C’était il y a déjà trois ans.
C’était il y a seulement trois ans.
C’est selon.
C’était en 2017, donc. Il est, au moment où j’écris, vingt-deux heures et nous sommes un vendredi. Nous sommes le 3 avril 2020.
Le 3 avril 2017 était un lundi.
Sans savoir beaucoup plus que vous de la vie de Sarah Halimi, j’imagine que ce soir-là, la jeune retraitée – et non cette vieille femme, comme on put souventes fois le lire – cette jeune retraitée, donc, qui dirigea une crèche, vaquait comme vous et moi à quelque occupation avant de se coucher.
Avait-elle regardé un film, une émission sur son téléviseur ? Nous ne le saurons pas.
Donna-t-elle quelque coup de fil à un proche ou bien en reçut-elle un : nous ne le savons pas.
William Attal, son frère, me disait qu’il voulait savoir quelle était exactement la météo de cette nuit-là. Nous le saurons, nous chercherons, nous raconterons.
Ce qui est certain, c’est que Sarah Halimi fut brutalement arrachée au sommeil par un individu entré chez elle par effraction vers 4 heures du matin.
Un individu dont on tremble à seulement imaginer ce que ressentit cette femme lorsqu’elle put reconnaître celui qui allait devenir son bourreau, son assassin : ce voisin qu’elle avait déjà dit craindre de croiser, cette petite frappe surnommée Bébé par ses parents et ce malgré un passé marqué par moult séjours en prison, pour des faits qui n’avaient rien d’anodin.
Le petit malfrat qui alternait séjours en prison et périodes à la rue de Vaucouleurs, on sait, parce qu’elle s’en était ouverte à ses proches, que Sarah Halimi redoutait de le croiser, qu’elle fût seule ou accompagnée de ses petits-enfants : le voyou n’aimait pas les Juifs, or Sarah Halimi était juive orthodoxe, et notre homme le savait.
Il est 4 heures donc lorsque, pénétré chez elle par la fenêtre du balcon qu’il prétendit avoir trouvée ouverte, Kobili Traoré va s’acharner sur sa proie, la lynchant, la fracassant.
Il est 4 heures lorsque, pénétré chez elle, il affirmera à tout un chacun et répète encore que cela fut le fruit du pur hasard et que, quittant un ami après avoir consommé moult substances, il emprunta le seul chemin possible pour arriver sur la terrasse de la Juive du quartier.
Il prétendra s’être aperçu, étonné par la présence d’un chandelier et d’une torah, que sa proie était juive : il ne le savait pas, cet ange.
Alors, me direz-vous, pourquoi ?
Pourquoi frappa-t-il pendant d’interminables minutes ce corps qu’il finit par jeter, fracassé et toujours vivant, par la fenêtre, sous le regard horrifié et impuissant de voisins attirés par les hurlements et de … forces de police présentes sur les lieux mais qui ne reçurent pas ordre d’intervenir et de peut-être, et même assurément, sauver Sarah Halimi.
Pourquoi. Pourquoi. Pourquoi.
Seul une enquête et un procès en Cour d’Assises permettra de répondre et de rendre justice à Sarah Halimi, tuée parce que Juive.
Tuée ? Non : assassinée. Chacun en effet sait aujourd’hui que Kobili Traoré passa de longues heures à la Mosquée Jean-Pierre Timbaud, dite Mosquée Omar, connue fort péjorativement pour ses prêches salafistes et pour avoir abrité nombre d’apprentis djihadistes traînée depuis en justice.
Mais la Mosquée ne fut pas investiguée. Pas plus que ne le fut le téléphone du meurtrier.
Pas plus que la parole ne fut donnée à la famille de Sarah Halimi.
Souvenez-vous que les choses se firent de la façon la plus étrange qui fût, par le biais d’auditions menée de façon inédite et le plus souvent par ordonnances sous le couvert de la Juge Anne Ihuellou.
N’oubliez jamais que la circonstance aggravante de mort donnée en raison de la religion fut débattue, et encore discutée, pour être enfin, un jour, accordée comme une aumône à un pauvre.
Sachez que la requalification en assassinat ne fut jamais accordée.
N’oubliez pas, enfin, qu’à ce jour, laissant sidérés tous les plaignants, l’auteur des faits fut déclaré irresponsable et donc inapte à être jugé, comme d’ailleurs il fut trouvé incapable de souffrir quelque reconstitution, son pauvre état ne le permettant pas…
N’oubliez jamais la bataille d’experts entre la notion d’abolition ou d’altération du discernement du garçon.
Gardez mémoire que Daniel Zagury déclara que lui, expert reconnu en France, remettrait immédiatement en liberté ce Traoré s’il se présentait en consultation : nous l’entendîmes tous, en effet, maître de ses propos, calme, voire réfléchi.
Sachez que la famille de Sarah Halimi, son fils, ses deux filles, ses petits-enfants, son frère et sa sœur, attendent aujourd’hui que la Cour de Cassation, interpellée par leurs Conseils, se prononce : le dossier alors sera clos et ouvrira la pire erreur judiciaire française qui fût, ou alors, – et nous voulons encore y croire, décrètera la tenue d’une Cour d’Assises devant laquelle comparaîtra Kobili Traoré, accordant à un jury populaire de répondre aux questions restées sans réponses et de se prononcer.
Hier 2 avril, se sont tenues en Israël les prières des 3 ans de la mort de Sarah Halimi.
Demain, 4 avril, cela fera 3 ans qu’une femme juive fut jetée vivante par la fenêtre, parce qu’elle était juive, parce qu’elle était juive, parce qu’elle était juive, parce qu’elle était juive, parce qu’elle était juive, parce qu’elle était juive, et de ce qu’ils appelèrent dans un premier temps un fait divers, les media mirent un temps fou à en parler.
N’oubliez jamais, Restez vigilants. Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l’oreille, On parle de Vous, disait Maurice Fanon.
La phrase finale est de Frantz et non pas de Maurice. A corriger.