En 2015, une cérémonie commémorant le pogrom sanglant contre les Juifs d’Irak s’était tenue pour la première fois lundi dans la région autonome du Kurdistan irakien (nord), en présence de Kurdes d’origine juive et d’officiels.
A cette occasion, le gouvernement du Kurdistan avait officialisé l’arrivée d’un représentant de la communauté juive au sein du ministère des Affaires religieuses dans une région majoritairement musulmane.
Ledit représentant juif, Sherzad Omar Mamsani, avait déclaré que la loi sur la protection des minorités, votée en mai, stipulait que même s’il n’y avait qu’un fidèle de quelque religion que ce soit, ses droits seraient protégés.
L’année dernière, 79 ans après, la Knesset marqua pour la première fois le pogrom de Farhoud, le 1er juin étant déclaré officiellement Journée internationale du Farhoud.
Pour rappel, mené contre les Juifs de Bagdad, il avait été organisé par le gouvernement irakien soutenu par les nazis.
Cet événement fut considéré comme le tournant qui mit fin, de façon brutale, à des siècles de liens étroits entre Juifs et Arabes en Irak.
« Dans l’histoire des Juifs d’Irak, le Farhoud est unique« , insiste Georges Bensoussan, spécialiste de l’antisémitisme en pays arabes, cité par le CCLJ. « Non qu’il n’y ait eu auparavant émeutes et incidents plus ou moins graves, mais jamais de cette ampleur. Apparemment spontané, ce pogrom fut organisé, et probablement conçu de longue date par les nationalistes arabes admirateurs d’Hitler au pouvoir entre le 1er avril et le 1er juin 1941« .
De nombreux historiens ont d’ailleurs établi la responsabilité des autorités irakiennes, la participation d’une grande partie de la population de Bagdad et la passivité des soldats britanniques encerclant la capitale irakienne.
Le pogrom commença le 1er juin 1941, alors que les Juifs de Bagdad célébraient la fête de Shavouot au cours de laquelle ils avaient coutume de porter des vêtements blancs et de se rendre en pèlerinage sur les tombes des Sages. Les premières violences éclatèrent lorsque des soldats irakiens s’attaquèrent à des Juifs près d’un pont de la ville. Ensuite, dans le quartier chiite, une foule déchaînée arrêta des voitures et des bus pour s’en prendre aux Juifs. Une vingtaine d’entre eux furent tués. Les troubles se poursuivirent dans le vieux quartier juif. Les manifestants firent irruption dans des maisons juives pour massacrer et piller. Les violences durèrent jusqu’à la fin de la nuit.
Le lendemain matin, le 2 juin, les émeutiers furent rejoints par une foule d’individus, dont un nombre considérable de Bédouins. Le pogrom s’étendit à l’extérieur du vieux quartier juif, dans les quartiers d’affaires et résidentiels de Bagdad.
Après le pillage et le saccage de nombreux commerces juifs, les émeutes prirent fin dans le courant de l’après-midi du 2 juin, lorsque l’armée irakienne se décida à neutraliser les émeutiers.
Le bilan de ces deux jours de violences antijuives fut lourd : environ 180 Juifs furent assassinés, 600 furent blessés et quelque 1.500 maisons, synagogues, fabriques et commerces pillés et saccagés. Les violences furent particulièrement sauvages : viols, mutilations, femmes enceintes éventrées et crânes d’enfants fracassés au sol.
Dès l’été 1941, des milliers de Juifs tentèrent de quitter l’Irak, même si l’écrasante majorité des 120.000 Juifs d’Irak (dont 80.000 à Bagdad) choisit d’y rester en adoptant « l’humilité traditionnelle » à laquelle les sociétés arabo-musulmanes les assignèrent. « La question n’était plus de savoir s’il fallait partir, mais quand », conclut Georges Bensoussan.
L’exode de masse se produira en 1951 et un an plus tard, il ne restera plus que quelques milliers de Juifs dans tout le pays.
Aujourd’hui, seule une poignée de Juifs vit en Irak.
https://www.cclj.be/actu/judaisme-culture/farhoud-bagdad-1er-juin-1941
Le livre de Georges Bensoussan est indispensable