Nathalie Bianco. « La décence, essaie tu vas voir, c’est génial tu vas juste A DO RER »

C’est comme quand on est malade, cloué au lit, qu’on souffre et que des gens bien intentionnés viennent t’exhorter à te secouer un peu tout en te donnant des conseils à base d’huile essentielle de Gautléria : « Essaie tu vas voir c’est génial tu vas juste A DO RER ».

C’est comme quand on souffre d’un chagrin d’amour. Un vrai, celui qui vous flingue, qui vous déchire les entrailles et vous piétine le cœur, et que des amis compatissants veulent vous distraire avec les photos de leur week-end en amoureux ou tiennent absolument à vous présenter quelqu’un pour vous consoler « Essaie tu vas voir il est génial tu vas juste l’A DO RER ».

Au mieux, c’est à côté de la plaque, au pire, c’est indécent.

Quelque part entre un discours de Miss France et les chansons des « Enfoirés », toutes ces pétitions ineptes et ces tribunes en forme de leçons de morales qu’on voit fleurir en ce moment sont insupportables, parce qu’elles émanent des gens les moins à même de nous faire la leçon. Ces milliardaires qui vivent dans des villas de 600 mètres carrés, qui roulent dans des voitures de luxes, ces enfants gâtés globe-trotteurs qui prennent l’avion comme d’autre empruntent le RER A, ces stars ambassadeurs de voitures ou de montres de luxe, ces égéries qui s’affichent sur les Abribus pour nous vendre des sacs à 4500 euros et des rouges à lèvres à base de pétrole veulent nous apprendre la frugalité, lutter contre le consumérisme et travailler à une refonte profonde des valeurs ? Sérieusement ?

Ce n’est pas de cela dont nous avons besoin pour « l’après ». La frugalité pour beaucoup d’entre nous, elle va s’imposer d’elle-même, parfois cruellement. Nous ne sommes pas des enfants, la réalité, on se la prend déjà de plein fouet, et nous sommes capable de réfléchir, sans qu’on vienne nous sermonner.

Que ces gentils people nous épargnent leurs injonctions et leurs leçons de morales pondues depuis leurs lofts de Saint Germain des prés, leurs villas à Miami où leurs maisons du Cap Ferret et qu’ils fassent leur boulot. Qu’ils soient beaux, qu’ils nous fassent rire, rêver, pleurer. C’est de cela aussi dont nous avons besoin pour « l’après » qui s’annonce rude : de la beauté, de la musique, des fleurs, de la grâce, de la poésie, de la délicatesse, de l’humour, de la dérision, de l’humanité…

Ce sera déjà bien. Pour le reste..

« La décence, essaie tu vas voir, c’est génial tu vas juste A DO RER »

Nathalie Bianco est auteur et essayiste.

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