Les trois quarts des électeurs estiment que la campagne « n’aborde pas les vrais problèmes » et « n’apporte pas des solutions pour le pays », selon le baromètre OpinionWay-Kéa Partners pour « Les Echos ». Une menace pour la future participation.
Le jugement est cinglant. Et l’avertissement de taille. A seulement onze semaines du premier tour de la présidentielle, les Français portent un regard très sévère sur la qualité de la campagne, selon le baromètre Opinion Way-Kéa Partner pour « Les Echos » et Radio classique. Les trois quarts d’entre eux jugent qu’elle « n’est pas de bonne qualité » (77 %), qu’elle « n’aborde pas les vrais problèmes » (74 %), qu’elle « n’apporte pas des solutions pour le pays » (76 %). Et donc qu’elle « ne répond pas » à leurs « attentes » (79 %).
Une majorité de sondés (58 %) trouve aussi le débat « trop agressif ». Cela renvoie à la volonté affichée par Emmanuel Macron d'”emmerder le non-vaccinés” (destinée à cliver mais peu appréciée de l’opinion ), la promesse de Valérie Pécrese de « ressortir le Kärcher de la cave » (sur l’insécurité) ou aux provocations d’ Eric Zemmour (du fusil dirigé sur les journalistes à son doigt d’honneur, en passant par sa critique de « l’obsession de l’inclusion » des élèves handicapés)…
Cela renvoie également aux échanges musclés, cette semaine, au Parlement européen, transformé en arène de campagne à l’occasion de la venue du chef de l’Etat, confronté notamment à un présidentiable, l’écologiste Yannick Jadot . Le sentiment d’agressivité de la campagne est amplifié par la crise sanitaire : dans la mesure où elle sature l’espace , seuls les décibels les plus élevés parviennent à passer le mur du son.
« Il y a une grande difficulté à faire émerger des thèmes centraux. Il n’y a pas de mesures emblématiques qui cristallisent le débat et le rendent visible », souligne Bruno Jeanbart, le vice-président d’OpinionWay, selon lequel le Covid « n’explique pas tout ». « Il est très rare qu’en janvier, on en soit encore à débattre de l’offre électorale », poursuit-il, alors que la gauche ne sait toujours pas quels seront ses candidats, l’irruption de Christiane Taubira ayant encore accru la confusion.
« Un vrai danger »
Faut-il y voir une nouvelle illustration du rejet de la politique et, plus globalement, de la défiance envers les institutions ? Ou simplement un manque d’intérêt pour une campagne qui ne démarrera vraiment que lorsqu’Emmanuel Macron sera officiellement candidat? Le risque est en tout cas très fort. Dans les sondages, le taux de participation est crédité de 10 points de moins qu’aux précédentes présidentielles à la même époque. « Il y a un vrai danger de désintérêt des électeurs et donc, au final, d’abstention massive », souligne Bruno Jeanbart.
Au premier tour de 2017, 22,2 % des inscrits avaient boudé les urnes. Au plus haut depuis le record de 2002 (28,4 %). Cette fois, les perspectives sont d’autant plus sombres que c’est l’électorat le plus enclin à aller voter – les personnes âgées – qui se montre le plus dur sur la campagne. Seuls 14 % des plus de 65 ans trouvent les débats « de bonne qualité », contre 44 % chez les moins de 35 ans. Plus des deux tiers des seniors (68 %) les disent « trop agressifs ». Un record.
© Pierre-Alain Furbury
Ce n’est pas une vraie campagne présidentielle. Natacha polony l’a dit avec justesse : Macron et les médias à la solde du pouvoir vont tout faire pour focaliser l’attention afin d’éviter tout vrai débat comme en 2017. Quant à la haine et l’agressivité elle vient essentiellement du trio PS/EELV/FI. Seuls Fabien Roussel et Éric Zemmour en fin de compte font preuve de dignité.
Focaliser l’attention sur le covid.