Isaac Franco. L’arroseur arrosé

Joe Biden, le candidat présumé du parti démocrate à l’élection présidentielle américaine du 3 novembre prochain, ne peut désormais plus ignorer l’accusation de viol portée contre lui par Tara Read alors qu’elle faisait partie de son staff de sénateur. Les faits, qui se seraient produits en 1993 et auraient fait l’objet d’une plainte écrite, sont corroborés par au moins deux témoins qui disent avoir gardé un vif souvenir des détails du récit que Tara Read leur a rapporté peu de temps après ce qui lui serait arrivé dans un couloir peu fréquenté du Sénat.

Nul ne peut à ce jour affirmer sans le moindre doute la véracité des faits, mais le traitement, tout empreint de défiance et de scepticisme, réservé par les médias et les mouvements féministes à cette affaire tranche radicalement avec celui observé en 2018 dans le cas du juge conservateur Brett Kavanaugh, le candidat désigné en 2018 par le président Trump pour occuper un poste devenu vacant à la Cour Suprême. Alors accusé par une certaine Christine Blasey Ford pour un crime de même nature trente ou trente-cinq ans plus tôt, la presse et le mouvement #MeToo ne s’étaient guère embarrassés de l’absence totale de preuves, de la mémoire fantaisiste de la victime présumée et de ce que les témoins pourtant cités par la plaignante elle-même ne corroboraient nullement ses dires, pour stigmatiser le choix du président et exiger (en vain) la disqualification de l’intéressé. Dans les mots tenus à l’époque par Joe Biden lui-même: “Du moment qu’une femme a le courage de révéler au grand jour ce qui lui est arrivé, il faut commencer par penser que l’essentiel de ce qu’elle rapporte est vrai, même si elle en oublie certains détails…Les femmes devraient avoir le bénéfice du doute et ne pas être à nouveau abusées par le système”. Il doit paraître aujourd’hui bien difficile pour Joe Biden, le parti démocrate et la majorité de ses électeurs, les médias et les mouvements féministes alors tous si convaincus de la culpabilité du juge Kavanaugh (1), d’expliquer pourquoi cette injonction à croire toute femme qui se rappelle vingt, trente ou quarante ans après avoir été victime de faits semblables, ne s’applique également pas à ce que rapporte Tara Reade…

“Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir” ou “Selon que vous serez Démocrate ou Républicain…”.

L’union sacrée derrière Joe Biden ne doit toutefois pas faire illusion. Nul dans le parti ne mésestime les traces que pourrait laisser cette accusation de viol dans les esprits de certains électeurs, Indépendants comme Démocrates, en dépit de l’engagement constant des médias partisans pour les brouiller, sans parler de l’abus grossier de sa fonction de vice-président de Barack Obama au bénéfice de son fils Hunter en Ukraine et en Chine que ne manquerait pas de rappeler son opposant Républicain. Une “open convention” ou convention arrangée en août n’est dès lors pas à exclure totalement, où le parti ignorerait la volonté exprimée par ses électeurs au terme des primaires et se choisirait un autre candidat comme le gouverneur de New York Andrew Cuomo ou une Hillary Clinton revancharde…  

Mais là ne sont pas les seuls soucis des responsables Démocrates.

Si les chances de victoire du parti devaient en définitive être portées à l’automne prochain par un Joe Biden visiblement diminué physiquement et mentalement déjà aujourd’hui, peu nombreux sont ceux parmi ses partisans qui misent réellement sur sa longévité ou sa capacité à sortir les Etats-Unis d’une crise existentielle marquée par de longues années de division, les dizaines de milliers de morts et les incalculables dommages économiques et sociaux provoqués par le virus chinois.  

Comme en 1944 quand il fallut donner un colistier présentable à un Franklin Roosevelt miné par la maladie, trois mandats consécutifs et promis, si à nouveau réélu, à un quatrième de courte durée, le choix du candidat à la vice-présidence sur le ticket démocrate pourrait, en cas de victoire cet automne, se révéler dès lors plus déterminant pour l’avenir du pays et du monde que l’élection d’un président Biden.

Problème pour les Démocrates dans ce scénario: outre la piètre envergure, l’âge avancé et l’état physique et mental d’un Biden président, une galerie de portraits obligatoirement féminins (une promesse de campagne du candidat) assez éloignés du profil d’un Harry Truman qui, de fait, allait succéder à Roosevelt 90 jours à peine après sa prestation de serment, dont Hillary Clinton déjà citée et une petite poignée gauchisante de bras cassés pour le seconder et, le cas échéant, hériter de sa charge en cours de mandat…

Isaac Franco est chroniqueur à Radio Judaïca Bruxelles – FM 90.2 les lundis de 17 à 18 heures (“Cherchez l’erreur”)  

(1) Le juge Brett Kavanaugh a été totalement lavé de ces accusations.

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