Une grande, très grande partie de la gauche s’est abîmée dans un narcissisme solipsiste psychotique, une auto-contemplation létale, elle préfère définitivement expirer dans les volutes de ses névroses obsessionnelles et de la satisfaction régressive et infiniment infantilisée du moindre de ses caprices, de la moindre de ses pulsions, elle jouit dans l’assouvissement vaniteux et passif de ses fantasmes idéologiques les plus désaxés, sans même voir qu’ils se mêlent très exactement aux hoquets de son agonie. Elle a juste perdu de vu qu’une masturbation indolente à ciel ouvert, dans le patio découvert d’un asile d’aliénés, n’a jamais pu tenir lieu de théorie politique ni de colonne vertébrale. Tout juste est-ce là l’antichambre de sa mort cérébrale.
Des Esseintes, le héros totalement à la dérive de Huysmans, dans les vapeurs d’opium de sa décadence érudite et toute symboliste, avait plus de hauteur et de dignité que ce cortège narcissique de nouvelles larves idéologiques, boursouflées de haine et affamées de néant post-cancellisé, que la gauche contemporaine nous défèque ad nauseam tous les jours, et qui saturent les médias, l’Université, les sciences sociales, la pédagogie et le tissu associatif et militant.
Ce genre de putréfaction sociétale se produit de temps à autre, tantôt cueillant Romulus Augustule comme une poire blette, tantôt offrant Constantinople sur le plateau d’argent des discussions sur le sexe des anges; nous aurons pour notre part la farce civilisationnelle la plus amère (mais la plus méritée, tant il est vrai que les pires humiliations ne viennent jamais par hasard) : la chute de la Raison, de l’Universalisme, de l’Humanisme et des Lumières sur l’autel décolonial supra-woke des pronoms non-genrés/non-binaires cis-blanc inclusifs non-discriminants méta-antiracistes.
Pauvre humanité. Pauvre République.
© Philippe-Emmanuel Toussaint
Diplômé en Droit public et en Littérature comparée diplômé à Paris-IV-Sorbonne, Philippe-Emmanuel Toussaint a été Editeur chez Pauvert et chez Sortilèges. Enseignant, Chercheur en littérature contemporaine, il est également auteur.
Il me semble que se sont les idées de Terra Nova qui sont la source de la décadence de la gauche.
La gauche politique est morte quand Krazucki (héros de la Résistance) et Marchais (que les gens de ma génération n’ont pas connus) sont décédés. A la place on a des partis et des organes de presse indigénistes c’est-à-dire encore plus à droite que l’aile droite du RN. Pour donner le change ils se focalisent sur des questions sociétales et encore ! Ils délaissent celles qui comptent vraiment (comme les maltraitances envers les neuro-atypiques ou l’aide aux sans-abri ou encore la cause animale) au bénéfice des délires identitaires susceptibles de leur apporter des voix.L’électorat populaire a totalement fui ces impostures politiques et journalistiques. Et il a eu raison. Depuis 1981, Jean Jaurès, Léon Blum et Jean Moulin doivent se retourner tous les jours dans leurs tombes.