Le nom de Kobili Traoré est l’exact opposé de celui de sa victime Sarah Halimi. Cette opposition fait entrer ce petit malfrat fanatisé au nom d’Allah au pinacle des principaux acteurs du Troisième Reich, qui eux aussi déniaient leur responsabilité, la rejetant principalement sur le dos d’Hitler, face aux juges du Tribunal militaire international de Nuremberg. Ces juges ne furent en rien incités à l’indulgence par l’état de santé déplorable des notables nazis. Personne ne s’insurgea en apprenant les 12 condamnations à mort (y compris celle de Göring pourtant bien connu pour son addiction à la drogue), les 7 condamnations à la prison jusqu’à la perpétuité pour certains, et les 3 acquittements de ceux qui n’avaient pas de sang sur les mains. Les larmes furent peu nombreuses à couler en apprenant le suicide de Göring devançant de peu son exécution.
Et comment aurait réagi Traoré si on lui avait montré les restes macabres de sa victime ? Ce que les nazis n’avaient pas supporté à la vue d’un documentaire reprenant les images tournées lors de la libération des camps de concentration et d’extermination par les troupes alliées.
« Crispés, égarés, incrédules ou rompus, dix visages, et derrière ceux-là, dix autres encore, fantastiques rangées émergeant des ténèbres, se tendaient comme magnétisés vers le mur du fond. […] Alors Göring, vice-roi du IIIᵉ Reich, serra ses mâchoires livides à les rompre. Le commandant en chef Keitel […] se couvrit les yeux d’une main tremblante. Un rictus de peur abjecte déforma les traits de Streicher […] Ribbentrop humecta de sa langue ses lèvres desséchées. Une sombre rougeur couvrit les joues de Papen […] Frank, qui avait décimé la Pologne, s’effondra en sanglots.i »
À l’aune d’une justice qui veut que le criminel soit une victime de la société, donc peu ou prou irresponsable et que l’on ne pourrait condamner que par défaut, les nazis n’auraient eu à souffrir que d’une hospitalisation psychiatrique sédative de leur évidente psychose, avant de suivre une cure de déradicalisation et de recouvrer toute liberté. Qui, aujourd’hui, déplorerait qu’ils ne bénéficiassent pas de l’immense progrès en matière judiciaire qui aboutit à considérer « irresponsable » de son crime Kobili Traoré au vu que ce dernier aurait agi sur un coup de folie provoqué par un excès de cannabis ?
Mais quel coup de folie ?
La juge chargée de l’instruction du meurtre de Sarah Halimi ignorait-elle la pratique de ceux qui sévissaient déjà au XIᵉ siècle sous le commandement du Nizârite Hassan-i Sabbah, dit le Vieux de la montagne, pour terrifier chrétiens et musulmans déviants. Ces tueurs prenaient du haschich (d’où leur nom de haschichin, assassins)pour s’insensibiliser à la douleur et perpétrer leurs crimes dans un état mystique. Voilà qui rappelle le « délire » de Traoré torturant à mort le « sheitan » en la personne de l’ex-directrice de crèche Sarah Halimi.
Gilles-William Golnadel, avocat de la sœur de Sarah Halimi, s’insurge :
« La juge d’instruction a refusé constamment de recevoir l’avocat des victimes que je suis. C’est la première fois dans ma longue carrière. Je ne peux qu’y voir un défaut d’humanité et de compassion. La même juge a refusé de faire droit à nos demandes de reconstitution »ii.
Cela n’aurait pas été le cas si la juge d’instruction, au lieu de vouloir à tout prix s’opposer à la comparution de l’accusé, s’était inspirée de la rigueur, et de l’humanité de la procédure du Tribunal de Nuremberg.
« Le tribunal demande à l’accusation et à la défense quels sont leurs moyens de preuve ;
– les témoins de l’accusation sont interrogés, puis ceux de la défense ;
– les juges peuvent poser n’importe quelle question à tout moment ;
– accusation et défense peuvent interroger librement témoins et accusés iii».
Le bouquet, si j’ose cette expression pour qualifier la fine fleur de la non-justice, est dans la confirmation de l’irresponsabilité du meurtrier par la Cour de cassation le 14 avril 2021.
Il aura fallu un an (du 20 novembre 1945 au 1ᵉʳ octobre 1946) au tribunal de Nuremberg pour juger les 24 prévenus nazis et quatre ans pour ne pas déférer aux assises le meurtrier tortionnaire de Sarah Halimi. MN♦
© Marc Nacht
Marc Nacht est Psychanalyste et écrivain
i— Joseph Kessel, Reportages de l’envoyé spécial France-Soir novembre-décembre 1945
ii— Causeur, 30 avril 2021.
iii— Wikipédia.
G.W. Goldnadel dit : « La juge d’instruction a refusé constamment de recevoir l’avocat des victimes que je suis. C’est la première fois dans ma longue carrière. Je ne peux qu’y voir un défaut d’humanité et de compassion. La même juge a refusé de faire droit à nos demandes de reconstitution »
Puisque c’est LA PREMIERE FOIS dans sa longue carrière, la question à se poser alors serait celle-ci : Cette juge a-t-elle vraiment LE DROIT absolu de refuser de recevoir l’avocat des victimes ?
Cette juge « a refusé de faire DROIT » aux demandes de reconstitution.
La question à se poser alors serait celle-ci : Si la demande de reconstitution est un DROIT, cette juge a-t-elle, elle, le DROIT de refuser aux victimes ce DROIT ?
Pourquoi ne pas diligenter une enquête à l’encontre de cette juge a priori PARTIALE, donc visiblement pas digne d’être juge dans cette affaire, et même tout simplement pas digne de juger dans un tribunal ?
N’est-il absolument pas possible de faire remplacer cette juge dans cette affaire afin que TOUTE la justice et TOUTE la lumière soient faites, quitte à REFORMER la justice si effectivement il y a des choses à REFORMER.
Nous avons un président qui est le président de toutes les REFORMES. Alors pourquoi ne pas lui demander d’en faire une de plus, celle-ci notamment qui rendrait l’honneur à la justice et aux victimes ?