La Chronique de Nickie Caro Golse. Michel Rotfus “Yankel, celui qui parlait peu”

MICHEL ROTFUS “YANKEL, CELUI QUI PARLAIT PEU”, (Editions L’Elan des mots, 333 pages)

Michel Rotfus, professeur de philosophie, après plusieurs brillants essais, publie son premier roman bouleversant: “YANKEL, CELUI QUI PARLAIT PEU”

 L’auteur découvre un jour le “Yisker Bukh, le Livre du souvenir” du shtetl polonais de Garwolin, écrit par ses survivants désireux de laisser à la postérité la mémoire de ce monde diparu, de ses aventures et souffrances. Or son père illettré vient de Garwolin. Il y est né en 1907 mais n’en a que très rarement évoqué quelques bribes à ses enfants. Ainsi naît chez Michel Rotfus le désir de ressusciter la parole rare et hésitante de ce père mort, aimé dans le silence et sans doute l’incompréhension. Et, avec lui, la vie misérable de son enfance à jamais abolie. Projet romanesque s’il en fut et profondément émouvant. Nous voici, lecteurs, assoiffés de suivre les traces du petit Yankel, dont l’impossibilité maladive de s’approprier l’alphabet le fait exclure du Heder pour la plus grande honte de son père. Ce sont par d’autres biais que l’écriture, que l’étude, ou la vie sociale, que le petit garçon rêveur et tendre va traverser les cruels événements du Yiddishland en proie à tous les séismes de cette première moitié du XXème siècle. A l’extérieur du shtetl ce sont d’incessants bouleversements: la Pologne devient tour à tour russe, allemande, indépendante, en guerre contre l’Armée Rouge. A l’intérieur, la société majoritairement hassidique se fissure de jour en jour sous les coups de boutoir d’une jeunesse qui s’ouvre peu à peu davantage aux idées nouvelles, par le biais du Joint et des traductions de la littérature européenne en yiddish. Le lecteur rencontre, en un foisonnant tourbillon les bundistes, les socialistes, les sionistes religieux, les sionistes laics ou communistes…si différents mais tous en proie aux assauts des nationalistes polonais antisémites… Dans ce maelström d’idées nouvelles, l’intelligence, la sensibilité, le courage, l’espoir et…la tragédie se tiennent la main pour donner à ce monde englouti les couleurs de la vie, aussi terrifiante soit-elle!

 Michel Rotfus nous a, en ce roman, donné et la merveilleuse occasion d’apprendre mille détails de cette vie engloutie, et laissé au coeur une plaie indélébile creusée au scalpel d’une indicible émotion.

  Par ce texte, l’auteur s’inscrit dans la lignée d’un Potok, ou d’un Singer.

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