Plutôt tolérant, je suis ouvert à toutes les cultures et toutes les modes. Alors, lorsque l’on m’a proposé de prendre un verre dans un bar à vins, dans le quartier branché de La Croix Rousse à Lyon, j’ai dit oui et je me suis aventuré en territoire hiptster.
N’est pas Claude Lévi-Strauss qui veut, et mes connaissances en anthropologie sont assez minces. Tachons quand même de décrire le “hipster”. En tout cas, le membre de la tribu qui m’a accueilli. Une barbe rousse assez fournie, bien taillée, remontant vers des tempes rasées de près. Sur la tête, un petit chapeau comme un nid d’oiseau. Une chemise à carreaux, un pantalon dans les tons orangés, à l’ourlet trop court, et des chaussures à semelles compensées.
Le contact n’a pas été facile, et j’ai noté son regard lourdement méprisant sur mon pull en cashmere, sans doute beaucoup trop sobre à son goût.
D’emblée, il m’a tutoyé et demandé mon prénom. “Ici, quand tu réserves une table, on lui donne ton prénom.” m’a t-il expliqué. Conciliant, j’ai répondu : “Ah, oui. C’est plus facile pour le service…” Il est devenu aussi rouge que sa barbe. “Je ne suis pas à ton service ! Ici, c’est un bar de potes et on est là pour se faire plaisir.”
Je ne pense pas que Lévi-Stauss ait rencontré une telle hostilité chez les indiens d’Amazonie. Comme je n’avais pas envie de retrouver ma tête réduite au bout d’une pique, comme élément de décoration du “bar de potes” , j’ai lâchement commandé un vin bio naturel ( j’en ai horreur), d’un de ses potes viticulteur hipster.
Le jambon de la planche de charcuteries était caoutchouteux et le pain rassis. Je ne sais pas si Lévi-Strauss aurait supporté cette ultime avanie, en tout cas, je suis sûr qu’Indiana Jones aurait suspendu le hipster au porte-manteaux.
J’ai opté pour une voie médiane. Je lui ai dit que son vin était immonde et que je ne serais jamais son pote. J’ai vaguement entendu en sortant du bar: “Connard de parisien…”
Pour conclure cette chronique ethnologique, je dirais que finalement, un hipster est un blaireau comme un autre.
© Daniel Sarfati
Poster un Commentaire