« – Il ne sera pas mauvais de vous faire quelque petite saignée aimable, de vous faire quelque petit clystère dulcifiant.
– Mais, Monsieur, voici une mode que je ne comprends point.
– Il n’importe, la mode en est salutaire; il faut se faire aussi saigner pour la maladie à venir.
– Ma fi! Je m’en moque et je ne veux point faire de mon corps une boutique d’apothicaire.
– Vous êtes rétives aux remèdes; mais nous saurons vous soumettre à la raison! »
(Molière, le médecin malgré lui, scène IV)
Ainsi Sganarelle parle à Jacqueline, comme nos médecins médiatisés parlent à la France: « Vous êtes rétives aux remèdes; mais nous saurons vous soumettre à la raison! » Les supposés médecins qui ont envahi depuis presque un an l’espace politico-médiatique sont à l’image des médecins de Molière. Ce sont de faux médecins: tout médecin digne de ce nom soigne les malades dans un cabinet médical ou un hôpital. Dès lors que les urgences sont saturées, débordées, asphyxiées, leur place n’est pas dans les salons de maquillage des télévisions mais auprès de leurs patients. Un vrai médecin ne pavoise pas sur les écrans de télévision pour y gesticuler et déverser sa logorrhée.
Le médecin-politique ou médiatique est ce qu’on appelle un charlatan: « Je suis médecin passager, qui vais de ville en ville, de province en province, de royaume en royaume pour chercher d’illustres matières à ma capacité, pour trouver des malades dignes de m’occuper […] Je veux des maladies d’importance: de bonnes fièvres continues avec des transports au cerveau, de bonnes fièvres pourprées, de bonnes pestes […] C’est là que je me plaît, c’est là que je triomphe » (Molière, le Malade imaginaire, scène X)
Ces faux médecins qui ont pris la France en otage et imposent leur diktat quotidien au pouvoir politique terrifié à l’idée de perdre la prochaine élection, ou pire, d’être traîné devant les tribunaux, voient tout par le petit bout de la lorgnette.
Ils se trompent depuis le début avec leurs élixirs de charlatan. Leurs remèdes, dignes de la saignée de Molière, sont pires que le mal. Privés de culture générale, de vision de l’histoire et de sens de l’Etat, enfermés dans leurs certitudes scientifiques issues d’études mal digérées qu’ils ont oubliées à force de fréquenter les coulisses du pouvoir et les salons de maquillage, ils ne cessent d’attiser et de trafiquer la peur, de fabriquer une France fiévreuse, mesquine, renfermée chez elle.
Un médecin qui veut faire de la politique et de l’esbroufe médiatique doit renoncer à la médecine. Le mélange des genres conduit à une monstrueuse impasse: une nation doit être gouvernée, pas soignée comme un malade.
Ainsi, l’esprit étroit, réduit, incapables de toute remise en cause, comme les pires médecins, ils ont dramatiquement amplifié la catastrophe sanitaire avec leurs confinements généraux et forcés, contraires à tout bon sens.
L’épidémie se transmet avant tout par voie domestique à l’intérieur des familles.
Pour la combattre, il faut ouvrir les portes et les fenêtres, pas les fermer. Il faut vivre, bouger, briser les chaînes et non croupir et dépérir derrière des barreaux.
Ils ont détruit l’économie française (-15% de PIB après le premier confinement), condamné une classe d’âge (18-30 ans) au chômage, au désœuvrement, au désespoir, jusqu’au suicide, humilié le pays en détruisant, saccageant sa liberté, ridiculisé la France avec l’invention bureaucratique des petits laisser-passer nécessaires pour sortir de chez soi.
Pire, l’interdiction des livres, tellement emblématique du despotisme de la bêtise.
Pour vaincre l’épidémie, il fallait faire tout le contraire de leurs saignées de Molière : parler à la France le langage de la sagesse et de la confiance, en expliquant plutôt qu’en contraignant, adapter les réponses à chacun, se donner les moyens de tester et soigner (voilà quel était leur rôle), aérer le pays, respecter l’honneur et la dignité des Français, leur intelligence, leurs libertés et leur proposer de grands horizons d’espérance, les laisser sortir et vivre, marcher dans la forêt ou sur les plages, acheter des livres en librairies, pour leur donner la force – et l’envie – d’affronter la maladie car le grand large, l’air pur de la liberté qui circule, la passion des livres, protègent mieux de la maladie que l’espace moisi et confiné d’une prison à domicile.
La France est victime des charlatans – faux médecins – et de la lâcheté des politiques qui leur ont abandonné le pouvoir.
© Maxime Tandonnet
Haut fonctionnaire français, ancien conseiller à la Présidence de la République sur les questions relatives à l’immigration, l’intégration des populations d’origine étrangère, ainsi que les sujets relatifs au ministère de l’Intérieur, Maxime Tandonnet, contributeur régulier du FigaroVox, a notamment publié André Tardieu. L’incompris (Perrin, 2019).
Les charlatans du style Axel Kahn plaisent aux médias parce qu’ils se situent intellectuellement au même niveau _ très bas. C’est le même principe que pour les élections présidentielles françaises ou étrangères : des déluges de propagande font avaler à la majorité des gens les pires inepties.