L’Hydroxychloroquine à l’épreuve du rasoir d’Ockham.
Depuis la médiatisation de la publication du Lancet, on assiste à une inflation impressionnante d’échanges et d’articles opposant les partisans et les opposants au traitement du professeur marseillais, aimablement surnommé “Essaiclinix” par une facebookienne qui se reconnaîtra peut-être ici.
C’est ainsi que la question de l’efficacité de l’HCQ finit par se diluer à l’extrême dans d’interminables débats entre médecins et scientifiques de toute obédience, chacun y allant de sa spécialité et de ses compétences pour tenter de trancher la question et de la conclure éventuellement dans un sens favorable ou non. Je suis très impressionné de lire ici certains échanges savants entre médecins et chargés de recherches qui semblent tous animés par la recherche de la vérité scientifique, fondement et quête de toute démarche scientifique.
La recherche des preuves, l’objectivité, le protocole de recherche, la reproduction de l’expérience, le recoupement des données, l’analyse des résultats, la confrontation entre équipes, la validation par les pairs, la part entre le placebo, le nocebo et les effets de la molécule active, le contexte de la pathologie et ses particularités, l’historique médical personnel des patients, les comorbidités, les facteurs environnementaux, tous ces paramètres constituent les fondements de toute recherche scientifique.
Cependant, au bout d’un certain moment, ces échanges fournis, méticuleux, hyper pointus et détaillés, finissent me semble t-il par noyer le poisson. Car ces échanges, aussi pointus soient-ils et dont je ne conteste nullement l’utilité et la validité jusqu’à un certain point, font-ils réellement avancer la cause? Je n’en suis pas convaincu et je crains même que cela ne mène nulle part et ne produise encore plus de doutes et de confusion.
Alors?
Où se trouve, au fond, cette vérité objective sur l’efficacité du traitement à l’HCQ?
C’est ici qu’il est utile de convoquer la philosophie, Reine des sciences avant la naissance de LA Science, le frère franciscain anglais, philosophe et logicien, Guillaume d’Ockham et son “rasoir”, ainsi que le philosophe grec Empédocle dont il s’est inspiré. Le principe du rasoir en philosophie signifie qu’il faut éliminer les explications improbables d’un phénomène et s’en tenir au principe de simplicité, d’économie et de parcimonie : Pluralitas non est ponenda sine necessitate (les multiples ne doivent pas être utilisés sans nécessité).
Le rasoir d’Ockham est par conséquent un des principes utilisés en science pour l’élaboration d’une théorie et pour le choix entre différentes solutions possibles, ce n’est pas une loi ou un principe scientifique absolu, mais un outil précieux pour éviter de se perdre et de diluer la recherche de la vérité dans des conjectures qui finissent plus par nuire qu’à contribuer à trancher la question. Guillaume d’Ockham et sa méthode du rasoir philosophique ont été les précurseurs de l’empirisme anglais, un ensemble de théories philosophiques qui font de l’expérience sensible et de l’observation l’origine de toute connaissance et donc le fondement de toute science, s’opposant ainsi aux croyances et aux idées innées.
Quant à l’hydroxychloroquine elle fait partie de cet ensemble de molécules actives que l’industrie pharmaceutique a nommé “médicament” dès le XIX ième siècle, le médicament, un objet étrange, rappelons-le, entre science, marché et société pour reprendre l’expression de Philippe Pignarre dans son excellent ouvrage “Qu’est-ce qu’un médicament ?”.
Le médicament, dit-il très justement, est ce curieux alliage alchimique entre le pacebo (je plais), effet de suggestion important toujours mystérieux et mal compris malgré les travaux de Bernheim, et la molécule, celle-ci étant la seule à objectiver les effets sur l’organisme, raison pour laquelle le protocole de l’épreuve en double aveugle est imposé à toute molécule prétendant au rang de “médicament, un mot qui s’inscrit dans une lignée étymologique commune formée à partir de la racine indo-européene« med » qui a le sens de « prendre avec autorité des mesures appropriées », d’où ses différentes valeurs dans les langues indo-européennes : « penser, réfléchir, méditer » avec l’idée d’une pensée qui règle, ordonne, gouverne, règne, mesure et juge, le médecin réglant et dominant la maladie. Les mots medicus, « médecin », medicina « médecine » et médicament qui proviennent du latin mederi « soigner, donner des soins à » sont donc tous issus de cette racine indo-européenne “med”
Signalons aussi à cet égard que le mot « méditation » provient de la même racine.
Le passage de la molécule au médicament représente ce que P. Pignarre appelle dans le sillage des travaux de F. Dagognet d’une manière constructiviste la socialisation de la molécule par le marquage et l’effraction opéré par le médicament dans le corps et entre les hommes. Il s’agit d’une épreuve destinée à organiser la rencontre délicate entre deux corps, celui de la molécule et celui de l’être humain parlant défini par le langage et l’institution symbolique.
Cette rencontre doit faire l’objet d’un apprivoisement et suppose par conséquent un art et un savoir faire, un domptage qui précisément autorise au phármakon des Grecs de ne pas devenir poison (Toxikon) mais remède. L’objet de l’art de la médecine et celui de la prescription des pharmaka (remèdes)
Alors?
La molécule de l’Hydroxychloroquine est-elle un remède(pharmakon) dans la Covid-19, comme l’affirme le Pr. Raoult avec sa cohorte de malades traités ou un poison (toxikon) comme l’affirment le Lancet et ceux qui accréditent ce genre d’étude et de publication?
Allons-nous trancher la question dans d’interminables débats académiques entre experts à coups d’études randomisées contradictoires, très souvent politiquement, idéologiquement et financièrement orientées, polluées et biaisées par des conflits d’intérêts, ou devrions nous appliquer le principe du rasoir d’Ockham et conclure provisoirement à l’efficacité de la molécule lorsqu’elle est prescrite intelligemment selon un protocole rigoureux en début de maladie et non en fin et en association avec un antibiotique?
L’expérience thérapeutique de l’IHU de Marseille semble en tout cas bien fonctionner selon le rasoir d’Ockham en privilégiant l’empirisme et l’observation de manière scrupuleuse et elle a le mérite de faire avancer la médecine par empirisme au lieu de la faire stagner et tourner en rond au prix de nombreuses vies humaines perdues pour des motifs plus narcissiques, politiques, idéologiques et dogmatiques que scientifiques et médicaux. La médecine est un art, celui de guérir et non une science exacte, deux temporalités différentes, temps court et temps long.
La médecine s’appuie sur la science qui est son socle épistémologique, mais la médecine ne peut être bloquée par des débats scientifiques interminables lorsqu’elle semble fonctionner sur un échantillon important de malades.
© Michel Rosenzweig
Cet article s’inscrit dans le genre florissant « je ne suis pas médecin mais… ». Affirmation suivie en général par n’importe quoi.
Parait qu’administrée aux crédules, l’Hydroxychloroquine produit, en moyenne, des réactions délirantes dans un cas sur deux.
Et héritiers (spirituels…) d’Astérix et d’Obélix, nous sommes tous crédules. C’est dans nos gênes.
Prière donc de se rendre compte qu’il y a un vaste monde au-delà du village gaulois assiégé où un druide chevelu, moustachu et barbu en blouse blanche fait des miracles avec une potion magique.
MAIS les villageois de naissance ne font pas le rapprochement Raoult-Panoramix, tellement ils ont envie d’y croire ; normal, ils sont tombés dedans tout petits.
Surtout que ce vaste monde, oh shame on us, parle Anglais.
Et il n’y a pas que le « Lancet » qui fustige l’Hydroxychloroquine. Voyez donc ceci :
https://www.les-crises.fr/azithromycine-chloroquine-les-dangers-du-protocole-de-raoult/
Voilà aussi ce qu’en dit le TRES prestigieux « Nature » (prononcez Neyytchère, what else) : … In English of course. https://www.nature.com/articles/s41586-020-2286-9
Non, cette lecture scientifique n’est pas à ma portée ; mais heureusement « Les Echos » a lu :
« L’article publié dans ‘’Nature’’ apporte en outre une explication aux lourds effets secondaires cardiaques observés au cours de certaines études portant sur l’hydroxychloroquine et INTERROMPUES pour cette raison. L’hydroxychloroquine se lierait en effet à une protéine appelée hERG, essentielle à la régulation de l’activité électrique du cœur ».
Lisons aussi ce que dit la fédération française des diabétiques sur son site concernant ce miracle homme/médicament providentiels dont nous sommes friands en temps pareils ;
https://www.facebook.com/Federation.francaise.des.diabetiques/posts/covid19-plaquenil-pourquoi-il-ne-faut-jamais-prendre-de-plaquenil-sulfate-dhydro/3011080798953504/ :
« Il n’existe à ce jour aucun traitement préventif ni curatif d’efficacité démontrée contre l’infection à COVID-19. ….. ».
Concernant un médicament antipaludéen (sans doute l’hydroxychloroquine) cette fédération dit :
« Les données sont actuellement totalement insuffisantes pour être probantes de fait dans l’état actuel des connaissances…Actuellement, hors de l’hôpital, ce médicament n’est recommandé ni en curatif ni en préventif car il peut être responsable d’effets indésirables sévères rares mais gravissimes (hypoglycémie, troubles du rythme cardiaque) et qu’il a de très nombreuses interactions médicamenteuses.
Son rapport bénéfice-risque défavorable à ce jour doit en interdire l’utilisation en particulier en automédication ou en auto-prescription d’un médecin pour lui-même ».
Mais apparemment expliquer ça à certains s’apparente à convaincre un Lubavitch de manger du porc.
C’est très intéressant, mais je ne suis pas médecin..:-)
En attendant, il semble qu’a Marseille on meurt moins qu’a Paris ou dans le Grand-Est, sans parti pris aucun mais je ne suis pas médecin.