Sarah Cattan. En direct de la Cour d’Assises: « C’est quand qu’on aura la parole ? »

A suivre le Procès des Attentats du 13 novembre, on ne peut ne pas penser à la mauvaise farce qui put se jouer à Bruxelles lors du Procès de Nemmouche, auteur de la tuerie du Musée juif. Cette fois, l’accusé n’eut point besoin de s’exprimer : ses avocats s’en chargèrent, offrant au monde un numéro inédit où l’incrédibilité le disputait à l’incompréhension : Tout était-il donc permis de dire au nom de la Liberté d’expression, fût-ce au sein d’un prétoire, fût-ce en face des victimes d’un des attentats terroriste islamiste les plus barbares qui fût.

La réponse fut Oui, les avocats de la défense illustrant à jamais la honte des prétoires, osant agiter avec gouaille et arrogance le spectre du complot perpétré par les services secrets israéliens et faire de la tuerie  une affaire de cornecul[1]: Tout ça c’était De la blague Du flan Des sketchs Des trucs de malade, qu’il disait, l’avocat de la défense, confronté aux rapports d’expertise et aux témoignages qu’il qualifia de truqués. De Bidon. Jusqu’aux images de vidéosurveillance, truquées qu’elles auraient été par les enquêteurs eux-mêmes.

On se demandait à les entendre si quelqu’un allait … les faire taire. Epargner à l’intelligence et à la décence cette farce pathétique infligée au Palais durant sept interminables heures, faisant dire à Michèle Hirsch, avocate qui représentait le Comité de coordination des organisations juives de Belgique, qu’elle ne pensait pas vivre cela un jour et à Nicolas Hénin sa consternation devant l’énorme caisse de résonance médiatique offerte au terrorisme et à ses plaideurs, tout un chacun n’étant pas un Badinter, un Vuillemin ou un Jacques Vergès capable de tenter d’expliquer dans Les Sanguinaires que les poseurs de bombes étaient des poseurs de questions.


Comme l’accusé principal des Attentats du 13 novembre, Nemmouche avait exercé son droit au silence.

Alors que d’aucuns redoutaient que Salah Abdeslam décidât de se retrancher derrière ledit droit au silence, chacun aujourd’hui, devant ses saillies lorsqu’il est interrogé et surtout lorsqu’il vient interrompre Qui il lui plaît, se prend à regretter que l’individu eût retrouvé ladite parole et, surtout, pût s’exprimer avec une telle insolence, oubliant qu’il est l’accusé devant une Cour d’Assises et interrompant les enquêteurs, sous prétexte que Tout ça, on le sait et qu’on va pas le rabâcher.

Que le Président Périès fît montre à l’encontre du terroriste d’une poigne certaine est incontestable. Qu’il fût contraint à lui couper le sifflet – ici le micro- montre combien nous sommes démunis dans la situation évoquée.

Nous ignorons comment il convient de répondre à cet attentat à la décence et à la justice perpétré par les prises de parole intempestives de l’accusé, et quand bien même nous redisons Que le procès, c’est pour expliquer les choses, sinon on n’a qu’à dresser la guillotine, Que le procès, c’est pour prouver que nous vivons dans un État de droit, une République, une Démocratie, nous interrogeons ces Hommes de Loi. Qui prêtèrent Serment. Jurant d’exercer leurs fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité. S’engageant à respecter, entre autres devoirs, les notions d’honneur et délicatesse: A-t-on le droit d’enfreindre ad nauseam les codes.


[1] Cornecul. On trouve l’expression chez Rabelais : et rompit quatre dentz à Lucifer et une corne au cul. Pantagruel. Chapitre XXXIV. Œuvres complètes. La Pléiade.

Corne-cul : Quelque part entre abracadabrantesque et grotesque se trouve corne-cul. In Les mots délicieusement surannés.

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4 Comments

  1. Certes un procès est nécessaire.
    Mais doit-il prendre cette forme.
    Un procès de 9 mois, voire plus, qui perturbe la vie quotidienne de nombre de parisiens.
    Un procès où les prévenus reçoivent une aide juridique permettant à certains d’être défendu par 2 avocats.
    La constitution originelle de la cinquième république en 1958, prévoyait pour des actes dont il est question à ce procès, des tribunaux d’exception quelque peu plus expéditifs, plus efficace, et plus économiques pour la société.
    Pour autant, la France de 1958 n’etait pas une dicta5ure.

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