En annexant les implantations et la vallée du Jourdain, Israël créera les conditions d’une solution de deux États acceptable pour une majorité d’Israéliens, argumente l’auteur Emmanuel Navon.
L’éventuelle extension de la souveraineté israélienne (ou «annexion») à une partie de la Judée-Samarie (désignée comme «Cisjordanie» en français, terme qui consacra l’annexion de ce territoire par la Transjordanie en 1950) soulève deux questions distinctes sur ce projet: est-il souhaitable? ; est-il légal? Ma réponse à ces deux questions est affirmative.
L’annexion est souhaitable car elle lèvera un obstacle à la solution des deux États. Le fait que cette phrase vous laisse sans doute bouche bée prouve la pérennité des mythes. Car l’idée selon laquelle la solution des deux États sera fondée sur le retour d’Israël aux lignes d’armistice de 1949, sur la division de Jérusalem, et sur le retour des descendants des réfugiés palestiniens en Israël est un mythe. Aucun gouvernement israélien n’acceptera un État ennemi et armé surplombant Tel Aviv et traversant Jérusalem ; le délogement d’un demi-million d’Israéliens ; et l’immigration en Israël de la troisième génération des réfugiés arabes de 1948.
Tant que les Palestiniens et les gouvernements qui les soutiennent insisteront sur ces chimères, il n’y aura pas de solution de deux États. En revanche, il est une solution de deux États qui est acceptable pour une majorité d’Israéliens: un État palestinien démilitarisé ; une souveraineté israélienne sur les blocs d’implantations, et le maintien de la présence israélienne dans la vallée du Jourdain ; la préservation d’une Jérusalem unifiée sous souveraineté israélienne mais sans les quartiers périphériques à l’est et au nord de la ville ; l’intégration des réfugiés palestiniens dans leur futur État. Ces principes sont précisément ceux qu’Yitzhak Rabin avait énoncés peu avant son assassinat en novembre 1995. Ils ont été repris un par un par le plan Trump. Une telle annexion ne serait pas contraire au droit international car la Cisjordanie n’était pas un territoire souverain avant sa conquête par Israël en juin 1967
Les Palestiniens n’acceptent certes pas ces principes. Mais ils n’acceptèrent pas non plus les principes de Bill Clinton en décembre 2000, ceux d’Ehoud Olmert en septembre 2008, et ceux de John Kerry en février 2014 – principes qui eussent établi un État palestinien sur la totalité (si l’on inclut les échanges territoriaux prévus entre les deux États) de la Cisjordanie et de Gaza, avec Jérusalem-Est pour capitale. Les Palestiniens n’acceptèrent pas ces principes avantageux entre autres parce qu’ils pensaient, à juste titre, qu’ils finiraient par obtenir une offre encore meilleure après avoir dit non. Tant que le temps jouait en leur faveur, justement parce que les propositions israéliennes et américaines ne cessaient de leur être plus favorables, les Palestiniens pouvaient se permettre d’être intransigeants. Trump a mis fin à cette dynamique qui ne cesse, depuis deux décennies, de nous éloigner de la solution des deux États.
En annexant les blocs d’implantations et la vallée du Jourdain, et en gelant toute construction dans les territoires destinés à l’État palestinien, Israël créera les conditions d’une solution de deux États acceptable pour une majorité d’Israéliens. Ce sera ensuite aux Palestiniens de décider s’ils préfèrent le statu quo ou un État démilitarisé qui ne paiera pas des salaires à vie aux familles des terroristes et qui n’éduquera pas ses enfants dans la haine des Juifs.
Une telle annexion ne serait pas contraire au droit international car la Cisjordanie n’était pas un territoire souverain avant sa conquête par Israël en juin 1967. Lorsque la Grande-Bretagne mit fin à son mandat en mai 1948, elle créa un vide juridique qui fut rempli par Israël, par la Jordanie, et par l’Égypte suite aux accords d’armistice de 1949. La Jordanie conquit une partie de l’ancien mandat britannique en 1948, puis l’annexa en 1950. Or cette annexion ne fut jamais reconnue par la communauté internationale (à l’exception de la Grande-Bretagne et du Pakistan) et donc la Cisjordanie ne devint pas un territoire souverain. Quant à ceux qui affirment s’opposer à l’unilatéralisme par principe, à eux d’expliquer pourquoi ils ne s’y opposèrent pas lorsque Israël se retira unilatéralement de la Bande de Gaza en 2005
Par ailleurs, la Jordanie conquit ce territoire dans une guerre d’agression en 1948, tandis qu’Israël le conquit dans une guerre de légitime défense en 1967. Enfin, ce territoire faisait partie de l’ancien mandat britannique que la Société des Nations avait destiné au foyer national juif en 1922. Les accords d’armistice de 1949 n’établirent pas une frontière internationale entre Israël et la Jordanie, mais une ligne de cessez-le-feu. La résolution 242 du Conseil de sécurité de l’ONU, adoptée en novembre 1967, n’exige pas d’Israël un retour à cette ligne, et la résolution 233, adoptée en 2016, permet des ajustements frontaliers mutuellement agréés.
Le plan Trump prévoit des échanges territoriaux (ou annexions mutuelles) de tailles semblables entre Israël et l’État palestinien, ainsi qu’une continuité territoriale entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie. En annexant même 30 % de la Cisjordanie (le maximum prévu par le plan Trump), Israël n’ajouterait qu’une infime population arabe à son territoire, et cette population se verrait attribuer la citoyenneté israélienne à l’instar des Arabes israéliens et des Druzes du Golan. Ces quelques milliers d’habitants de la «zone C» instaurée par les accords d’Oslo s’ajouteraient aux deux millions d’Arabes israéliens représentés à la Knesset, à la Cour suprême, et dans la fonction publique.
L’Union européenne a imposé des sanctions économiques à la Russie pour son annexion de la Crimée, mais la Crimée faisait partie d’un territoire souverain contrairement à la Cisjordanie. Et l’Union européenne ne saurait invoquer le principe de cohérence puisqu’elle ne sanctionne pas la Turquie pour son occupation partielle d’un membre de l’Union européenne, à savoir Chypre. Quant à ceux qui affirment s’opposer à l’unilatéralisme par principe, à eux d’expliquer pourquoi ils ne s’y opposèrent pas lorsque Israël se retira unilatéralement de la Bande de Gaza en 2005.
Ceux qui brandissent la menace de «représailles» en cas d’annexion ne semblent toujours pas avoir compris que les Israéliens, après avoir payé hier le prix intolérable de leur naïveté, sont prêts à payer aujourd’hui le prix tolérable de leur réalisme. Comme le disait Golda Meir, «nous préférons vos condamnations à vos condoléances».
Emmanuel Navon enseigne les relations internationales à l’Université de Tel-Aviv et au Centre interdisciplinaire de Herzliya. Membre du Likoud, il est également chercheur au Forum Kohelet et à l’Institut de Jérusalem pour la stratégie et la sécurité (deux think-tanks conservateurs).
Source: FigaroVox. 30 juin 2020.
“Il est bon que vous sachiez que tous les efforts humains sont inutiles contre moi, car tout ce que j’entreprends doit réussir. Ceux qui se déclarent mes amis prospèrent. Ceux qui se déclarent mes ennemis périssent. L’exemple qui vient d’arriver à Jaffa et à Gaza doit vous faire connaître que, si je suis terrible pour mes ennemis, je suis bon pour mes amis, et surtout clément et miséricordieux pour le pauvre peuple.”
Cela ressemble fortement aux déclarations, ou sentiments, d’un dictateur arabe ordinaire, encore plus aux sentiments des populations arabes qui vivent dans un monde dangereusement imaginaire pour lequel toutes les défaites ne sont pas dues à la corruption des régimes arabes mais à la perversion naturelle d’Israël, qu’il “suffira” de détruire pour que tout rendre dans l’ordre ancestral. C’est une proclamation du sympathique Bonaparte (9 mars 1799, citée par L’EXPEDITION D’EGYPTE 1799-1801, Henry Laurens Albin Michel 1989 p188), incapable de comprendre son échec en Egypte et Palestine, avant de rentrer pour liquider ce qui restait de la République.
Pour régler définitivement la question Palestinienne, le but reste toujours d’établir la souveraineté d’Israël, dans ses frontières naturelles jusqu’au Jourdain. L’idéal sioniste semble avoir disparu, détruit par des mesures politiciennes désastreuses qui sacrifient le destin Israëlien à un “plan américain” qui ne peut que détruire tout sentiment rationnel des régimes arabes, plus ou moins réalistes, et développer un nationalisme encore plus extrême des populations arabes frappées par une crise économique durable.
Soutenir cet aventurisme dangereux n’est pas soutenir Israël. Le respect de la souveraineté Israëlienne n’impose pas le soutien d’aventures politiciennes, pour le moins malencontreuses.
Il faut être sorti de normale Sup pour comprendre ce que vous dites
Décodeur svp
Merci Monsieur Navon
De revenir à la réalité. Vous m’aviez surpris en prenant position pour Benny Gantz, vous le fidèle Compagnon du Likoud . Je suis très heureux et vous félicite pour votre réalisme d’aujourd’hui : je suis d’accord avec vous pour discuter et tenter de trouver une solution favorable aux palestiniens sans mettre en danger notre état et notre survie démocratique ( ce qui n’est pas le cas de ceux qui se situent du côté bicolore) .
Oui à des discussions , même si nous devons envisager de rencontrer des truands qui ne voient que leurs intérêts et même si nous devons prendre des précautions pour protéger les palestiniens des truands qui les dirigent et des iraniens ou d’Erdogan qui veulent s’en servir comme de la chair à canon .
Je suis très content et heureux car je suis prêt à partager votre point de vue : Nous en avons marre de ce conflit qui ne sert pas les intérêts des protagonistes et en tout état de cause des citoyens israéliens .
Bravo pour cette prise de conscience qui me paraissait abusée par ce parti créé dans un seul but : s’opposer à Binyamin Netanyahou. Je suis persuadé que comme beaucoup d’entre nous vous avez pris conscience dès roublardises politiques ( un peu équivalentes à celles pratiquées en France…. ) où on crée un parti dans le seul but de prendre les rênes du pouvoir quelle que soit la politique à pratiquer ensuite.
Merci Monsieur Navon de me réconcilier avec vos analyses.
Merci Mr Navon,je vous ai retrouvé.
Bonsoir,
veuillez m’excuser pour mon ignorance politique, mais en lisant
votre analyse sur l’attitude des Chefs palestiniens, je ne peux
m’empêcher de penser à l’histoire des dix plaies d’Égypte.
Chaque fois, Dieu durcit le cœur de Pharaon qui refuse de faire
sortir le peuple hébreu !
A force de conquérir des territoires, Israël finira par occuper
tout le territoire, et les Palestiniens forcés de s’intégrer dans
l’état Israélien qui deviendra juif. A mon humble avis, il n’y aura
pas d’état palestinien car l’antisémitisme allant croissant,
de plus en plus de juifs vont émigrer et il faudra de la place……..
(par la vallée du Jourdain Israël contrôle l’eau ,une arme efficace !)