Par le biais d’une Lettre ouverte au Président, Isabelle Adjani, citant en exergue René Char, demande à Emmanuel Macron qu’il décrète L’Etat d’urgence culturelle et s’engage en faveur d’une politique ambitieuse, où la liberté de créer ne sera pas remise en question par le principe de distanciation sociale, parce que l’art est un état où la liberté est une nécessité, l’art est un état où la liberté fait loi.
Paris, le 4 mai 2020
« Vous occuperez tout le terrain au profit de la seule vérité poétique constamment aux prises, elle, avec l’imposture et indéfiniment révolutionnaire, à vous. ”
Monsieur le Président,
Aujourd’hui, je vous écris ces quelques mots de René Char qui semblent s’adresser à nous les artistes, les auteurs… et à tous ceux, toutes catégories confondues qui œuvrent à la culture, à l’art, à la création dans ses inépuisables formes d’expression et de représentation.
Infinie source d’oxygène.
Ce qui s’appelle vital.
Ces mots pourraient-ils vous inspirer ? Car nous, qui faisons respirer cet oxygène-là, c’est à dire la culture, allons bientôt expirer si vous ne tombez pas le masque pour nous donner les moyens de vivre et pour beaucoup, de survivre, avant que l’ouvrage ne reprenne.
Nous savons, vous savez, que nous, vulnérables mais indestructibles artisans de la culture, sommes un gage majeur de démocratie dans un pays, que notre existence sécrète un antidote puissant à tout ce qui peut être liberticide, et que le courage de vous dire que la reprise autour du cinéma, du théâtre, de la danse, de la musique, des musées, doit être pour demain, et pas pour après-demain, nous l’avons.
La création, nous la voulons vivante pour que les gens restent vivants : elle ne peut rester otage de solutions à court terme, comme sur les réseaux sociaux, quelles que soient les ressources dévouées de ceux d’entre nous qui tentent de lutter contre son asphyxie.
Ayons l’audace d’imaginer – car faire preuve d’imagination, ça, nous savons le faire – que nous avons notre propre Ministère, un Ministère qui se nomme Ministère de la Culture et qu’on y débat de l’exception culturelle française.
Alors, voilà notre supplique :
Monsieur le Président,
Mobilisez-vous sans exception aucune, en faveur de toutes les personnes qui œuvrent pour l’art et ce que contient et représente la culture pendant tout le temps qu’il faudra.
Oui, il va falloir prolonger les droits des intermittents du spectacle ; oui, il va falloir ouvrir de nouveaux droits pour les contrats courts ne bénéficiant pas du régime de l’intermittence ; oui, il va falloir empêcher la fermeture définitive des espaces culturels (quelle que soit leur taille et leur vocation) ; oui, il va falloir exonérer de charges celles et ceux qui dépendent des URSSAF des artistes et des auteurs…
Oui, Monsieur le Président, nous vous attendons à la hauteur de la fierté avec laquelle vous brandissez, comme tous les autres présidents de la Ve République avant vous, la culture française comme le plus bel étendard de notre pays.
Alors Monsieur le Président, il est temps de déclarer l’état d’urgence culturelle, une urgence sans condition, une urgence sans restriction, une urgence où la liberté de créer ne sera pas remise en question parce que la culture est incompatible avec la distanciation sociale, parce que l’art est un état où la liberté est une nécessité, l’art est un état où la liberté fait loi.
L’état d’urgence culturelle : c’est défendre un patrimoine vivant qui appartient à tout le monde en France.
Aidez nous à sauver ce bien démocratique commun et inestimable qu’est notre culture.
Isabelle Adjani
Elle est sympa, l’Adjani.
Elle veut des sous.
Elle écrit au Président de la République.
Mais, des sous, il n’en a pas. Il ne peut que les prendre dans ma poche.
Mais, ma femme de ménage Latifa, elle en veut aussi, des sous. Vu l’effondrement prévisible de mes revenus qui m’interdirait probablement de l’employer désormais, ses difficultés pourraient être d’une autre nature que celles de l’Adjani.
Mais Latifa n’écrit pas au Président de la République.
Il ne la lirait jamais. Elle n’est pas l’Adjani.
Et quid des infirmières mal payées et méritantes qui voudraient un peu de beurre dans leurs épinards ? Elles ne sont pas l’Adjani non plus.
L’arbitrage de ma poche est vite fait. RIEN pour l’Adjani.
Sauf, peut-être, le César du culot.