Nidra Poller. La Revue de Presse du Vendredi

Le Moyen-Orient vu par les médias anglo-saxons

Etats-Unis – Israël : à l’ère de Trump

« Le président ne vous aime plus, les gars ». Révélations sur la  colère de Trump contre Netanyahou

Jacob Kornbluh. The Forward. 12 décembre

Dans un livre paru dimanche en hébreu, le journaliste israélien Barak Ravid révèle les coulisses du rapport en dents de scie entre les Etats-Unis et Israël à l’ère de Trump, sans pour autant diminuer l’importance des deals de normalisation entre Israël et le monde arabe. Basé sur un entretien exclusif avec l’ancien président américain, le livre  est étoffé de témoignages des membres de son cercle rapproché.

Interviewé par le Forward, Ravid raconte comment Trump et Netanyahu ont cultivé l’image d’extrême proximité essentielle à chacun pour plaire à sa base.  Quand Netanyahou a échoué dans le deuxième round des élections de 2019, Trump a souligné, auprès des journalistes, que ses relations étaient avec Israël. C’était, dit Ravid, le début d’un changement d’attitude. Trump a constaté que tout ce  qu’il avait fait pour Netanyahou : le déplacement de l’ambassade de Tel Aviv à Jérusalem, la reconnaissance de souveraineté sur le Golan, sa politique moyen-orientale, n’avait pas produit le résultat escompté. Quand Trump parle de « loyauté », nous dit Ravid, ça ne se limite pas aux félicitations à Biden. Il s’attendait, en échange,  à l’aide de Netanyahou dans sa propre campagne de réélection.  « J’étais surpris », nous dit Ravid, par l’injure Fuck Bibi lâchée après une trentaine de minutes de conversation au sujet du  dirigeant israélien. Ce n’était pas de but en blanc ».

Les félicitations à Biden ont été le comble. Trump avait déjà déversé ses griefs contre Netanyahou, qui ne voulait rien en entendre du « deal ultime » avec les Palestiniens. Son incapacité à former un gouvernement a retardé le  lancement du plan de paix et quand, enfin, on a pu le faire, Netanyahou a gâché la cérémonie à la Maison Blanche en faisant croire qu’il avait le feu vert pour l’annexion. Dès que Netanyahou a quitté les lieux, Trump a crié sur ses assistants : « C’est quoi ce putain de bordel » ? Un ancien responsable de l’administration dit que Netanyahou s’était servi de Trump comme d’une « potiche ». Jared Kushner a ensuite  informé le premier ministre israélien que l’annexion était hors de question. Avi Berkowitz, envoyé spécial pour la paix au Moyen-Orient, a dit à Ravid que, depuis lors, les relations entre l’administration Trump et Israël se sont détériorées. Quand l’ancien ambassadeur israélien aux Etats-Unis, Ron Dermer, a demandé à parler directement avec Trump, Berkowitz a répondu: « Le président ne vous aime plus, les gars ». Un mois plus tard, lors d’une conversation avec Kushner à la Maison Blanche, Dermer a fait part des doutes, côté israélien, sur la confiance en l’administration Trump. Kushner, enragé, a hurlé des reproches : « Il ne faut pas croire que nous avons fait tout ça depuis trois ans pour vos beaux yeux. C’est parce que nous croyons sérieusement à la paix. Ce que tu dis là, c’est dégueulasse. Fous l’camp ».  Il l’a mis à la porte.

Fin juin, Netanyahou a menacé de faire une déclaration unilatérale d’annexion. Kushner l’a prévenu :  « Ce serait la pire erreur de ta vie. Trump se retournera contre toi ». Berkowitz, à son tour, lui a dit que le prix serait élevé :  « Trump fera des tweets hostiles, l’administration ne fera plus rien pour vous à la CPI ». Netanyahou, incrédule, a demandé si Trump oserait se montrer « anti-Israël » tout près des élections et Berkowitz a répondu: « Le Président ne t’aime plus à présent. Tu feras de ton meilleur ami un ennemi. »

L’idée de normalisation comme alternative à l’annexion est proposée. L’ambassadeur des EAU, Yousef Al Otaiba, déjà en contact avec la Maison Blanche depuis mars 2019, est partant. Après un mois de négociations tendues avec les Israéliens, on décide de laisser en suspens pendant au moins trois ans la question de l’annexion et d’opter pour la normalisation. Dermer fait part de l’exigence de Netanyahou d’y inclure un minimum de  trois pays arabes. Kushner dit à Berkowitz que « C’est un pays, point final, et si Netanyahou n’est pas content, qu’il aille se faire foutre ».

« S’avancer vers la normalisation servait des intérêts propres des EAU qui cherchaient à éviter une crise régionale et à préserver la solution à deux Etats », dit Ravid. « Toutefois, ils ont apporté l’échelle qui a permis à la Maison Blanche et à Netanyahou de descendre de l’arbre ». A la veille de l’annonce, Netanyahou a tenté de reculer, mais les Américains lui ont fait comprendre que le train avait déjà quitté la gare.

L’assassinat de Qassem Soleimani en janvier 2019 : Trump, qui s’attendait à un rôle israélien plus actif, était déçu et fâché avec Netanyahou qu’il trouvait réticent. « Les Israéliens sont prêts à combattre l’Iran », lançait-il, « jusqu’au dernier soldat américain. »  Il traitait les documents sur le programme nucléaire saisis en Iran par le Mossad de « vieux croquis sans intérêt », en précisant que Bibi n’était pour rien dans le retrait du JCPOA. « Les Juifs américains », dit-il, « sont moins pro-Israël que par le passé. Tu vois comment The New York Times déteste Israël ? Et c’est dirigé par des Juifs, la famille Sulzberger. »

Ravid au Forward : « La conclusion des Accords d’Abraham est un exploit énorme au crédit de Trump. Lui, seul, a été capable d’empêcher l’annexion et, en même temps,  d’encourager ces  pays arabes avec des offres tangibles  Je ne pense pas qu’un autre président aurait pu le faire ».

https://forward.com/news/479427/barak-ravid-trump-netanyahu-book-israel-united-states-interview/

Etats-Unis : covid 19

« Je suis médecin urgentiste dans le Michigan, où les lits d’hôpital sont occupés à saturation par les non-vaccinés« 

Rob Davidson. New York Times. 8 décembre

« Récemment, un malade, soixante-dix ans passés, s’est présenté au petit hôpital rural dans l’ouest du Michigan où je travaille comme médecin urgentiste depuis deux décennies. L’homme, testé positif pour le coronavirus quelques jours auparavant, souffrait d’une forte fièvre et de détresse respiratoire. Je lui ai demandé s’il était vacciné. Il a riposté : Je suis contre le vaccin.  Quelques jours plus tard, un jeune homme malade du covid-19 a été admis avec des niveaux d’oxygène dans le sang dangereusement bas. Son épouse est venue avec leur enfant lui dire au revoir avant l’intubation et la sédation. « Je ne pense pas que je vous reverrai » a-t-il dit. Il est mort avant la fin de la semaine.

Il n’était pas vacciné. Selon des statistiques récentes, neuf hôpitaux dans le Michigan fonctionnent à 100% de capacité, une vingtaine d’autres à 90% ou plus, un quart des hospitalisés souffrent du Covid-19. Mon hôpital est à capacité depuis quelques semaines, en grande majorité par des malades du covid-19, quasiment tous non vaccinés. Dans notre petit hôpital, les patients sont nos voisins, nos amis, d’anciens camarades de classe, nous sommes bouleversés à chaque fois qu’une vie est perdue, mais nous sommes  de plus en plus en colère et frustrés de savoir qu’on aurait pu, par la vaccination, éviter  ces drames.  Je suis fâché contre des stars de Fox News et des hommes politiques Republicans qui discréditent la vaccination, je suis frustré par des gens qui ne protègent pas leurs proches… Mais, même aux pires moments, j’empoche mes émotions et me dévoue à l’effort de sauver des vies.  Par moments, le stress est palpable. Le triage devient impossible, tout le personnel est pris, les lits sont occupés, les infirmières travaillent double depuis un mois, elles l’ont fait à chaque pic depuis le début et c’est sans fin. L’une de mes meilleures infirmières m’a dit qu’elle pleure chaque soir sur le chemin du retour à la maison.

Chez nous, comme partout dans le Michigan, la très grande majorité des patients n’est pas vaccinée, c’est le cas de 98% des malades en soins intensifs. Dans notre Etat, seulement 62% des résidents ont eu au moins une dose de vaccin. La vaccination obligatoire est la seule façon de sauver des vies dans  des communautés pro-Trump comme la mienne où la désinformation se répand et le taux de mortalité est plus élevé qu’ailleurs. Depuis deux ans nous avons tout fait pour essayer de convaincre les gens de porter le masque, de respecter les distances sociales et, depuis 2021, de se faire vacciner. Des millions d’Américains résistent. Ce n’est pas un choix uniquement personnel. A cause d’eux, des patients ayant un besoin urgent d’attention attendent des heures. Les soignants sont épuisés. Le coronavirus a sérieusement infecté 50 millions d’Américains et en a tué plus de 788 000. Il y aura d’autres mutations, le froid hivernal apportera aussi la grippe, le choix individuel ne peut pas justifier la mise en danger d’autrui. Avec l’augmentation des cas et du taux de mortalité et le stock limité d’antiviraux, le temps ne joue pas pour nous. Une obligation de vaccination à grande échelle sera peut-être le seul moyen de sauver nos hôpitaux et nos patients. »

Etats-Unis : rencontre Gantz – Austin

Le Secrétaire de la Défense, Lloyd J. Austin III, s’est entretenu en privé au Pentagone aujourd’hui avec son homologue israélien,  Benjamin « Benny » Gantz. Les deux dirigeants placent en haute priorité la question des agissements agressifs du gouvernement iranien.

Les propos d’Austin avant la rencontre : « Nous partageons l’inquiétude des Israéliens face au soutien iranien au terrorisme, au développement des missiles et à ses avancées nucléaires alarmantes. Nous sommes totalement alignés avec Israël dans notre engagement d’empêcher l’Iran d’obtenir l’arme nucléaire, ce qui est dans l’intérêt de la sécurité nationale des Etats-Unis comme d’Israël et du monde.  Nous avons donné priorité à la diplomatie, mais ce n’est pas le seul moyen  à notre disposition. Le Département de Défense collabore avec nos partenaires régionaux pour assurer un travail conjoint contre la menace iranienne. Nous nous défendrons, nous défendrons nos amis, nous défendrons nos intérêts ». Austin a également assuré Israël de l’engagement infaillible des Etats-Unis à garantir la sécurité d’Israël ainsi que sa supériorité militaire. « Dans cet objectif, on renforce la coopération bilatérale US-Israël, avec une attention particulière sur la défense aérienne et anti-missile. »

Gantz a tenu à rappeler à Austin qu’Israël est « en conflit avec le gouvernement iranien, pas avec le peuple, otage d’un régime tyrannique ». « L’Iran ne menace pas seulement notre sécurité, mais également notre façon de vivre et nos valeurs partagées. L’Iran cherche à dominer, à détruire la liberté, la dignité et la paix au Moyen-Orient et au-delà ».

Gantz compte sur les Etats-Unis pour s’assurer que l’Iran n’atteigne pas ses objectifs au niveau régional et partout au monde. Il a confiance dans l’engagement des Etats-Unis, puissance mondiale, d’empêcher l’Iran d’obtenir l’arme nucléaire. « La communauté internationale, sous le leadership américain, pourra contrer les  aspirations hégémoniques iraniennes, restaurer la stabilité et empêcher l’oppression des nations dans toute la région ».

https://www.defense.gov/News/News-Stories/Article/Article/2868558/iran-top-priority-for-us-israel/

Israël: Plaidoyer d’un MK éthiopien

Un membre de la Knesset prie les Etats-Unis de se tenir aux côtés du peuple et du gouvernement éthiopiens

ZeHabesha. 13 décembre

Gadi Yevarkan, membre de la Knesset israélienne et ancien ministre adjoint de sécurité publique, a écrit au Secrétaire d’Etat Anthony Blinken, pour solliciter la solidarité américaine avec le peuple et le gouvernement éthiopiens dans la recherche d’une solution à l’amiable aux défis posés. Fier d’être membre de « l’Israël Juif Ethiopie », Yevarkan se dit « troublé par la politique éthiopienne américaine ». « La violence contre des civils en Amhara et en Afar est inquiétante, tout comme la situation humanitaire dans les zones concernées, y compris le Tigré. Des millions de civils ont un besoin urgent d’assistance. L’heure est venue d’agir prudemment, pour éviter la crise. Un nouveau système démocratique est en construction en Ethiopie, basé sur les valeurs avancées par les Etats-Unis. Des millions de citoyens ont participé, il y a quelques mois, à des élections libres, un nouveau gouvernement a été élu, dirigé par le premier ministre Abiy Ahmed. La communauté internationale devrait impérativement agir pour soulager la souffrance du peuple, en demandant à l’opposition d’arrêter la violence. L’heure est venue de travailler avec toutes les parties pour faire avancer la paix. Je vous prie », écrit-il, « de vous ranger aux côtés du peuple d’Ethiopie. J’ai confiance que les Etats-Unis adopteront une approche juste et travailleront avec le gouvernement souverain éthiopien pour une solution à l’amiable. J’espère que vos efforts permettront à l’Ethiopie de construire une paix durable. Vous pouvez changer le cours de l’histoire en engageant le gouvernement de façon plus positive, plus constructive. Je  suis prêt à travailler avec vous dans ce but pour le bien-être de tous les Ethiopiens. L’Ethiopie est mon pays d’origine. Notre communauté garde des liens avec nos familles vivant encore là-bas. Nous prions pour la paix et la prospérité de l’Ethiopie, une nation ancienne avec un riche patrimoine culturel. Les Juifs y ont vécu en harmonie avec leurs compatriotes pendant des millénaires. La sécurité et la stabilité  du peuple éthiopien est d’une importance primordiale pour nous tous en Israël. »

https://zehabesha.com/israeli-knesset-member-urges-us-to-stand-with-people-govt-of-ethiopia/

© Nidra Poller


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Nidra Poller, née aux Etats-Unis dans une famille d’origine mitteleuropéenne et posée à Paris depuis 1972,  est une romancière devenue journaliste, le 30 septembre 2000, par la force des choses, dit-elle, par  l’irruption brutale, dans mon pays d’adoption, d’un antisémitisme génocidaire, Nidra Poller est connue depuis comme journaliste, publiée entre autres dans  Commentary, National Review Online, NY Sun, Controverses, Times of Israel, Wall Street Journal Europe, Jerusalem Post, Makor Rishon , CauseurTribune Juive, Pardès

Elle rédige le vendredi une Revue de la Presse anglophone pour le newsletter d’ELNET

Elle est l’auteur d’une œuvre élaborée en anglais, en français, en fiction et en géopolitique, dont L’Aube obscure du 21e siècle (chronique), madonna madonna (roman), So Courage & Gypsy Motion (novel)

J’assume la contradiction, ajoute Nidra, me disant romancière mais pas auteure.

Observatrice des faits de société et des événements politiques, elle s’intéresse particulièrement aux conséquences du conflit israélo-palestinien et aux nouvelles menaces d’antisémitisme en France. Elle fait partie des détracteurs de Charles Enderlin et France 2 dans la controverse sur l’Affaire Mohammed al-Durah  et soutient la théorie d’Eurabia (en particulier avec Richard Landes).

Elle a fondé les Éditions Ouskokata.

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