Philippe Labé nous fait découvrir le poème d’une poétesse marseillaise.
“De tous temps, de grands poètes ont magnifié à travers leurs vers, la beauté de leur dulcinée et l’amour qu’ils leur portaient mais quelques unes d’entre elles, parmi les plus douées pour l’art de la muse appolinienne, n’ont pas été en reste quand il s’est agi d’exalter leur passion amoureuse. Louise Labé, “La Belle Cordière“, fut l’une des plus célèbres, à qui l’on doit les plus beaux sonnets d’amour de la littérature française.
Voici donc un poème d’amour écrit par une poétesse tombée injustement dans l’oubli, Laurence Algan, que j’ai choisi dans un vieux recueil de ses oeuvres, acquis pour quelques euros, édité dans les célèbres éditions marseillaises “Les Cahiers du Sud” et qui, à mon humble avis, mériterait de figurer parmi les plus beaux conçus à la gloire de l’amour féminin.
Car comment, nous les hommes, pouvons-nous nous représenter ce que peut ressentir une femme dont le cœur brûle d’un profond et authentique amour ?
Au-delà de la pure séduction physique si éphémère, c’est, sans aucun doute, pour cette dernière, l’aboutissement de la quête de cet “éternel masculin” à l’instar de son célèbre homologue féminin, que rêvait d’atteindre l’illustre Goethe, qui rend l’attachement entre deux êtres de sexe opposé, indéfectible. Et pour notre poétesse qui l’exprime si magnifiquement, il réside très certainement dans ce paradoxal mariage unissant la puissante virilité de son amant à cet océan de tendresse que dissimule, tel un écrin, son apparente impassibilité.
Et si le secret de toute séduction entre un homme et une femme, consistait justement dans cette dualité interne qui inverse étrangement les qualités communes, respectives aux deux genres !
Ne serait-elle pas, peut-être, à l’origine du mystère de l’attraction des sexes ?…”
Toi
Ton nom, à petit bruit, qui palpite et qui chante,
Deux syllabes, pas plus….je les
prononce
Et les espoirs noués
De mes rêves
Surgissent, vivants.
Ton nom, comme une fleur entre mes lèvres.
Tes yeux durs, tes yeux méchants,
Où parfois je vole
Un reflet
Plus tendre que la tendresse,
Jalousement, tu les fermes,
Car tu veux
Dans le palais de ton cœur
Rester seul.
Ta bouche sévère, ta bouche lourde
De tout ce qu’elle n’avoue pas.
Orgueilleuse,
Elle dit des mots sans amour,
Plus chauds
Que le plus grand amour.
Et de ton menton volontaire où tu caches le creux d’un baiser,
Tu me repousses.
Car tu veux
M’aimer en secret.
Je ne dois pas savoir.
Et fier,
Près de moi, tout près,
Tu restes seul.
Tes mains, plus belles
Que des mains de femmes…
Tes mains en colloque avec toute la beauté du monde,
Tes mains au geste bénisseur.
Tu ne crois en rien,
Surtout pas en toi-même.
Mais tu crois en moi;
De toute la vigueur de tes bras musclés,
Tu m’enprisonnes
Et tu dis: ” Tu es libre…”
Libre de quoi? De ne pas t’aimer?
Toi qui fais bouger la vie,
Toi, comme un phare
Au large
Sur la mer.
Laurence Algan
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