Pierre Saba – Israël-Diaspora-Mossad : encore des phantasmes !

L’émission « Les enjeux internationaux », diffusée sur France-Culture le 26 novembre 2020 à 6H45, était intitulée « Le Mossad, ministère des affaires-étrangères bis ? ». Y intervenait pendant les dix minutes de l’émission le dénommé Eric Denécé, directeur du « Centre-français-de recherche-sur-le-renseignement ».

Parmi ses commentaires, Denécé qualifie en début d’intervention Israël d’Etat « à statut particulier ». Il relie sa diplomatie & son renseignement « à sa diaspora ».

Ces deux allégations appellent quelques précisions.

1- S’agissant du prétendu « statut particulier » d’Israël.

On cherche en vain de quel « statut particulier » Israël disposerait selon Denécé. Prolixe sur tous les thèmes qu’il aborde lors de l’émission, il ne fournit aucune explication à cette assertion lapidaire insérée entre deux explications.

Contrairement à l’affirmation de Denécé, Israël ne dispose d’aucun « statut particulier » ni en Droit international public, ni en Diplomatie, ni en Droit des Relations internationales… Israël est un Etat membre de l’ONU (dont il est la création, mais ce n’est pas un statut) et de la plupart des organisations internationales sans qu’aucun statut particulier n’y intervienne jamais!

En toutes hypothèses, l’écoute et la réécoute de l’émission ne permet pas de comprendre le lien établi dans la phrase ni dans le contexte entre l’intitulé de l’émission et le mystérieux prétendu « statut particulier » d’Israël.

2- S’agissant de la relation établie par Denecé entre la diplomatie israélienne, le Mossad et sa diaspora.

A nouveau, l’assertion de Denécé est solitaire, sans explication. Comme pour son tout aussi faux « statut particulier » elle est incise au milieu de développements qui eux sont argumentés. A nouveau, elle est inexacte et lapidaire.

Tentons une explication plus réaliste et conforme aux faits.

Chaque Etat utilise ses ressortissants au développement des relations diplomatiques et consulaires dans le monde. Israël n’en fait pas exception.

L’idée de Denécé selon laquelle Israël utiliserait « sa diaspora » comme services de renseignement est un fantasme démenti par les réalités humaines, culturelles, médiatiques, numériques et universelles. Ce fantasme est diffamatoire. Les renseignements israéliens sont probablement à l’image du pays: constitués d’Israéliens juifs, musulmans, chrétiens, musulmans, tcherkesses, arabes, etc., de ressortissants étrangers juifs ou non. L’idée de Denécé de renseignements israéliens reposant notamment sur les juifs de la diaspora relève d’une fausse, passéiste et improbable comptabilité. Elle relève d’une véritable et sempiternelle fantasmagorie attachée aux Juifs!

-Denécé ne connaît pas le sujet qu’il aborde. La diaspora juive n’appartient pas à Israël. Elle est diverse, composée de personnes aux avis contradictoires ou semblables. Elle n’est jamais univoque. Des composantes de la diaspora sont hostiles aux politiques israéliennes, certaines autres à l’existence d’Israël même. Il est faux de prendre à une diaspora aux ordres et aux intérêts de la maison-mère ! L’apparente unanimité de la diaspora juive quant à l’existence d’Israël n’y change rien.

Ajoutons que les Etats à diaspora ne sont pas toujours ceux que l’on croit! ( Arménie,Turquie, Maroc, Algérie, Tunisie, etc)

– Par ailleurs, la vie des personnes à changé, la règle du nomadisme s’étend sur la planète et les peuples ne sont plus statiques. Dans ces conditions, au fantasme attaché à Israël, « sa diaspora » s’ajoute le caractère suranné de tels poncifs centenaires ou millénaires.

Certains Etats utilisent leurs diaspora à des fins de politique intérieure et extérieure. Dans ce cas, ces modes opératoires sont visibles, lisibles, audibles par tous. Les incidents créés par la Turquie en France et en Allemagne, sont à et égard un exemple non-exhaustif particulièrement connu. Ce n’est certainement pas le cas d’Israël avec la diaspora juive en France par exemple mais partout ailleurs. Denécé ignore le légitimiste des Juifs dans l’Histoire et dans leur patriotisme!

In fine,
L’ approche d’Israël par Dénécé est binaire sur la forme et inexacte sur le fond.

Elle est binaire sur la forme puisque les propos de Denécé sont tous argumentés, à l’exception de ceux relatifs au prétendu « statut particulier » d’Israël et au supposé lien entre Israël, « sa diaspora » et le Mossad.

Il est patent que cette différence de traitement entre raisonnement et assertions fantaisistes et présupposées repose sur la nature des préjugés. Ces préjugés sont opératoires en fonction d’affirmation infondée et inopérants dès qu’il s’agit de les développer dans le cadre du rationnel et parfois de la loi.

Denécé mène péniblement un approche sur le fond puisque comme vu ici son assertion ne résiste à aucune analyse ni synthèse.

Il convient de noter que ces inexactitudes n’ont subi aucune contradiction ni question de la part de la journaliste qui conduit l’émission.

Denécé bénéficie ainsi de la quiétude intellectuelle alors qu’il la rompt par l’insertion lapidaire et sans explications au milieu d’explications détaillées et vérifiées!

Il serait temps de dégager de l’analyse relative à Israël les éléments relevant des phantasmes et des préjugés ancestraux qui nuisent à l’intelligence élémentaire, au raisonnement et à la relation vérifiée des faits. Il est percutant que le directeur français d’un centre de recherche sur le renseignement ne fasse pas exception.

Il est réaliste de considérer que la plupart des « recherches » sur Israël sont en France partielles et partiales. L’absence répétée de contradictoires est désormais usuelle.

L’insertion lapidaire de points sans rapports avec le contexte immédiat et sans démonstration est une fantaisie hypothétique qui n’a que peu de rapport avec la présentation d’une thèse démontrée et avérée.

Cette pratique nuit à la recherche synthétique et analytique de toute problématique.

Pierre Saba