C’est en poussant la porte de ce magasin d’instruments de Musique à la recherche d’un piano que je fis la connaissance de Ben Hoze.
Mesurant plus d’un mètre quatre-vingt, ce grand gaillard aux magnifiques dreads logs attira immédiatement mon attention. Il vint vers moi afin de me conseiller. Puis il se mit à pianoter quelques accords de Jazz sur un splendide piano à queue.
Je lui fis part de ma passion pour les deux déesses du Jazz, Ella Fitzgerald et Nina Simone, et il enchaina sur quelques classiques.
Puis après m’avoir convaincue d’acheter ce Yamaha blanc, nous échangeâmes sur la Musique, nos influences, nos amis communs, nos parcours de musiciens.
J’évoquais mon ancien compagnon de scène, le guitariste Mathieu Chédid qu’il ne connaissait pas et lui me parla d’Avishaï Cohen ou d’Idan Rachel que j’avais déjà vus sur scène.
Ce musicien à la dégaine de Jimmy Hendrix se mit à me parler de ses racines qu’il disait contraires, yéménites et polonaises, évoquant la déportation de sa famille dans les camps. Puis il me raconta sa propre histoire dans ce drôle de pays fait de métissage et de paradoxes.
Il me parla de ce vieux professeur russe de Piano qui lui enseigna Chopin et Mozart, et de sa rencontre avec son instrument de prédilection, la guitare. Ce virtuose multi instrumentiste passa du piano à la guitare acoustique puis électrique, du Rock pur et dur au Funk, puis au Disco au RnB jusqu’à ce qu’il entende un vieux vinyle de Bill Evans.
Il abandonna alors ses anciennes amours pour se lancer corps et âme dans le Jazz. Mais ce perfectionniste, qui voulait devenir le meilleur, passa avec succès l’audition de la célèbre Rimon School of Music de Ramat Hasharon.
Malgré son talent, Ben Hoze ne parvenait pas à vivre de sa passion et dut se résoudre à chercher un emploi. Chaque Musicien ne sait que trop bien que la Musique peut être un don mais aussi un sacerdoce surtout lorsque l’on vient d’un milieu populaire. Alors, tout en étudiant, Ben Hoze se mit à vendre des instruments dans ce Magasin de Musique. Une façon de rester dans son univers tout en gagnant sa vie.
Cela lui permit de prendre un petit studio sur Tel Aviv et d’avoir accès plus facilement à tous les clubs de Jazz. Il participa à des Jams dans tous les lieux underground de la ville. Et c’est à cette occasion que la chanteuse de soul israélienne d’origine éthiopienne Esther Rada le repéra immédiatement, lui demandant de l’accompagner sur scène lors de ses concerts en Israël mais aussi lors de sa tournée en France.
C’est à partir de ce moment-là que Ben Hoze devint un guitariste professionnel, jouant sur les scènes des meilleurs festivals.
Mais cela ne lui suffisait toujours pas. Il se mit à composer tout en montant son propre studio d’enregistrement.
Aujourd’hui, ce touche à tout mixe et crée des sample aux influences jazz et électro qu’il vend un peu partout dans le monde. Il s’intéresse à la World Music mêlant les percussions d’Afrique et les sons venus d’Inde.
Mais Ben Hoze perdit son appartement de Tel Aviv lors du premier confinement, se retrouvant comme beaucoup dans l’obligation de retourner vivre à l’âge de 36 ans chez ses parents.
Aujourd’hui, il enchaine trois emplois, du Magasin de Musique au Studio d’enregistrement en passant par ces Cours de guitare qu’il dispense le soir. Il est comme la plupart des israéliens qui cumulent trois boulots pour pouvoir payer des loyers bien trop chers.
Mais il espère revenir bientôt à Tel Aviv, lui qui décrit la Ville Blanche comme le cœur de la scène musicale Jazz et du melting pot culturel dont il est le parfait symbole.
C’est sans nul doute ce que je préfère chez tous ces enfants d’Israël, cette diversité d’âmes, de couleurs et d’origines dont le Trait d’Union reste Notre Terre Promise.
© Olivia Cattan
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