Si quelqu’un peut m’expliquer en quoi une heure dans un café bien aéré, en quoi le temps d’un déjeuner au restaurant avec des amis choisis, en quoi aller au théâtre ou au concert dans une salle immense et haute de plafond en occupant une place sur deux en quinconce, m’expliquer en quoi ce serait plus dangereux, plus contaminant – et en plus nous serions volontaires, peut-être testés auparavant…
Évidemment nous pourrions dire à madame Hidalgo, à madame Pompili, aux nouveaux édiles à la mode, et à notre amie Greta aux si vindicatives nattes, -Tiens on n’en entend plus parler-…, que l’écologie n’est pas fameuse en temps d’épidémie et que rouler sans une bagnole bien close constitue une aventure moins risquée et pour soi et pour l’autre que de prendre le métro, le bus, le train en une telle promiscuité….
Dieu sait que je suis conscient que la situation est difficile, Dieu sait que je ne vais pas comme certains critiques systématiques m’improviser virologue et prétendre savoir mieux que les spécialistes quoi faire – mais j’ai cependant un doute, un doute terrible qui me vrille l’esprit: et si la destruction de tout un univers culturel, son anéantissement (Je ne parle pas des insolents rappeurs qui eux sauront toujours retrouver leur public, je parle des artistes qui transmettent et réimaginent, réinventent une culture universelle, celle qui dit, forme, permet le développement d’une civilisation, d’une culture profondément humanistes), si la destruction de toute une civilisation plus profondément que si elle avait subi quelque grand invasion, si la ruine de toute une économie et la transformation, durant de longs mois aux conséquences que nous pouvons imaginer, de nos écoles et de nos universités en d’étranges passoires en dépit du dévouement, dévouement parfois jusqu’à la dépression, des enseignants, Oui, Parfois je me demande si les choix politiques de nos gouvernants sous prétexte d’hygiène et de protection sanitaire ne sont pas un suicide civilisationnel collectif inconscient.
© Jacques Neuburger
Rassurez-vous, nous n’en sommes pas là ! Il y a eu des périodes plus longues où l’asphyxie culturelle était plus mortelle, par exemple entre 1940 et 45. Et pourtant sortant de l’enfer Primo Levi et d’autres ont montré, même si ce fut dur, que la civilisation n’était pas éteinte. Alors les grands mots pour nos maux actuels ne sont pas de mise.