Je n’ai pas encore écrit sur Facebook. Je peinais à étaler sur la place publique des opinions qui ne regardent que moi, ou des sentiments qui me sont personnels.
Enfant cosmopolite du monde occidental, j’ai toujours eu une double allégeance, entre mes deux cultures, occidentale et juive.
Quand mon cœur battait au rythme de Jérusalem, mon cerveau pensait avec celui d’Athènes. De la première j’ai gardé le goût de la Justice, de la seconde celui de la Raison.
Ce que nous vivons actuellement entre en conflit avec l’un comme l’autre.
C’est pourquoi j’ai décidé de prendre la plume.
Depuis près d’une semaine, 2.600 roquettes sont tombées sur Israël, sans que personne n’arrive à identifier une origine précise à cette situation.
Provocation des extrémistes nationalistes en Israël ?
Peut-être un peu, mais dans la balance des causes pèse beaucoup plus lourd l’esprit mortifère et belliqueux du Hamas, empreint de ressentiment et d’esprit de revanche.
Humiliation ? Provocation ?
Pourquoi les moyens considérables dont le Hamas s’est doté n’ont-ils pas été utilisés pour reconstruire la vie de Gaza plutôt que pour tenter de détruire celle d’Israël ?
Pourquoi ce seul conflit mobilise-t-il, par une indignation borgne et sélective, les opinions publiques ?
Les vies des Ouighours ou des Tibétains en Chine, des victimes de Boko Haram en Afrique, des Kurdes en Asie Centrale, ont-elles une valeur différente ?
Pourquoi une gifle donnée par un soldat de Tsahal indigne-t-elle plus que des vies supprimées en Syrie ou en Irak, en Afghanistan ou au Pakistan ?
Pourquoi un crime odieux comme la torture et la défenestration de Sarah Halimi n’est-il pas pénalisé en France, au prétexte que le criminel était sous l’effet d’un joint ? Y aurait-il jurisprudence ? Un automobiliste sous l’effet de l’alcool ne serait-il pas jugé en cas d’accident ? Les juges auraient-ils réagi de la même façon si un Juif avait défenestré une Arabe ?
Depuis près d’une semaine, plus de 2,000 roquettes sont tombées aveuglement depuis Gaza dans un rayon de 80 km. C’est la première fois que la vallée du Sharon, le Gush Dan et Tel Aviv sont visés.
Les habitants de Sderot ont 15 secondes pour atteindre les abris quand résonnent les sirènes, ceux de Tel Aviv 1 minute 15.
Quel gouvernement souverain ne réagirait-il pas ? Plutôt que de lever des impôts, le premier devoir régalien d’un gouvernement n’est-il pas de défendre sa population ?
Qu’aurait fait le gouvernement belge si des roquettes pleuvaient depuis Molenbeek sur Waterloo ?
Et qu’aurait fait le gouvernement français si elles tombaient depuis les banlieues sur Neuilly ?
Comment ne pas voir que le Hamas cible les civils israéliens alors que Tsahal cible, de manière chirurgicale, les objectifs militaires ?
Comment ne pas reconnaître que jamais dans l’Histoire un peuple ne s’est vu arroser d’une pluie de missiles sans réagir pour se défendre ?
Et que tant de moyens soient mis en œuvre pour opérer de manière chirurgicale, en préservant autant que possible les vies humaines ?
Il y a toujours eu deux poids deux mesures s’agissant des Juifs.
Pourtant, pour paraphraser le Shylock du Marchand de Venise de Shakespeare, ne sommes-nous pas comme les autres ?
Ne souffrons-nous pas quand on nous blesse ?
Poser toutes ces questions, parmi tant d’autres, c’est aussi y répondre.
© Dr Albert Unglik, gynécologue
Extrait de la tirade de Shylock dans Le Marchand de Venise de Shakespeare (Acte III,
Scène 1). Traduction de François-Victor Hugo
“Il m’a couvert d’opprobre, il m’a fait tort d’un demi-million, il a ri de mes pertes, il s’est moqué de mes gains, il a conspué ma nation, traversé mes marchés, refroidi mes amis, échauffé mes ennemis ; et quelle est sa raison ? … Je suis un juif ! Un juif n’a-t-il pas des yeux ?Un juif n’a-t-il pas des
yeux, des organes, des proportions, des sens, des affections, des passions ?N’est-il pas nourri de la même nourriture, blessé des mêmes armes, sujet aux mêmes maladies, guéri par les mêmes moyens, échauffé et refroidi par le même été et par le même hiver qu’un chrétien ?Si vous nous piquez, estce-que nous ne saignons pas ? Si vous nous chatouillez, est-ce-que nous ne rions pas ? Si vous nous empoisonnez, est-ce-que nous ne mourons pas ?Et si vous nous outragez, est-ce-que nous ne nous vengerons pas ? Si nous sommes comme vous du reste, nous vous ressemblerons aussi en cela.”
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