1940 : les autorités allemandes instaurent un couvre feu dont les horaires varient selon les régions et les périodes. Il était interdit se trouver dehors (sauf autorisation administrative spéciale). Bars et restaurants doivent rester fermés. Il est obligatoire de rester chez soi, volets baissés, rideaux tirés, car aucune lumière ne doit être visible de l’extérieur.
Comment rester enfermé quand on a 20 ans? Nombreux sont les Jeunes qui enfreignent ce couvre-feu pour se réunir. Comment rester enfermer entre quatre murs quand on a 20 ans?
Une bande prend l’habitude de se retrouver pour faire la fête dans un bel appartement 55 bis rue Ponthieu près des Champs Elysées . On y croise une série d’habitués notamment André Darricaut (futur Darry Cowl), le fantaisiste débutant Gérard Séty, le pianiste de bar Édouard Ruault (futur Eddie Barclay), Micheline Dax, Jacqueline François, Grégoire Krettly (futur Gérard Calvi, compositeur et père du journaliste Yves Calvi), mais aussi les guitaristes Henri Crolla, Charles Aznavour et Django Reinhardt. Ce dernier est particulièrement apprécié par ces jeunes gens un brin contestataires qui viennent l’écouter dans la cave du Hot Club, rue Chaptal où se produit également le groupe formé par Claude Abadie, étudiant de Polytechnique, qui joue de la clarinette et Boris Vian, ancien de l’école Centrale, qui joue de la trompette.
Les zazous
Ces jeunes gens contestataires et turbulents qui s’opposent aux idées de la Révolution Nationale promus par le Gouvernement de Vichy reçoivent le nom de Zazous en référence à la chanson de Cab Calloway « Zaz Zuh Zaz » ou au refrain de Johnny Hess — « Je swing, za zou, za zou, za zou zé »
Zazou… Tel est le qualificatif de ceux qui sont aussi appelés les J3 (« jeunes de troisième catégorie »), nés entre 1924 et 1925 en référence à leurs cartes de ravitaillement. Ils se distinguent par leurs tenues excentriques : pantalons de golf, chaussures à semelles compensées, cravates filiformes épinglées à l’anglaise, chaussettes multicolores, vestes à carreaux et parapluies fermés pour les hommes sans jamais l’ouvrir, même s’il pleut à averse. Les filles portent une longue veste sur une jupe plissée, de grosses chaussures, et des lunettes noires. La couleur de leurs tenues est aux antipodes du vert-de-gris des uniformes allemands. L’écrivain et musicien Boris Vian en dressera le portrait dans son premier roman Vercoquin et le plancton.
Les zazous deviendront à la Libération les fervents partisans de l’existentialisme et conserveront certains de leurs rites et de leurs lieux de réunion notamment dans le Quartier Latin.
Extrait de Leur Seconde guerre mondiale. Bruno Halioua. Edition Buchet Chastel. Sortie 25 octobre 2020
Poster un Commentaire