Albert Naccache. Adon aSélihot

Cette année encore, nous aurons payé un lourd tribut au Covid avec les épreuves endurées par toutes les couches de la population : écoliers, étudiants, actifs, commerçants, malades et personnes âgées.                                          ,                                                                         

S’y ajoutent les trois problèmes endémiques subis par la communauté juive française : terrorisme djihadiste, antisémitisme et antisionisme.

Depuis la 2ème Intifada de 2000, les citoyens français de confession juive paient un lourd tribut au terrorisme djihadiste.

Avec Ilan Halimi, enlevé et assassiné le 13 février 2006 par le gang des barbares, la tuerie de l’école Ozar Hatorah à Toulouse, en 2012, puis celle de l’Hyper Cacher, en 2015. Le 4 avril 2017, Sarah Halimi est assassinée à Paris ainsi que Mireille Knoll le 23 mars 2018.

Malgré 20 années de combats, l’antisémitisme et l’antisionisme sont toujours aussi vivaces.

Sous prétexte d’antisionisme les slogans « Mort aux juifs » sont entendus dans les cortèges pro-palestiniens. Cet antisémitisme « nouveau », – toujours démenti par ses auteurs – n’est pas confiné aux « banlieues » ou à l’extrême-gauche ; il gagne les classes moyennes.

La pandémie a dévoilé la persistance de l’antisémitisme d’extrême-droite qui affirme que « les Juifs contrôlent les médias, la finance, le monde ».

« Mais qui ? » est devenu le slogan antisémite qui fleurit sur les pancartes des manifestants anti-passe sanitaire.

A Perros-Guirec, pendant le mois d’aout 2021, une stèle érigée en l’honneur de Simone Veil a été recouverte de croix gammées, quatre fois en deux semaines.

Le maire de Metz, François Grosdidier dénonce « une convergence des extrêmes dans un magma populiste et antisémite » à qui le développement d’Internet donne une caisse de résonance commune.

Le président du CRIF, Francis Kalifat, prévient que « Si rien ne change, il n’y aura plus de juifs en France dans une génération ».                                                                     

Déjà un judaïsme marrane progresse avec la moindre fréquentation des synagogues du fait de la pandémie et avec la raréfaction des symboles juifs, kippas et étoiles de David dans les lieux publics.

Heureusement, la rentrée est aussi le temps des Selihot, de Rosh Hachana, Kippour et Soukot

Heureusement, la rentrée est aussi le temps des Selihot, de Rosh Hachana, Kippour et Soukot. 

Les Sélihot sont des prières prononcées la nuit ou tôt le matin avant le lever du jour pour obtenir le pardon divin. Au fil du temps des poèmes, « piyutim« , mis en musique ont été rajoutés aux Sélihot. Ces chants millénaires rythmés et versifiés, poétiques et graves, tristes ou nostalgiques sont le « reflet d’une confiance inébranlable dans la bonté de Dieu et dans l’avenir d’Israël » selon le Rabbin Claude Brahami qui est l’auteur des excellents rituels de prières traduits et commentés « Herev pipiot » l’arme de la parole.

L’appel du fidèle

« Toi qui dormais réveille toi

C’est déjà l’heure où nait l’aurore des étoiles

Eveille toi : évoque toi vers ton Dieu

Pour emplir ton regard d’un peu de ciel.

La gloire de la délivrance

S’annonce au chœur des multitudes« 

Yachan al teradem de Judah Halevi (1075-1141)

Traduction de Léon Askénazi Juillet 1947 Lumière N°10

Chaque homme s’adresse individuellement à Dieu :

« Je me lève pour bénir le nom de Dieu« 

Chem El qamti lebarech de Salomon Ibn Gabirol (1020-1057)

« Seigneur comme un brouillard dissipe mon orgueil

Pardonne mes péchés malgré leur gravité« 

Ana kaav zidouni de Moché Ibn Ezra (1055-1138)

« Je confesse mes fautes petites et grandes« 

« Vers toi mon Dieu, je lève les yeux » Itvadé

« Elle fond de chagrin, mon âme délicate » Elékha Adon nassiti énaï

« Ô mon âme, bénis l’éternel » Psaume 104

Le passage au collectif se fait avec le Vaya’avor, déclamation répétée quatre fois des treize attributs de Dieu et le « Anénou »  « Réponds nous, Exauce-nous« , supplication intense reprise en chœur avec ferveur, larmes, émotion et joie sacrée.

Le moment le plus intense est atteint avec « Adon aSélihot« , Ô maître du pardon, qui est devenu un chant culte pour tous en Israël, souvent accompagné à la guitare.

Il est suivi du Avinou malkenou

« O notre Père, notre Roi, aie pitié de nous » magnifiquement chanté par Barbara Streisand.

Et pour conclure :

« Nous demandons la vie, car la source de vie c’est toi ;

Sois charitable envers nous pour l’amour de ton nom

Eloigne de nous la guerre, la famine, la maladie et tout adversaire de ton peuple« . 

Aujourd’hui l’heure est au retour progressif dans les lieux communautaires.
Nous devons poursuivre le combat contre l’antisémitisme et pour la défense d’Israël, renforcer financièrement les communautés juives, payer sa place de Yom Kippour même en cas de non présence, ne pas oublier les organismes d’aide sociale aussi bien en France qu’en Israël dont les besoins sont considérables et aider la presse juive qui participe à ce combat.

Selon le Rav Kook et Léon Askénazi c’est l’Etat d’Israël qui permettra la Rédemption du peuple juif. 

Pour « L’étoile de la Rédemption » de Franz Rosenzweig (1886-1929), Création, Révélation et Rédemption sont les trois points d’un triangle qui s’enchevêtre avec un autre triangle pour former l’Etoile de David. Les trois points du deuxième triangle représentant Dieu, l’Homme et le Monde.

© Albert Naccache

Docteur en économie, diplômé de l’IAE, ancien élève de Sciences-Po, chargé de cours au Panthéon, Albert Naccache est écrivain et journaliste. Il publie notamment à Temps et ContreTemps;

Derniers ouvrages:

Suis-je le gardien de mon frère? ou la tragédie des chrétiens d’Orient. 2019

Contre Israël. Albert Naccache. Les Unpertinents 22 Août 2020

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