman -effectue des premières frappes contre les gentils Houthis « pour défendre le gouvernement légitime du Yémen. »

Tandis que la guerre civile fait rage, la population paye un lourd tribut et on commence à parler de catastrophe humanitaire. Les Nations Unies montrent les vilains saoudiens du doigt.  

Pas les gentils Houthis et surtout pas les Iraniens. Les médias emboitent le pas. Allemagne et Belgique suspendent leurs ventes d’armes aux saoudiens. Le président américain Trump, qui a eu l’audace de proclamer que les Houthis étaient une organisation terroriste, doit user de son veto pour bloquer en 2019 l’interdiction de vendre des armes aux Saoudiens votée par le Congrès. Moins d’un mois après son inauguration son successeur Biden déclare l’arrêt du soutien et des ventes d’armes à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite et annule la désignation terroriste des Houthis. 

Les Iraniens, eux, accélèrent leurs livraisons d’armes. Mais comme ils sont du bon côté personne ne les   condamne.  Les Houthis multiplient les lancers de   drones sophistiqués contre le voisin saoudien et à la mi-janvier s’attaquent à des installations pétrolières   à Abou Dhabi.

Les Etats Unis se déclarent très préoccupés par la présente escalade. Le Secrétaire d’Etat Blinken appelle toutes les parties à respecter le droit humanitaire et à entreprendre un processus de paix sous l’égide de l’ONU. 

Il est trop poli pour nommer lesdites parties même son président envisage de requalifier les Houthis comme terroristes. Il n’y a pas de morale dans ce joli conte.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Michèle Mazel pour Dreuz.info.

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