Pierre Saba. Paris et Alger : plus de vérités

Les relations générales et diplomatiques entre l’Algérie et la France sont problématiques. Elles sont régies sur le socle des accords d’Evian de 1962. Ces accords supposaient régler les domaines de l’indépendance algérienne, de l’interdépendance entre les deux pays, de la population française d’Algérie et de la libre et réciproque circulation des biens et des personnes entre la France et l’Algérie. La plupart des dispositions des accords d’Evian n’est pas réalisée. Les accords eux-mêmes sont si effacés qu’ils semblent méconnus.

Les positions algériennes et françaises se heurtent à un faisceau de réalités toujours estompées. Seule la projection du respect des intérêts des populations permettrait de sortir de cet épineux couloir.

Côté algérien

Les Exécutifs algériens qui se succèdent depuis l’indépendance en 1962 dressent contre la France une liste mouvante de reproches, de sollicitations, d’exigences dont certaines sont acceptées et d’autres refusées par l’ancienne puissance coloniale.

L’acrimonie principale évoquée à Alger depuis 1962 demeure la responsabilité coloniale de la France dans la situation économique que vit l’Algérie depuis son indépendance.

La revendication la plus exposée depuis Alger reste la reconnaissance par Paris de la faute coloniale aux plus hauts degrés de l’Histoire & de l’Administration.

Côté français

Paris procède régulièrement et avec une intensité variable aux regrets, remords et autres circonvolutions envers l’ancienne colonie.

Côté-réalités

Responsabilités négatives de la France

La colonisation française de l’Algérie a subordonné les populations à l’échelle coloniale. Cette échelle était fondée sur une pyramide sociale. Le sommet de la pyramide était occupé par ordre de grandeur par les français de France, les français naturalisés pour finir par les « indigènes musulmans » qui constituaient les publics aux situations les plus ingrates. La responsabilité coloniale de la France est donc établie en Algérie. Elle est d’ailleurs reconnue par Paris.

Responsabilités de la France

La colonisation a également promu en Algérie l’édification humaine, sociale, politique, sociale, agricole et de matières premières. La France quittait en 1962 une Algérie injuste et cependant équipée pour l’indépendance.

Responsabilités de l’Algérie

Les relations entre un Etat indépendant et son ex colonisateur sont difficiles par nature comme par destination. Elles dépendent de leurs moyens, de leurs méthodes et de la bonne volonté de chacune des deux parties. A et égard, les exemples des deux anciens protectorats de Tunisie et du Maroc éclairent par l’état de leurs relations stables avec Paris et sur l’acidité des liens entre Paris et Alger.

Contrairement à ses deux voisins (Maroc et Tunisie), l’Algérie reste sur la rancœur coloniale envers Paris. Elle la proclame unique responsable des difficultés de la gestion algérienne du pays. Les manifestations populaires algériennes à l’encontre de leurs dirigeants et les arrestations d’opposants tentent à démontrer leurs responsabilités dans la situation que vit le pays.

L’opposition algérienne s’exprime en Algérie avec difficultés. Elle est amenée à sortir du pays et parfois même en France pour s’énoncer. Dans ces conditions, les positions officielles algériennes ne sauraient être considérées comme unanimes.

Le quatrième couplet de l’hymne national algérien (Kasaman / nous nous engageons) est décidément édifiant.

« (…)Ô France ! le temps des palabres est révolu
Nous l’avons clos comme on ferme un livre
Ô France ! voici venu le jour où il te faut rendre des comptes
Prépare toi ! voici notre réponse
Le verdict, Notre révolution le rendra
Car nous avons décidé que l’Algérie vivra
Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !(…) »

Il est légitime de consigner les douleurs coloniales dans l’hymne national d’une ancienne colonie. L’Algérie maintien des menaces contre l’ancienne puissance coloniale dans son hymne national près de soixante ans après l’indépendance. La plupart des algériens est née après l’indépendance. Il s’agit manifestement de l’illustration et du prétexte de la responsabilité française dans la situation sociale, économique et politique que subit le pays en dépit de ses richesses nationales.

Projets

Au regard des intérêts des deux populations et des deux Etats si proches par l’Histoire, la géographie, la démographie, les relations franco-algériennes doivent changer.

L’Algérie doit cesser d’exiger de la France des éléments qui dépassent sa responsabilité et qui relèvent de la sienne propre. Elle doit en finir avec le maintien d’usages politiques fondés plus sur le passé que sur les libertés.

La France doit cesser ses circonlocutions, ses atermoiements, ses génuflexions. Elle doit reconnaître ses responsabilités négatives et positives dans la colonisation de l’Algérie. A cet effet, les souffrances des populations musulmanes pendant la colonisation et celles des populations françaises lors de la guerre d’Algérie ne doivent être tues ni atténuées.

La diplomatie entre Paris et Alger nécessite plus de vérité que de sévérité.

Pierre Saba

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2 Comments

  1. Cet article tente de mettre dos-à-dos France et Algérie dans une volonté de présenter la problématique entre ces pays comme symétrique : la faute à TOUS.

    MAIS si l’Algérie avait été un pays stable et prospère, comme sa situation au lendemain de l’indépendance de 1962, compte tenu de ses infrastructures (d’origine française) et des richesses de son sous-sol permettait d’espérer, il serait occupé à s’enrichir au lieu de vociférer des doléances.

    Ce sont les maux propres à l’Algérie qui s’expriment par ses ressentiments à l’égard de la France.

    La nature de ces maux saute aux yeux si on compare, exemple parmi d’autres, l’Algérie à un autre pays sorti d’une guerre presque simultanément : la Corée du sud.
    Ce pays, privé de ressources naturelles, est aujourd’hui une puissance industrielle et technologique planétaire ; le tout par la force du travail.
    Inutile de comparer à la déplorable situation algérienne, corrompue et paupérisée, qui voit sa jeunesse partir ailleurs (surtout en France…).

    L’Algérie n’a qu’à chercher la cause de ses problèmes dans sa propre culture, ses mœurs et, oui, sa religion…

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