Alexandre Devecchio. Eloge du Pavillon de banlieue

Avec beaucoup de retard, ma chronique de la semaine dernière sur France Inter. Un texte auquel je tiens particulièrement en forme d’hommage au pavillon de banlieue dans lequel j’ai grandi …

Le modèle à l’ancienne du pavillon avec jardin dont on peut faire le tour nous mène à une impasse. Nous devons assumer de mettre ce modèle derrière nous, a déclaré la ministre déléguée au logement, Emmanuelle Wargon, ajoutant que c’était « un non-sens écologique, économique et social ».  

Avant de rétropédaler …  

Il faut y voir plus qu’une maladresse ou une erreur de com’.

Ces déclarations d’Emmanuel Wargon illustrent, en réalité, la fracture entre la France des grandes métropoles et ce que le géographe Christophe Guilluy appelle La France périphérique. C’est-à-dire la France rurale, mais aussi la France des villes moyennes et petites : celle des ronds-points et des pavillons de banlieue où est née la révolte des Gilets jaunes.

Une France qui, lorsqu’elle n’est pas tout simplement invisible socialement, est trop souvent regardée avec condescendance par une partie des élites politico-médiatiques parisiennes.

A leurs yeux c’est la France des beaufs et des ploucs, celles des « petits blancs » adeptes du barbecue. Une France « anti social » et « anti-écolo », pensent-ils. Une France favorable aux populistes, repliée sur ses préjugés et son carré de pelouse.

Une vision caricaturale car s’il existe une France repliée sur elle-même, c’est peut-être finalement celle des grandes métropoles où les bobos se sont regroupés, faisant exploser les prix de l’immobilier et chassant les classes moyennes et populaires des centres-villes. La multiplication des entraves à la voiture au nom de l’écologie n’a d’ailleurs fait qu’accroître ce mécanisme de séparatisme.

Quant à la vie en périphérie, si elle est moins animée que dans les grandes villes, elle peut être agréable. On y est relativement épargné par les embouteillages, le bruit et la pollution des métropoles. En période de pandémie et de confinement, on y savoure le fait d’avoir de l’espace, un coin de jardin. Dans ce dernier, on peut faire pousser un ou deux arbres fruitiers, de jolies fleurs, cultiver un petit potager. Pas si mal pour une France « anti-écolo » !

En vérité, jusque dans les années 80-90, pour les classes moyennes et populaires, le pavillon de banlieue était le paradis ici-bas. Avoir une maison avec son jardin, un toit bien à soi, représentait alors un idéal de liberté et un signe de réussite sociale.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui … La mondialisation malheureuse est passée par là. La France des pavillons et des maisons individuelles est bien souvent une France qui souffre comme on peut le voir aujourd’hui avec la hausse du prix de l’énergie. La fermeture des usines, consécutive au transfert en Asie de millions d’emplois industriels, suivie par la disparition des commerces et des services publics, a précipité le déclin de nombreuses villes, qu’elles soient petites ou moyennes.

A cela s’est ajouté, pour les habitants des pavillons de banlieue proche, l’insécurité physique et culturelle liée à la proximité des grands ensembles.

Le pavillon avec jardin n’est donc plus tout à fait le rêve qu’il était autrefois et la France pavillonnaire traverse une crise profonde.  Emmanuelle Wargon et une partie des élites voudraient la voir disparaître. Mais cette France ne veut pas mourir. Elle demande à être entendue et respectée. Et si elle se sent oubliée ou méprisée, elle continuera de se révolter. Dans la rue ou dans les urnes…

© Alexandre Devecchio

https://www.franceinter.fr/emissions/en-toute-subjectivite/en-toute-subjectivite-du-mercredi-20-octobre-2021

Rédacteur en chef adjoint des pages Débats du Figaro, en charge du FigaroVox et des pages Esprits Libres du Figaro Magazine, Alexandre Devecchio, Essayiste, a publié Les Nouveaux enfants du siècle, enquête sur une génération fracturée (éd. du Cerf, 2016) et est coauteur de Bienvenue dans le pire des mondes (éd. Plon, 2016).

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2 Comments

  1. Si macron et sa bande de petits gosses de riche voulaient demontrer qu ils ne comprennent rien au peuple et qu ils le meprisent ouvertement , ils ne s y prendraient pas autrement 😜

    C est du grand art venant d ignares en politique qui se prennent pour des princes ,

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