Le témoin vedette modifie le sens de son témoignage
L’ancien haut responsable proche de Netanyahu est considéré comme essentiel dans le processus visant à prouver qu’il y aurait eu corruption des médias , dans l’affaire 4000 Bezeq-Walla contre l’ancien Premier ministre.
Par YONAH JEREMY BOB Publié: 23 NOVEMBRE 2021 12:39
Mise à jour : 23 NOVEMBRE 2021 17:46
Nir Hefetz en train de quitter le procès de l’ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, devant le tribunal de district de Jérusalem, le 16 novembre 2021.(crédit photo : YONATAN SINDEL/FLASH90)
L’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu ne pensait pas qu’il avait tronqué l’indépendance des médias à l’époque, a déclaré le témoin vedette Nir Hefetz au tribunal de district de Jérusalem dans un retournement de situation étonnant face au ministère public, qui pourrait s’avérer décisif plus tard, lorsque le verdict sera rendu.
Hefetz devait décrire la réaction de l’ancien premier Ministre, après a publication d’un article accusateur de 2015, dans Haaretz qui a, le premier, présenté les grandes lignes de ce qui devint plus tard l’affaire 4000, « l’affaire Bezeq-Walla ». Il a déclaré que lorsqu’il a parlé pour la première fois de l’article avec Netanyahu, l’ancien Premier ministre a rejeté la qualification de corruption et la façon dont « ils me poursuivent ».
Dans un moment boueversant, Hefetz s’est ensuite tourné vers les juges et a lentement déclaré : « et il ne fait aucun doute dans mon esprit que c’était sa réaction authentique », notant que Netanyahu avait fait l’objet d’une enquête pénale dans les années 1990.
La déclaration de Hefetz était tellement cruciale que l’accusation est intervenue pour informer le tribunal que Hefetz ne faisait que donner sa propre estimation au sujet de Netanyahu, en essayant de minimiser le fait que son témoin vedette a essentiellement dit que Netanyahu n’avait aucune intention criminelle.
Nir Hefetz, le témoin vedette de l’accusation et ancien collaborateur de Benjamin Netanyahu, a déclaré mardi devant le tribunal de district de Jérusalem qu’il agissait sous les instructions directes de l’ancien Premier ministre lorsqu’il est intervenu dans le façonnement de la couverture médiatique de Walla.
L’ancien haut responsable proche de Netanyahu est considéré comme essentiel pour prouver s’il y a ou non eu corruption des médias dans l’ affaire 4000, car il a interagi directement avec Netanyahu sur les fronts de la couverture médiatique et de la politique de communication.
Selon l’acte d’accusation, la prémisse de l’affaire 4000 était que Netanyahu aurait accordé un traitement de faveur en matière de politique de communication à Bezeq de Shaul Elovitch en échange du contrôle de la couverture médiatique de Walla, également détenue par Elovitch.
Hefetz a déclaré que Netanyahu maintenait un contrôle « complet » (en épelant les lettres hébraïques du mot « mi-leh-ah » lettre par lettre pour souligner l’importance de cette mainmise) de toutes les interactions avec les médias, en particulier Walla.
L’ancien proche de Netanyahu a déclaré que l’ancien Premier ministre avait particulièrement du temps le week-end, lorsqu’il passait plus de temps à examiner en détail des informations spécifiques avec sa femme, Sarah, et son fils adulte, Yair.
À la suite de ces séances avec la famille Netanyahu, Hefetz a déclaré qu’il recevait des appels lui transmettant des instructions sur les ordres à donner à Walla au sujet de leur couverture, qui émanaient d’un mélange du point de vue du Premier ministre et des deux autres membres de la famille, sur haut-parleur, mais que le Premier ministre était toujours présent lors de l’appel.
À un moment donné, Sarah et Yair ont même tenté de prendre un plus grand contrôle direct sur les questions médiatiques les concernant, mais Hefetz a déclaré que l’ancien Premier ministre avait repoussé ces tentatives et maintenu un contrôle direct, ainsi que sur les interactions avec son principal collaborateur, même sur ces questions.
Nir Hefetz, ancien associé de Benjamin et Sara Netanyahu et témoin officiel dans l’affaire 4000 (crédit : AVSHALOM SASSONI)
La seule exception, a noté Hefetz, concernait la coloration entièrement positive de reportages sur Sarah qui n’étaient absolument pas sujets à la moindre critique.
En complétant le tableau d’une déclaration qu’il a faite lors de son témoignage de lundi, Hefetz a expliqué pourquoi il a dit que Netanyahu travaillait constamment sur la question des médias, y compris concernant Walla, alors qu’il exigeait même d’être interrompu lors des réunions de sécurité (pour en traiter).
L’arrière-plan de cette démonstration était qu’« il y a eu un ou deux incidents où j’ai agi de manière indépendante » pensant que Netanyahu était retenu dans une réunion politique importante où il ne voudrait pas être dérangé pour de simples affaires médiatiques.
Pourtant, par la suite, Netanyahu lui a donné des ordres directs selon lesquels il avait agi de manière inappropriée et qu’au contraire, il devrait dorénavant toujours l’interrompre concernant les problèmes liés aux médias, quelle que soit la réunion dans laquelle il était impliqué et la gravité du problème.
Dans un moment très controversé, Hefetz a révélé que bon nombre de ses discussions directes avec Netanyahu sur la question des médias incluaient la présence de l’un des avocats de la défense actuellement dans la salle d’audience (probablement Amit Hadad.)
Ce moment et plusieurs autres instants où le ministère public a cherché à « rafraîchir la mémoire » de Hefetz, qui oublie fréquemment ce qu’il a dit à la police lors de son interrogatoire, ont conduit à une controverse sans précédent entre les avocats de l’accusation et ceux de la défense.
Ce vif échange a duré près d’une heure, perturbant complètement la fluidité du témoignage de Hefetz jusqu’à ce que les juges perdent patience face à la défense et lui disent de retenir ses contre-arguments pour le contre-interrogatoire de Hefetz.
Hefetz a ensuite relié la partie concernant Walla dans « le présumé stratagème de corruption » à la partie réglementaire de Bezeq.
Il a déclaré : « j’ai toujours parlé à Benjamin Netanyahu et Sara Netanyahu d’abord, avant de parler à Shlomo Filber » pour lui donner des directives sur la façon dont il pourrait octroyer un traitement favorable à Bezeq.
Il a clairement indiqué : « je n’ai aucune expertise, je ne pouvais pas lui donner de directives sans eux », ce qui signifie que Hefetz ne se sentait pas à l’aise du tout pour dire à Filber comment gérer la politique du ministère des Communications.
En d’autres termes, lorsque Hefetz a dit à Filber si et comment il fallait être complaisant envers Bezeq, ce n’est qu’après avoir reçu des ordres directs de l’ancien Premier ministre.
Hefetz confirme que Netanyahou (et Madame et son fils ainé) investissait des efforts considérables pour dévier les médias vers une attitude favorable à Netanyahou. Que c’était primordial pour Netanyahou au point de s’en occuper en priorité, avant des questions de sécurité.
Hefetz confirme aussi que Netanyahou était prêt à donner des avantages, aux frais de l’Etat, aux médias qui s’exprimeraient de manière favorable à son égard.
MAIS Hefetz dit que Netanyahou n’était pas conscient d’un problème légal ou moral que posait cette attitude ; à savoir acheter les faveurs des médias moyennant le pouvoir de l’Etat.
Peut-être. MAIS Hefetz n’était pas dans la tête de Netanyahou…Ce que Netanyahou pensait ou pas reste à éclaircir.
Et quand bien même, nul n’est censé ignorer la loi. Ignorer la loi et la morale, est-ce une circonstance atténuante ?