Retour vers le futur. Ou comment enfoncer des portes ouvertes et des esprits enfermés avec Jean-Luc Mélenchon et les alcooliques anonymes…
– Le racisme cible invariablement tous les êtres humains, comme il est plausiblement imputable à n’importe qui, homme ou femme, asiatique, blanc, maghrébin ou noir, trans, gay ou bisexuel. Aucun d’entre nous, quelle que soit son origine, sa condition, ne peut prétendre être à l’abri d’une parole, d’un acte ou d’une discrimination à caractère raciste.
– S’il fallait suivre à la lettre les comparaisons himalayesques d’une partie désespérée de la gauche, Mélenchon en tête, une réunion en « non mixité » se justifierait par conséquent à la limite, non pas entre personnes noires, asiatiques ou blanches. Mais bien entre personnes qui sont victimes de racisme qui placeraient leur parole à l’abri de celles qui ne le sont pas.
– La comparaison de Mélenchon à titre d’élément de langage entre les réunions en non mixité raciale et les « groupes de paroles » est donc particulièrement grotesque, surtout quand celui-ci évoque une comparaison de ces groupes de l’UNEF ou des camps décoloniaux avec ceux… des Alcooliques Anonymes. Si la mouvance militante indigéniste était un peu plus sur ses gardes, elle comprendrait à quel point des machins comme la France insoumise se moquent éperdument d’eux, au prix d’un effort remarquablement désespéré de grand n’importe quoi. Je vois d’ici Rokhaya Diallo et Houria Bouteldja, grimées en alcooliques anonymes sous les auspices du Grand Mélenchon. Un dessin pour Charlie peut-être ?
– La comparaison avec les groupes de parole féministes ne tient pas davantage la route, sauf à truquer le débat. Le sexisme contre lequel luttaient les militantes féministes était alors encore consacré par la Loi, par les mœurs et par le poids de l’Eglise catholique dans une société où le régime matrimonial a été réformé après le droit de vote des femmes, créant de facto une citoyenne dotée de droits politiques mais sous dotée de droits civils. Et les exemples sont légion. Le racisme est érigé par notre société en fléau, il fait l’objet d’une politique de lutte et occupe un quasi ministère. Moralement, il quasi unanimement réprouvé dans la société, à l’exception notable de minorités agissantes.
– Au-delà, cette comparaison entre groupes de paroles féministes et groupes en non mixité raciale ne tient pas parce que le sexisme vise invariablement les femmes et que son item présente un caractère de fixité que ne présente pas le racisme, à l’exception, peut-être, des dérives qui pourraient exister dans quelques rares sociétés matriarcales. Calquer ce raisonnement sur le racisme, c’est choisir le racisme qui nous vise et exclure celui qui ne nous vise pas. Ce n’est pas lutter contre le racisme, c’est, dans le meilleur des cas, opposer des déterminismes en politisant la race.
– Sur le plan de la logique par ailleurs, il convient de presser l’ensemble des formations politiques et personnalités qui soutiennent les événements en non mixité raciale ou religieuse de prendre position clairement : puisqu’ils soutiennent une pratique qui constitue dans la majeure des cas une infraction pénale, demandent-ils aussi pour l’abrogation de nos Lois ?
– Le Camp d’été « décolonial » a été à cet égard un très bon exemple. Car si on laisse de côté la démarche maladroite et inutile de Dupont Aignan devant le Conseil d’État, il était évident que le juge administratif est sans doute passé à côté des fondements mêmes de l’idéologie racialiste du PIR et de ses conséquences très concrètes.
– Pour les petits malins, on rappellera tout d’abord que l’absence d’identification d’un risque de trouble à l’ordre public par le juge administratif n’empêche nullement de rechercher et de poursuivre une infraction pénale, dont la clandestinité justifie souvent le recours aux moyens d’enquête. Il s’agit même d’un exemple topique de ce qui distingue police judiciaire et police administrative.
– Aux termes des articles 225-1 et 225-2 du Code pénal, la discrimination est réprimée de trois ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende lorsqu’elle consiste, notamment, à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ou à subordonner ceux-ci à une condition, dès lors que la cause déterminante de ce refus ou de cette condition révèle une distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée.
– Il convient donc de s’interroger sur les éléments constitutifs de ce délit et plus précisément sur l’acception du terme « fourniture de bien ou de service ». En droit pénal, les textes sont d’application stricte. Cela implique, certes, qu’on ne saurait étendre par analogie le champ d’incrimination d’un texte, mais signifie tout autant qu’on ne saurait ajouter à la Loi une condition qu’elle ne prévoit pas.
– Aussi, l’acception de la notion de fourniture de bien ou de service est large. Elle recouvre évidement toutes les activités relevant d’un échange économique. Mais de surcroît, il a également été jugé que les termes « bien et service » s’entendent de « toutes les choses susceptibles d’être l’objet d’un droit et qui représentent une valeur pécuniaire ou un avantage » (Voir par ex. CA Paris, 12 nov. 1974 : D. 1975, jurispr. 471).
– Aucune distinction dès lors, ne saurait ici être instituée entre les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux. Le Professeur Jean-Pierre Brill relevait ainsi par exemple qu’une distribution gratuite de produits à titre promotionnel semble donc tomber sous le coup de la loi, dans la mesure où elle serait subordonnée à une condition discriminatoire (J.-P. Brill, obs. : Rev. sc. crim. 1977, p. 40).
Par ailleurs, l’article 225-2 du Code Pénal vise tout sujet de droit et ne saurait voir son champ d’application réduit aux seules sociétés commerciales ou aux professionnels (CA Besançon, 27 janv. 2005, D. 2006. 357, obs. Paulin). Dans plusieurs décisions rendues par le Défenseur des droits, ce dernier rappelle également que l’infraction est caractérisée « indistinctement, si elle est commise par un professionnel, une personne privée ou une association » et que « le texte ne distingue pas davantage entre les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux » (Voir en ce sens notamment : Décision du 13 mai 2015 MLD-2015-102).
– En outre, il importe peu que l’événement se tienne en l’espèce dans un lieu privé ou public. Le fait que des « formations » proposées par les organisateurs d’un camp d’été ou d’un syndicat (SUD Education par exemple ?) s’adressent à toute personne « subissant le racisme d’état en contexte français » et ne soient par conséquent nullement réservées aux seuls membres d’une association tend également à caractériser l’élément matériel qui se rattache à une fourniture de service.
– Reste donc à établir qu’une distinction s’opère entre des personnes à raison de leur origine ethnique vraie ou supposée ou d’autres éléments de distinction prohibés par la Loi, tels que le nom patronymique ou l’appartenance, la non appartenance, vraie ou supposée, à une religion. Ici encore, le droit pénal offre un terrain plus souple que celui du contentieux administratif et vise à réprimer les discriminations pour autant qu’elles sont effectives, peu important qu’elles soient apparentes ou clandestines.
– Un signalement au Parquet de tout événement de type « camp d’été décolonial » documenté par la littérature « indigéniste », permet de contrer la difficulté née de la nécessaire démonstration du fait que les victimes du prétendu « racisme d’état en contexte français » sont par principe des personnes « racisées » et subséquemment, « non-blanches » en raison de leurs origines propres, vraies ou supposées qui les distingueraient des « non racisés ».
– Sur ce point il est vrai, l’expression tortueuse des indigénistes pourrait offrir quelques résistances. Les contorsions sémantiques identifiant la « blanchité » comme une caractéristique non-ethnique doivent être mises en perspective, au-delà du seul débat intellectuel, par une démonstration matérielle de l’objet de la distinction qui fonde le délit de discrimination. Il pourrait s’agir de l’identification de refus adressés à certaines personnes, ou encore de la liste des participants. Sur le plan intellectuel, la définition que les organisateurs des camps d’été formulent, s’agissant des personnes qui ne seraient pas victimes du « racisme d’état », permet par ailleurs de constater que si l’origine ethnique vraie ou supposée n’est pas le seul item de discrimination en cause, il s’agira pourtant à chaque fois de désigner un groupe de personnes ou des individus, soit à raison de leur couleur de peau ou leur origine, soit d’un autre élément de distinction qui fonde la répression de l’article 225-2 du Code pénal.
– Lisons la prose de ces gens :
« (…) En d’autres termes, la science a beau avoir prouvé qu’il n’y avait pas de différence biologique fondamentale entre les différents groupes humains, les catégorisations raciales et les valeurs (positives et négatives) qui leur sont attribuées n’ont pas disparu. Loin de là. D’un côté, une racialisation positive qui s’accompagne de bénéfices et de positions sociales et économiques avantageuses à l’échelle systémique ; de l’autre, une racialisation négative qui se manifeste par les effets inverses. Cela étant dit et les formes du racisme ayant évolué, la couleur de peau est loin de constituer le seul marqueur de racialisation. À cela s’ajoute des marqueurs plus ou moins visibles tels que le patronyme ou des signes distinctifs, notamment d’appartenance à la religion musulmane, qui renvoient à une origine, une différence réelle ou supposée. Ainsi, on peut être arabe, avoir “la peau blanche” et être impactée par le racisme d’État, de même qu’une blanche convertie à l’islam et ayant fait le choix de porter le voile sera renvoyée à une assignation raciale. ( http://contreattaques.org/magazine/article/camp-d-ete) »
– L’appartenance ou la non-appartenance à une religion définit entre autres caractéristiques non cumulatives les personnes victimes du « racisme d’état » et permet par opposition de mieux appréhender les caractéristiques de celles qui ne le sont pas. On nage en pleine discrimination.
– In fine de deux choses l’une : soit Jean-Luc Mélenchon, EELV, Plenel et l’ensemble de cette mouvance milite pour l’abrogation de nos Lois, pour la suppression des Directives européennes qu’ils chérissent par ailleurs sur ces questions, soit ils assument ouvertement de militer pour la violation de ces Lois.
Mélenchon a très clairement choisi d’y aller à fond, sera suivi en cela par d’autres mouvances politiques. L’important est donc dès à présent de ne plus perdre une minute et d’appliquer la Loi et de leur opposer partout leurs propres contradictions. Leurs têtes s’enfonceront dans la boue qu’ils se sont choisis et dans laquelle ils tentent d’amadouer la jeunesse de ce pays après avoir échoué lamentablement à garder par devers eux l’électorat populaire et ouvrier. Ils perdront au mieux les plus jeunes et au pire, ils contribuent à les fragmenter et à diviser la société sur des sujets qui ne la divisent pas. Couvrons-les avec l’indignité qu’ils se sont choisie.
© Charles Meyer
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