Alexandre Mostrel. Fils d’immigrés turcs enracinés dans la tradition juive séfarade, son destin marqué par l’errance fait de lui le témoin privilégié des grands évènements du XXème siècle.
Né à Marseille, il émigre très jeune à Tunis où il connaît la vie dans le ghetto, la ségrégation mais aussi une douceur de vivre interrompue par l’occupation allemande.
Engagé dans l’Armée française après la libération de Tunis, il se bat en Allemagne et en Autriche, et découvre les camps de concentration.
La création de l’Etat d’Israël, les espoirs et les déceptions qu’elle soulève, ainsi que les émeutes révolutionnaires de Tunisie marquent son retour à la vie civile.
Rapatrié en France après l’indépendance, son intégration à EDF en tant qu’informaticien, au tout début de l’ère informatique, va permettre son ascension sociale.
Il avait en 2006 publié Une Saga séfarade, qu’il qualifie de Livre-témoignage. Il y raconte l’histoire de ses origines et des grands moments de sa vie, jalonnée d’épreuves hors du commun. A la sortie de son livre suivant, Les Juifs, vers un avenir incertain, Alexandre Mostrel précisait: Le récit de mon parcours singulier s’étalait sur la période de ses quatre-vingts premières années, de 1925 à 2006. Mon histoire marquait la fin d’une époque pour le moins dense et mouvementée. Dix années se sont écoulées depuis la publication de ce livre, explique-t-il. Je relate aujourd’hui dans Les Juifs, vers un avenir incertain, qui peut tenir lieu de postface au livre précédent, mon expérience et les événements réels dont j’ai été le témoin dans la décennie 2006-2016.
Voilà ce qu’en disait Jean-Pierre Allali à parution: C’est l’histoire d’une vie. Pour ses enfants, pour ses petits-enfants, pour témoigner, Alexandre Mostrel a décidé de coucher par écrit son long et beau parcours. « Aujourd’hui, j’arrive au soir ma vie, au bout du chemin. J’ai fait mon temps et atteint un âge canonique. Je suis vieux et usé ; la vie se retire de moi, petit à petit, irrémédiablement. J’ai heureusement gardé toute ma lucidité »
Les racines de la famille du narrateur plongent dans la Turquie, du temps de l’Empire Ottoman. Son père, Moïse, fils de Béhor Chabtaï Mistriel et de Déborah Benaderet était né en 1905 à Bergama. Sa mère, Mathilda Mazalto, fille de Moïse Ouziel et de Hannah Abrami était née, elle, en 1900, à Izmir.
C’est lorsque le président turc, Mustafa Kémal Atatürk décide d’incorporer les jeunes gens juifs à l’armée pour trois ans que les Mistriel émigrent en France, à Marseille. C’est là que naît Alexandre, le 18 juillet 1925. La famille ne restera pas longtemps en France et choisira de vivre…en Tunisie ! En 1929, les Mistriel qui, plus tard, seront Mostrel, retrouvent une tante , Sarina,dans le quartier arabe de Bab-Souika. Moïse se fait alors photographe ambulant. Alexandre, dès l’âge de 4 ans, sera inscrit au keteb, l’école juive religieuse. Il sera longtemps le barani, l’étranger, parmi ses condisciples judéo-arabes. Plus tard, ce sera l’AIU, rue Malta Srira.
Des pages étonnantes nous décrivent l’ambiance « tune » par le menu. Des glibettes à la nefa et des noyaux d’abricot à la hofra en passant par tous les cinémas de Tunis : Palmarium, Colisée et tutti quanti. Sans oublier la cuisine locale, du couscous bkaïla au msoki de Pessah.
Adolescent, Alexandre dévore les livres, mais aussi les BD : Mandrake, Tarzan et le Fantôme du Bengale.
Les fêtes juives y compris les coutumes locales sont narrées par le menu. « Ce qu’il y avait de remarquable à Tunis, c’est que les samedis et les jours des principales fêtes juives, presque tous les magasins étaient fermés, aussi bien dans le quartier juif que dans le reste de la ville ».
En 1939, des bruits de botte se font entendre. Le père est mobilisé. Le voilà zouave. Plus tard, pendant six mois, en 1942-1943, la Tunisie se retrouvera sous la botte allemande. Alexandre a 17 ans et il est pris dans une rafle mais parvient à s’échapper. Un an plus tard, il est mobilisé et se retrouve dans la montagne, à Aïn Draham, chantant « C’est nous les Africains ». Il est au Tyrol quand parvient, enfin, la nouvelle de l’armistice. Au sortir de la Guerre, Alexandre est engagé à la Direction des Travaux Publics. Il fréquentera une cellule communiste et entonnera régulièrement L’Internationale. Puis, il change d’orientation et opte pour le mouvement sioniste bien implanté à Tunis. Il adhère à la Gordonia. Dès lors, l’alyah en Israël est en ligne de mire. Alexandre fera un premier séjour en Israël où ses parents se sont déjà installés, en 1952. De retour à Tunis notre héros convole en justes noces. Le 28 septembre 1954, il épouse Dina Henriette Messica, une Juive livournaise native de Sfax. En 1960, les Mostrel décident de regagner la France. Des enfants vont naître : Marco, Daniel, puis Odile Sarah.
“J’ai eu la baraka, la bonne destinée » estime Alexandre Mostrel.
Alexandre Mostrel écrit donc ensuite Les Juifs en France – Vers un avenir incertain, publié en 2018 et toujours chez Z4 EDITIONS , pour répondre aux questions de ses petits enfants, curieux de ce passé qui est leur héritage.
Son éditeur affirme que par ce récit vivant, l’auteur participe au devoir de mémoire cher aux survivants de la Shoah, et assure la transmission d’un passé qui est aussi un héritage universel.
Sarah Mostrel, elle, parle d’un parcours un peu atypique pour un homme né à Marseille de parents turcs et qui est parti à 5 ans en Tunisie, avant d’arriver dans les années 60 en France, après avoir fait la guerre. Sa mère est née à Sfax : Mes parents ont vécu tous deux à Tunis.
Sarah Mostrel. Après avoir publié différents ouvrages sous le pseudonyme Sara Naor, elle reprend son patronyme en 2009, lors de la sortie de son essai Osez dire je t’aime. Musicienne, poétesse et romancière, Sarah, diplômée du Technion, l’école polytechnique du pays, a publié en 2016 Chemin de soi(e), un recueil de 75 poèmes illustré de ses propres photos et mis en musique (son 4e album). Son dernier livre, “D’ombre et de lumière“, est sorti en juin 2021.
Sur le site de Sarah Mostrel vous en saurez davantage
https://sarahmostrel.wordpress.com
Z4 EDITIONS est une maison d’édition indépendante aux valeurs humanistes. Ses champs d’activité sont principalement (mais pas exclusivement) l’histoire et la mémoire.
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