Nous ne montons pas en Israël par rejet de la France, mais parce que nous avons à nouveau l’opportunité d’exister sous forme de peuple, comme le demande le message juif.
J’aimerais apporter une autre approche sur le débat qui a opposé récemment le Grand-rabbin de France Haim Korsia à Ariel Kandel sur la question de la Alyah et du futur des juifs de France.
Ce sont deux personnes admirables, qui apportent beaucoup au monde juif, chacun a sa manière, mais il me semble que leur échange ne touche pas la problématique de fond.
La question de fond que ce débat soulève est la suivante :
Notre rôle d’après la vision juive est-il de vivre une vie de communautés dispersées parmi les Nations, ou d’incarner le message juif sous forme de société et de peuple ?
Le message juif, à mon sens, est extrêmement clair.
Essayons de l’analyser succinctement à travers trois axes : nos prières, nos lois, nos versets.
Nos prières :
Trois fois par jour, dans notre prière principale, la Amida, nous aspirons tous au retour des exilés, et à la reconstruction de Jérusalem :
« וְקַבְּצֵנוּ מְהֵרָה יַחַד מֵאַרְבַּע כַּנְפוֹת הָאָרֶץ לְאַרְצֵנוּ »
(Rassemble nous vite, ensemble, des quatre coins de la terre, sur notre terre)
« וּבְנֵה אוֹתָהּ בִּנְיַן עוֹלָם בִּמְהֵרָה בְיָמֵינוּ »
(Reconstruis-la, pour toujours, de nos jours).
On demande à l’individu juif, où qu’il soit, de continuer d’aspirer à vivre, à nouveau, sous forme de peuple, et de ne pas « accepter » cette réalité de communautés dispersés parmi les peuples.
Nos lois :
Il suffit d’avoir parcouru les 6 ordres de la Michna pour que soit évident que nos lois ne concernent pas uniquement une vie d’individu, de famille, ou de communauté, mais bien une vie de société. Il nous est demandé d’établir un système juridique, un système économique et une réalité agricole selon les valeurs juives. En exil, nous nous trouvons privés de plus de la moitié de nos lois.
La Torah est donc donnée à un peuple pour qu’il puisse l’incarner sous forme d’individu, de famille, mais aussi de société et de peuple.
Nos versets :
La Bible et la Révélation du Sinaï s’adressent à un peuple.
Depuis la promesse faite à Abraham : « Je ferai de toi un grand peuple », jusqu’au don de la Torah: « Vous serez une nation de prêtre et un peuple saint » et d’autres innombrables versets.
Dans tous nos textes, l’exil et la dispersion parmi les peuples sont vécus comme une réalité douloureuse, et non comme un idéal. Comme l’exprime le Maharal de Prague dans le premier chapitre de son livre NetsaH Israël : « הגלות היא יציאה מהסדר » (l’exil est une sortie de l’ordre des choses).
Enfin, la vision juive a toujours été de ne pas voir l’Histoire comme ‘’muette’’, de voir une Volonté qui dirige l’Histoire. Comment être insensible au fait qu’en 100 ans plus de 6 millions de juifs aient réussi à s’installer sur la terre de la promesse, qu’une terre aride pendant deux mille ans redonne ses fruits, que nous ne vivions plus sous le joug des Nations ?
Est-ce une manière juive de lire l’histoire que de ne voir cette renaissance que comme le fruit de trajectoires humaines ? Si nous ne sommes pas capables de parler de Providence lorsqu’une promesse bimillénaire se réalise, alors quand parler de Providence ?
Questions :
Cela signifie-t-il que chaque juif doit faire ses valises au plus tôt ?
Non. Chacun doit agir de manière responsable pour lui et les siens. Trouver les bonnes conditions pour venir. Mais garder clair dans la conscience, que nous avons à nouveau l’opportunité de construire une vie de peuple, et c’est là l’idéal juif.
La société Israélienne est-elle idéale ?
Loin de là. Mais c’est notre rôle de la construire. Il a fallu plus de 400 ans depuis l’entrée en terre d’Israël de Josué pour arriver à la réalité quasi-idéale du début du règne de Salomon. Penser que nous attendons pour sortir d’exil que nous attende une société idéale n’est pas, à mon sens, une vision juive, l’homme n’est pas passif, mais participe par ses efforts au projet.
Sachons saisir la magnifique opportunité que l’Histoire nous offre, et surtout ne redéfinissons pas ce qu’est l’idéal tel qu’il est véhiculé dans le message juif.
Gabriel Levy Enseignant en Pensée Juive et Fondateur de Shofar.
Merci, Gabriel Lévy, pour ce brillant article.
Un seul défaut : vous oubliez que le peuple juif ne se définit pas uniquement par ses textes sacrés. Les juifs constituent un peuple riche, divers, qui contient plusieurs composantes dont en particulier la composante religieuse, ou la composante israélienne, mais aussi la composante agnostique, athée, « diasporiste ». Vous avez l’air de considérer, à mon avis à tort, qu’il n’y a de « société », que regroupée dans un même lieu. Si Alyah il doit y avoir, l’argument en sa faveur n’est pas que religieux. Il y a bien sûr l’antisémitisme. Mais aussi le « message juif », l’appel au rassemblement du peuple juif, tel qu’il est inscrit dans les textes et que vous citez, est peut-être à lire de manière moins littérale que vous le faites, qu’il a une autre signification, plus universelle, plus symbolique. Spinoza, Kafka, Freud ou encore Einstein n’ont-ils pas plus fait pour ce rassemblement que l’alyah géographique ?
Accessoirement, n’oubliez pas une chose : les antisionistes se nourrissent de l’argument religieux de l’Alyah et de la définition des Juifs comme étant uniquement une religion, pour remettre en cause l’existence d’Israël. Exemple connu d’antisioniste : Shlomo Sand.
C’était pour lancer le débat …
50 ans apres notre alyah 1970 .. je retrouve dans cet article les bases thoranique qui ont guides notre decision de monter en Erets ou apres avoir fonde le MAF DES ANNEES 67 70 . j ai pu mettre en pratique le LECHANA AB BEYERUSALLAIM . MERCI JULIEN ZENOUDA . cordial chalom a Sylvie Marek Bensaid ….