Lanceurs d’alerte chinois : ils ont été punis, ont disparu ou sont morts pour avoir voulu nous prévenir.
Nous avons vu dans mon papier du 18 avril comment les autorités chinoises refaisaient, pépères, l’Histoire de la Pandémie, donnant des chiffres faux et contredits par les photos montrant la forte affluence, fin mars, dans les funérariums de Wuhan, où les habitants venaient chercher les cendres de leurs proches morts durant les deux mois de confinement, images qui nous avaient tous laissés perplexes quant à la véracité du bilan officiel. Se livrant à une improbable gymnastique pour préserver l’image du régime, allant jusqu’à tuer dans l’œuf les Chinois un peu trop bavards.
Juste des lanceurs d’alerte: le pire aurait-il pu être évité …
Ces voix dissidentes dont je vous ai entretenus, Eux, citoyens lambda condamnés dans le meilleur des cas à verser des amendes lorsqu’ils ne furent pas arrêtés, qu’avaient-ils commis comme crime de lèse-majesté, sinon de signaler sur Internet d’étonnantes et inhabituelles files d’attente dans les hôpitaux, des pénuries de masques, puis la mort de membres de leur famille.
Les lanceurs d’alerte, eux dont je vous ai aussi entretenus et qui tirèrent la sonnette d’alarme sur la dangerosité du virus, où sont-ils ? Que sont-ils devenus ?
Quelque 5000 à avoir été arrêtés
Sachez-le : ils furent quelque 5000 à avoir été arrêtés pour avoir partagé en ligne des informations sur le virus. Arrêtés ? Oui : le Pouvoir a décrit ces lanceurs d’alerte comme des malades, et les a placés en … quarantaine.
Docteur Li Wenliang
Je vous ai conté l’arrestation et la réprimande du docteur Li Wenliang, 34 ans, et de sept autres de ses collègues qu’il avait avertis, via WeChat, dès le 30 décembre, de l’apparition d’un mystérieux virus, proche du SRAS : Plusieurs patients présentant des symptômes similaires avaient été admis à l’hôpital de Wuhan où exerçait Li Wenliang, en qualité d’ophtalmologue.
Pour avoir conseillé à ses collègues de porter des masques et des vêtements de protection, Li Wenliang fut arrêté, puis relâché après avoir signé sous la contrainte de la police une lettre reconnaissant qu’il avait perturbé l’ordre social.
Avant d’être emporté le 7 février à l’âge de 34 ans par le Covid-19, Li Wenliang eut le temps de rendre public le procès-verbal de cet interrogatoire : il lui était clairement demandé de cesser ces actions illégales sous peine d’être poursuivi par la loi. Ses collègues et tous les lanceurs d’alerte subirent le même sort : La répression à grande échelle avait commencé sous nos yeux avertis mais indifférents.
Le journaliste et YouTuber Chen Qiushi
La veille du décès du Docteur Li Wenliang, le journaliste et YouTuber Chen Qiushi – qui avait partagé avec ses 400.000 abonnés sur YouTube des vidéos de scènes chaotiques dans des hôpitaux de Wuhan, a lui aussi mystérieusement disparu. Sa famille sut le lendemain qu’il était, à son tour, maintenu en quarantaine dans un lieu gardé secret. N’avait-il pas écrit à ses abonnés : Tant que je vivrai, je parlerai de ce que j’ai vu et de ce que j’ai entendu. Je n’ai pas peur de mourir. Pourquoi devrais-je avoir peur de toi, Parti communiste?
Fang Bin, commerçant
Fang Bin, lui, est un commerçant en textile. Il avait avait mis en ligne une vidéo montrant des piles de sacs mortuaires dans un hôpital de Wuhan. La vidéo eut le temps d’être visionnée plus de 200.000 fois avant que la censure ne fît son travail. Dans une nouvelle video, notre homme récidiva en appelant à la résistance citoyenne et à la chute du pouvoir en place : On ne l’a plus revu depuis.
Li Zehua, journaliste
Le journaliste Li Zehua a pour sa part diffusé en direct sa propre arrestation lorsque des policiers en civil débarquèrent dans son appartement : il était coupable d’avoir visité et filmé un laboratoire à Wuhan d’où, selon certaines rumeurs, le virus se serait échappé.
Ren Zhiqiang, qui traita Xi Jinping de … clown
Le milliardaire Ren Zhiqiang a disparu en mars, juste après avoir traité le président Xi Jinping de clown parce qu’il aurait mal géré la situation lorsque le virus apparut. Le voilà, lui, détenu officiellement pour violations graves des lois et règlements du Parti.
Xu Zhangrun, Professeur
Le Professeur Xu Zhangrun a également été placé en résidence surveillée à Pékin : son accès Internet a été coupé. N’avait-il pas écrit un article fort critique sur la politique du président chinois, le concluant de ces mots : C’est peut-être mon dernier article.
Huang Yanling, Chercheur
Où est passée Huang Yanling ? Elle dont je vous avais dit que, Chercheur au laboratoire de l’Institut de Virologie, elle fait partie de ceux, nombreux, qui se sont évaporés dans la nature. Des collègues la donnèrent pour le fameux patient zéro du Covid-19, affirmant que Huang serait morte de la maladie, mais la presse officielle chinoise répondit que la jeune femme travaillait désormais dans une autre province. Quant à l’Institut de virologie, après avoir dans un premier temps, nié la présence de la chercheur parmi ses équipes, il dut bien la reconnaître, son nom ayant été trouvé sur le site internet. Sa photo, elle, avait disparu.
Ai Fen, Directrice des urgences à l’hôpital central de Wuhan
Où est passée Ai Fen, cette Directrice des urgences à l’hôpital central de Wuhan, qui en savait trop elle aussi : elle fut sommée par le chef de l’établissement de cacher la nouvelle même à son mari. Depuis ? Depuis, Ai Fen a bien posté une vidéo d’elle en blouse blanche, une video où elle jure que tout va bien, démentant ainsi les rumeurs sur sa disparition. Une video qui fit dire à nos collègues de RSF, inquiets du sort de trois journalistes chinois, Chen Quishi, Fang Bin et Li Zehu, qui enquêtaient à Wuhan, qu’ils espéraient qu’il ne s’agissait pas là … d’une mise en scène du régime.
Que sont-ils devenus ? Ils seraient enfermés dans des centres de détention secrets : y avoir un avocat est interdit. La torture y serait pratiquée.
Depuis la mort du Docteur Li, quelque 1,4 million d’abonnés en colère viennent se recueillir sur sa page du réseau social Weibo, appelée par d’aucuns le mur virtuel des lamentations chinoises, et y dénoncent les ratages originels du régime face au virus mais surtout la réécriture de l’histoire de l’épidémie par la propagande, qui a le front de parler de victoire du Parti dans cette guerre patriotique, le tout sous la houlette du président Xi Jinping.
Pour info, l’ONG Human Rights Watch, par la voix de son directeur Kenneth Rotha, a accusé Pékin de faire taire les critiques sur la riposte chinoise à l’épidémie de pneumonie virale, et a encore dénoncé l’élimination de rapports sur le virus en Chine au cours des premiers jours de l’épidémie.
Il s’agit de la chine et non d’Israel: donc tout lui sera autorisé
« selon que vous serez puissant ou miserable les jugements de cour vous feront blancs ou noirs »