
S’il n’existe plus aucun doute sur le fait qu’il sera candidat, peu d’électeurs croient sincèrement qu’Éric Zemmour pourrait être élu. Et pourtant, chaque jour passant, l’hypothèse gagne en crédibilité. Du moins si le polémiste n’est pas empêché physiquement de se présenter, éventualité dramatique qu’il ne faut pas prendre à la légère.
La probabilité grandissante d’une telle victoire ne se fonde ni sur les sondages, ni sur les prédictions de Mme Irma, mais sur l’observation attentive du théâtre politico-médiatique qui se joue chaque jour devant nos yeux.
En effet, en quelques mois à peine, les personnalités politiques de premier plan et de tous bords ont curieusement retourné leur veste. Leurs idéaux, leurs convictions et la totalité de leurs certitudes se sont envolés. Elles pensent soudain le contraire de tout ce qu’elles ont essayé de nous faire avaler depuis quarante ans.
Ainsi, le nucléaire redevient le plus écologique des modes de production d’énergie. La désindustrialisation du pays (50 000 emplois industriels détruits chaque année en moyenne, en France, depuis 1981), résultat des délocalisations, donc de l’Europe telle qu’elle a été pensée, saute enfin, comme par magie, aux yeux de chacun. La nécessité de défendre le principe de la primauté de notre droit sur le droit européen est admise par le plus grand nombre. Mais aussi, celles de freiner drastiquement l’immigration pour préserver l’identité du pays et relâcher la pression sur les bas salaires, de s’émanciper de la tutelle américaine, de sortir du commandement de l’Otan, de s’imposer face à l’Allemagne, de fermer parfois nos frontières, font soudain consensus. Pour faire court, ce que Zemmour écrit et dit depuis des années, et ce que n’importe quel citoyen lambda comprenait déjà il y a vingt ans, les Macron, Bertrand, Pécresse, Barnier, Hildago, Philippe, Sarkozy, Castex, j’en passe et des meilleurs, auraient donc attendu l’automne 2021 pour en prendre conscience ?
Nos élites dirigeantes ont-elles été stupides, ou bien machiavéliques?
Personne ne pourrait raisonnablement considérer qu’il s’agirait là d’une très tardive prise de conscience de la réalité de l’état du pays. A moins d’admettre que l’ensemble de la classe politique, autoproclamée républicaine, n’ait été collectivement frappée d’un syndrome aveuglant, abêtissant, voire débilitant, pendant près de quarante ans, il faut préférer s’interroger sur les raisons profondes des choix politiques opérés pendant des décennies au mépris de l’intérêt de la nation. Pour faire court, nos élites dirigeantes ont-elles été stupides, ou bien machiavéliques en servant les intérêts d’une caste de marionnettistes dont l’objectif, sous couvert de grandes idées humanistes, était simplement de s’enrichir au détriment du pays ? Qu’on se le dise, c’est forcément l’un ou l’autre. Or, ceux qui se sont succédé jusqu’à aujourd’hui à la tête de l’Etat sont tout, sauf stupides. De surcroit, ils ont le culot d’espérer qu’on les croie encore et qu’on les absolve de leurs méfaits !?
Mettons-nous un instant à leur place. Comment réagirait-on, en tant qu’individu, si l’heure était venue que des enfants orphelins dont nous aurions la tutelle, prenaient soudain conscience, alerté par un proche (que nous pourrions appeler Monsieur X ou Monsieur Z… va pour Z), que nous aurions sciemment dilapidé leur héritage des années durant ?
A l’évidence, nous ferions tout pour préserver notre honneur.
Aussi, contraint et forcés, nous reconnaitrions nous être trompés, mais de bonne foi assurément. Nous trouverions des justifications à nos actes. Nous affirmerions avoir voulu et pensé bien faire, et jurerions la main sur le cœur que dorénavant tout serait différent. Bref, nous lâcherions du lest. Pas trop, juste ce qu’il faut pour conserver la précieuse tutelle.
Mais que faire de Monsieur Z ?
Mais que faire de Monsieur Z ? S’il ne se taisait pas, nul doute que nous serions vite congédiés, voire qu’il prendrait notre place. Une seule solution : le diaboliser et le faire taire. Et notre acharnement à le disqualifier serait proportionnel à la crainte qu’il nous remplace. Enfin, peut-être même oserions-nous le qualifier, insulte suprême, de… fasciste !
Pourquoi fasciste ? Parce qu’alors tout serait permis à ses détracteurs. Absolument tout. Refuser le débat bien sûr, discréditer son discours, le censurer et justifier ceux qui le feront. Prudemment, dans un premier temps, nous condamnerions l’usage de la violence (tout en la justifiant insidieusement), puis si par malheur une tragédie se produisait, nous ne manquerions pas de dire et d’écrire qu’il fallait s’y attendre, un tel fascisme justifiant toutes les réactions excessives. Contre un fasciste, prendre les armes est un devoir !
Quant à la question de savoir si Zemmour sera victorieux en avril prochain, il suffit de brancher son téléviseur sur une chaine info à n’importe quelle heure, pour en être chaque jour d’avantage certain. Chacun peut quotidiennement mesurer l’ampleur de la haine, et donc de la peur, qui tenaillent la classe politique. D’où vient qu’elles soient à un tel niveau, si ce n’est qu’il y a bien prise de conscience, non pas de l’état de la France, mais du risque réel qu’Éric Zemmour n’y fasse enfin un grand ménage ? Chaque candidat déclaré, d’Hidalgo à Montebourg, en passant par Roussel et Barnier, y va de sa surenchère. C’est à celui qui montrera le plus de haine envers Zemmour. Tels de piètres comédiens en mal de reconnaissance, ils rivalisent tantôt d’outrances, tantôt de grandiloquence faussement solennelle, tels des exorciseurs aux yeux révulsés chassant le démon qui s’empare des Français, espérant que plus ils en feront plus ils seront crédibles. Mais ces gesticulations, en plus d’être risibles, ne font que révéler l’ampleur d’un désarroi de fin de règne.
Reste que, pour beaucoup de pro-Zemmour, profondément démocrates pour la plupart, il ne convient pour l’heure d’opposer à ces outrances, que des argumentaires structurés, des négations, des défenses en somme. Comme si, une sorte de complexe les habitait encore, un imperceptible sentiment de culpabilité qui les tétaniserait et leur ferait encore courber l’échine devant les agressions verbales. Cela doit cesser. La bienséance a des limites. Ceux qui méritent des insultes sont ceux qui nous ont pris pour des imbéciles pendant des décennies et nous ont menti sans vergogne. Ils veulent se placer sur le terrain de l’outrance ? Il est temps de leur renvoyer leurs insultes au visage.
Oui, peu d’électeurs croient possible la victoire du réel sur le mensonge, mais la quasi-totalité du personnel politique semble, quant à elle, la considérer avec effroi, de plus en plus probable, pour ne pas dire inéluctable. Comment ne pas y voir un signe ?
© Elie Sasson