Muet sur l’occupation turque de la partie orientale de l’île de Chypre, Etat membre de l’UE, indifférent aux projets génocidaires de la théocratie iranienne qu’il traite avec tous les égards, et silencieux sur la responsabilité de la Chine dans la crise sanitaire et le désastre économique et social qui obérera longtemps les finances des membres de l’Union, c’est à l’Etat juif que son “Haut Représentant pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité” a réservé son humeur querelleuse.
En cause, la signature de l’accord de gouvernement entre le Premier ministre sortant Benjamin Netanyahou et Benjamin Gantz, son principal opposant tous ces 16 derniers mois d’impasse politique, dont une des clauses prévoit la présentation, à partir du 1er juillet prochain, du projet d’extension de la souveraineté d’Israël sur la Vallée du Jourdain et l’ensemble des implantations de Judée Samarie au vote de l’assemblée parlementaire. Les provisions du Deal of the Century dévoilé à Washington le 28 janvier accordent en effet d’emblée 30% de ce territoire à l’Etat juif tandis que le solde des 70% est réservé à un Etat palestinien démilitarisé dont la création à l’horizon de quatre ans sera subordonnée à une série de conditions.
Il en résultera un communiqué – désavoué par 8 des 27 partenaires du bloc européen et dès lors sans réelle portée compte tenu des règles de l’Union qui imposent l’unanimité en matière de politique étrangère – avertissant Israël de sanctions sévères s’il avait le front de passer des intentions à l’acte au motif que “les colonies israéliennes en territoire palestinien occupé sont illégales au regard du droit international”.
Et une menace, celle du président français, de repenser les liens de son pays avec Israël
Et une menace, celle du président français de repenser les liens de son pays avec Israël, convoyée par son ambassadeur à l’ONU Nicolas de Rivière : “L’annexion constituerait une violation flagrante du droit international, qui interdit strictement l’acquisition par la force de territoires occupés… De telles mesures, si elles sont mises en œuvre, ne passeront pas sans contestation et ne seront pas négligées dans nos relations avec Israël”.
A tous ceux qui, comme Nicolas de Rivière ou Josep Borrell, fantasment sur un Etat d’Israël sous tutelle européenne, dénoncent l’occupation et la judaïsation de Jérusalem et ânonnent depuis des lustres l’illégalité de ces villes et villages israéliens de Judée Samarie, le centenaire de la Conférence de San Remo vient rappeler quelques vérités fondamentales volontairement oubliées.
Dans les mots de Chaim Weizman, premier président de l’Etat d’Israël: “San Remo est le momentum politique le plus important de notre mouvement et, peut-être, de toute l’histoire de notre peuple depuis l’exil”.
Ce que ces excellences feignent en effet d’ignorer (ou, pire, ignoreraient vraiment), c’est que ce rendez-vous diplomatique des Puissances Alliées du 19 au 26 avril 1920 dans la petite ville balnéaire de la côte ligure, est l’une des conférences de paix qui, au lendemain du premier conflit mondial et de la défaite de l’Empire ottoman, allaient créer un nouvel ordre mondial fondé sur le droit à l’autodétermination des peuples. Que celle de San Remo allait confier à la Grande-Bretagne un mandat avec pour objectif le rétablissement en Palestine “d’un foyer national pour le peuple juif sur la base de son lien historique avec la Palestine, étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter préjudice aux droits civils et religieux des communautés non-juives de Palestine, ou des droits et statuts politiques dont jouissent les Juifs dans tout autre pays”, tel que défini par la Déclaration Balfour du 2 novembre 1917.
Et, aussi, que ce mandat, ratifié le 24 juillet 1922 par la Société des Nations, ancêtre de l’ONU, spécifiait les contours géographiques du territoire sur lequel les Juifs – reconnus comme peuple et plus seulement en tant que communauté religieuse – allaient pouvoir reconstruire leur foyer national. Couvrant l’Etat d’Israël dans ses “actuelles limites internationalement reconnues”, la Judée Samarie et le territoire qui allait plus tard devenir la Transjordanie puis la Jordanie, la superficie originellement promise à la mise en place du foyer juif allait être amputée de cette dernière partie le 16 septembre 1922 avec le vote du Conseil de la SDN d’une résolution agréant la proposition britannique d’exclure ces 78% du territoire de la Palestine. Restaient alors, et restent encore à ce jour, dévolus au peuple juif ces 22% résiduels comprenant la Judée Samarie…
Cent ans plus tard, la véritable tragédie est moins dans une question “palestinienne” encore sans réponse que dans l’amnésie collective volontaire des fondements du droit inaliénable d’Israël – expression politique du peuple juif – sur toute la Judée Samarie proclamé à San Remo et dûment entériné par la communauté internationale en 1922, et préservé dans l’article 80 de la Charte des Nations-Unies (1) en 1945. Et dans cette prophétie auto-réalisatrice (2) qui voudrait que des torrents de résolutions de l’Assemblée générale ou du Conseil de sécurité des Nations Unies fabriquent du droit international et privent l’Etat juif d’un droit auquel lui seul peut, s’il y consent librement, renoncer, en tout ou partie…
Cent plus tard, la tragédie est de marteler tel un pivert fou, que “la seule façon d’apporter une paix durable dans la région est la solution à deux Etats” (3) telle que l’imaginent les petits messieurs à particule du Quai et leurs épigones de la diplomatie internationale. Comme si elle seule conditionnait la fin des guerres au Yémen et en Syrie, le devenir des peuples infortunés d’Irak, du Liban et d’Iran et celui d’une région partout ailleurs instable…
Le soupçon vient alors que leur frustration résulte moins de la faillite désastreuse de tous les Etats arabes artificiels créés à l’époque dans ce même processus de démantèlement de l’Empire ottoman, que du succès aveuglant du seul projet sioniste.
L’Europe, ou l’amour de l’échec.
Israël, ou comment répondre du crime d’avoir, lui seul, réussi…
Isaac Franco est chroniqueur à Radio Judaïca Bruxelles – FM 90.2 les lundis de 17 à 18 heures (“Cherchez l’erreur“)
Vous vous trompez d’arguments, Isaac Franco.
D’abord par « approximation » pour ne pas dire autre chose.
Car aucune instance ou puissance avant 1947 (Ni Sykes-Picot, ni Balfour au nom de l’Empire britannique, ni San Remo, ni la SDN) n’a accordé au « foyer national juif » des frontières précises ; certainement pas comprenant la Transjordanie.
Cela est resté, à dessein, bien vague.
La première carte de frontières agréée par une instance internationale fut celle jointe à la décision de l’ONU de 1947 et qui accordait au futur Etat juif un territoire étriqué ; certes moindre que celui d’aujourd’hui, mais aussi moindre que celui qui précéda la guerre des six jours de 1967.
Se fonder sur les « instances internationales » comme argument juridique est contre-productif et faux. L’Etat juif s’est fait tout seul avec ses soutiens ; loin d’exister à cause de ces instances, il existait toujours malgré elles.
La glorification par Weizmann et les siens des déclarations de Balfour et des « puissances » (relayée ici par Franco) était erronée, au service d’intérêts personnels et à terme nuisible.
Elle permet, encore aujourd’hui, de décrire Israël comme une créature des empires coloniaux européens. Pourquoi la ruminer encore ?
Car, il faut les placer, surtout Balfour, dans le contexte, à savoir la politique britannique (et un peu française) face à l’imminente perspective en 1917 du dépeçage de l’empire ottoman.
Ne pas oublier que simultanément l’empire britannique (cf. Lauwrence d’Arabie) cherchait à promettre, et pas qu’aux Juifs, tout à tous, mettant en place moult royaumes et principautés arabo-musulmans afin de pratiquer le bon vieux « diviser pour régner ».
TOUS les pays du Proche-Orient (peut-être sauf l’Egypte) sont nés de cette politique ; Israël probablement moins que les autres.
Oublions donc Balfour, San Remo et le reste. Hors sujet, inutile, nuisible.
Concernant l’attitude européenne (notamment française) à l’égard de la possible annexion (putative…) par Israël de territoires « palestiniens », il conviendrait de demander à la France que fait une force expéditionnaire française de plusieurs milliers d’homme en Afrique occidentale jadis française.
En vertu de quoi la France occupe des territoires de pays africains qui n’ont rien demandé (le Mali en premier) et qui sont de plus en plus réticents à ça ?
La Françafrique a-t-elle le droit de critiquer Israël (ou quiconque…) pour quoi que ce soit dans ces conditions ?
Très bon article. La diplomatie européenne est depuis pas mal d’années aux mains d’extrémistes : le cas Federica Mogherini était déjà symptomatique voire alarmant.
@Alexa vous semblez ignorer que l’armée française n’occupe pas le Mali et qu’elle s’y trouve précisément parce que les Maliens l’ont demandé