La visite d’adieu que la chancelière Merkel a effectuée en Israël avant de se retirer d’une longue séquence de pouvoir est très significative. Elle témoigne d’abord de l’importance attachée à Israël par l’Allemagne. La chancelière ne fait de tournée d’adieu qu’auprès de grandes puissances…
Ce n’est pourtant pas la Puissance que Angela Merkel est venue visiter mais la Mémoire de la Shoah. On l’a toujours sentie très concernée par la charge de la culpabilité qui pèse sur l’Allemange, ce qui explique sa relation privilégiée à Israël.
Cependant, si le séjour s’est bien déroulé, les derniers moments ont été marqués par une note dissonante lorsque Merkel a dit son soutien à un Israël démocratique qui mettrait en œuvre le modèle de “Deux peuples-deux Etats”, dans ces termes mêmes: “Je suis en faveur d’un Etat démocratique juif mais cet Etat doit être assuré à long terme. Dès lors qu’Israël a droit à son Etat, les Palestiniens ont le droit de vivre (sic) et de fixer leur destin”.
En somme, l’avenir “démocratique” d’Israël dépend de l’existence d’un Etat palestinien.
Remarquons l’accent sur “démocratique” et l’étrange idée que la “vie” des Palestiniens serait ou est déjà en danger.
On sent derrière ces circonlocutions l’imputation d'”apartheid”… La boucle serait alors bouclée, car l’apartheid est un des synonymes politiquement corrects de “racisme”, de “shoah”.
Cet apparentement pose question. Faut-il y entendre une reconnaissance sous condition d’Israël? Quel rapport entre cette reconnaissance et l’apologie de la création d’un Etat palestinien?
Nous touchons là au point sensible de la politique européenne mais aussi de la politique américaine. Sur fond de la Mémoire de la Shoah, l’Occident se sent en effet coupable de l’existence d’Israël dont l’existence-même aurait provoqué le malheur palestinien: la Shoah sur fond de Nakba en quelque sorte.
En somme, la culpabilité découlant de la Shoah, qui pèse sur l’Europe coupable du géncide de 6 millions de Juifs, nourrit, certes, un intérêt spécial pour Israël, mais surtout un sentiment de dette envers les Palestiniens qui oblige l’UE, sans aucune considération d’opportunité ou de stratégie, comme l’impératif venu de son inconscient.
Ce sentiment provoque en retour un impératif lancé à Israël, sommé d’ajuster son comportement à son statut d’Etat sous caution humanitaire plutôt qu’investi de souveraineté. Les Européens voient (erronément[1]) en lui le campement humanitaire des Rescapés de la Shoah et c’est la condition de leur reconnaissance de l’Etat: pour raison humanitaire.
Seulement, il y a une condition à cette reconnaissance culpabilisée qui exige qu’Israël ne sorte jamais de son rôle de”victime de la Shoah”, qu’il n’exerce jamais sa souveraineté pleinement: c’est l’intention de l’argument de “proportionalité” invoqué au Conseil de Sécurité par la France et par l’opinion occidentale, pour brider le droit d’Israël à la légitime défense en vertu de l’innocence de principe des Palestiniens: “Comme vous n’êtes pas légitimes dans le principe, vous avez devant vous non des ennemis qui projettent de vous détruire mais des victimes dont vous êtes responsables et envers lesquelles vous êtes redevables. A la rigueur une opération de police devant des civils désarmés serait posible mais pas une réaction militaire contre un ennemi qui veut vous détruire”.
Et celà marche! Tout nous dit que deppuis plusieurs années Tsahal a perdu la volonté et le projet de vaincre l’ennemi. Gaza et le Hezbollah font peser un danger mortifère sur Israël.
Pour nous résumer, le syndrome de l’UE est fondé sur une culpabilité européenne reportée sur Israël sur la base de l’équation “Israël-compensation de la Shoah”.
Cette équation en engendre une autre: “Israël=Nakba”.
Puis, ces deux équations engendrent un double impératif: celui qui pèse sur l’Europe à destination d’Israël, et celui qui pèse sur Israël à destination des Palestiniens.
Les habits militaires d’Israël, sa dimension d’Etat souverain, doivent être portés en quelque sorte sous le pyjama rayé …
Quand cette logique ne se vérifie pas, l’équation s’inverse: Israël est alors assimilé aux Nazis et les Palestiniens aux Juifs des Camps tandis que l’Europe coupable devient un observateur désolé et très “moral” de ce drame. Les habits militaires d’Israël, sa dimension d’Etat souverain, doivent être portés en quelque sorte sous le pyjama rayé …
Cette vision des choses met Israël en position de faiblesse radicale. C’est là où l’on voit que la mémoire européenne de la Shoah n’est pas ce qu’est (devrait être) la mémoire juive et encore moins israélienne (il y a en effet là un autre problème car Israël n’est pas toujours à hauteur de soi, de sorte que la confusion règne).
L’UE comme les Etats Unis, avec leur formule magique “Deux peuples, deux Etats”, entraînent Israël dans une impasse pour son existence-même. C’est en fait une pétition de principe qui échappe à toute rationalité et à tout réalisme sur le plan stratégique et sur celui de l’intention déclarée et visible des premiers intéressés, la Palestiniens.
L'”Etat de Palestine” sera un Etat irrédentiste qui ne se contentera pas d’un bout de territoire et qui soulèvera les populations palestininnes en Israël, en Jordanie et plongera Israël dans une sitution de grande fragilité. La débandade honteuse des Américains en Afghanistan nous montre qu’à cette heure fatale Israël se retrouvera seul face à son destin…
[1] Justement c’est l’Etat où ont trouvé refuge, dans les années 1950, 600 000 réfugiés du monde arabe chassés par les Etats arabes qui venaient de se créer et non venus d’Europe en fonction d’une logique qui n’aurait rien à voir avec la région.
© Shmuel Trigano
Shmuel Trigano est Professeur émérite des Universités, Fondateur de l’Université Populaire du Judaïsme, Fondateur de la Revue européenne d’études juives, Pardès.
http://www.unipopu.org ; universitedujudaisme.akadem.org
http://www.inpress.fr/pardes-2/ ; http://www.cairn.info/revue-pardes.htm
Ce texte a été chroniqué par son auteur sur Radio J le jeudi 14 Octobre 2021.
Israel n est pas sorti de l alienation diasporique , les oripeaux de la dependance sont encore bien presents chez de nombreux israeliens , dor va dor , comme on dit chez nous , nous nous extraierons petit a petit de cette gangue mortifere de la dhimmitude physique ou intellectuelle pour aller vers ce peuple nouveau que nos maitres sionistes appelaient de leurs voeux
L’article de Shmuel Trigano est très fouillé, et sa profondeur est digne des titres universitaires et honorifiques qui lui sont attribués.
Aussi a-t-il résumé à merveille son point de vue au sujet des propos d’Angela Merquel concernant “deux peuples, deux Etats”, au tout dernier paragraphe de son article, tapé en caractères gras.
Article magistral qui mérite d’être lu et relu.
De l’aveu même de l’auteur, Merkel a dit : « Dès lors qu’Israël a droit à son Etat, les Palestiniens ont le droit de vivre (sic) et de fixer leur destin”.
En langage diplomatique chaque virgule compte et on notera que Merkel n’a PAS prononcé « Etat palestinien ».
C’est TRES lourd de conséquences et va à l’opposé des dires de l’auteur de l’article.
Merkel, en vérité, évite soigneusement d’entrer dans les détails de cette structure « palestinienne ».
A l’écouter, cela pourrait bien être une autonomie limitée et démilitarisée.
Police oui, armé NON.
Merkel n’est d’ailleurs pas motivée par un « droit palestinien », qu’elle ne mentionne même pas, mais par ce qu’elle considère comme un intérêt vital israélien : se séparer des « palestiniens » pour ne pas être submergés à terme par une démographie arabe et musulmane dite « palestinienne ».
Elle n’invente rien : on entend cela en Europe, aux USA et même, très clairement, en Israël.
Tout le reste de cet article sont des arrière-pensées que l’auteur prête à Merkel et à d’autres ; MAIS à écouter Merkel c’est dans la tête de l’auteur et pas dans celle de la chancelière.
Cela dit, s’il pense vraiment que « Les habits militaires d’Israël doivent être portés sous le pyjama rayé », il n’a qu’à y aller et donner l’exemple.
Qui sait, il lancera peut-être une nouvelle mode.
Pour votre information, Sh. Trigano est en Israël et y continue ses enseignements.
Laurence 91 Ne jouons pas aux naifs, svp.
Fixer leur destin: vous croyez vraiment qu’ils vont vous parler d’autonomie alors qu’ils ont déjà à l’ONU pris date comme s’ils étaient reconnus comme Etat?
Laurence 91 votre réponse est stupide, face à un texte qui est finement argumenté.
L’érreur essentielle a été de garder les 160 milles palestiniens en 1948 qui sont aujourd’hui 2 millions qui empêche n’y le fonctionnement normal de la Knesset,manifestent avec des drapeaux palestiniens,ont les quarante villes rouges pour le covid, tout en bénéficiant de la discrimination positive,du regroupement familial ,de 20% des places au techniôn et dans les écoles de médecines ainsi que les bourses qui vont avec.
Deux peuples, deux états ????? Les palestiniens ne sont pas un peuple. Zuheir Mohsen le dit d’ailleurs très bien dans so interview qu’il a accordé au journal Trouw en 1977 ( https://en.wikiquote.org/wiki/Zuheir_Mohsen) Pourquoi donc s’obstine t’on à vouloir à tout prix vouloir les faire exister
On oublie trop que le concept de Palestine et de Palestiniens est une invention romaine qui rebaptisa de Palestina le territoire de la résistance juive pour imposer le polythéisme de l’Empire Romain et son désir de détruire Israël et la Judée
Palestina et la contraction de deux divinités païennes Palas / Athénée. Donc l’Occident Romain puis Chrétien
se reconnaissent dans les Palestiniens comme négation de la résistance monothéiste juive par la destruction
de Jérusalem et son Temple en 70 de notre ère et la Guerre des Juifs de 125 qui s’est soldée par la tuerie massive
et déportation des Judéens et l’interdiction d’habiter Jérusalem Donc réclamer une Palestine c’est confirmer
l’impérialisme Romain et nier tout possible recouvrement de la légitimité juive sur sa terre.
Et nous comprenons mieux alors la lâcheté occidentale devant les islamistes. Mieux un Islamiste antisémite
qu’un état Juif. Donc pour nier les Juifs l’Occident opère un silence suicidaire et laissant agir l’islamisme
Car c’est au nom de l’Islam que le monde arabe inventé les Palestiniens. Malheur aux amnésiques.