Pour Elles, que d’emblée je veux qualifier de harpies, si vous dites votre estime pour le talent de réalisateur de Roman Polanski ou les qualités d’acteur de Jean Dujardin, vous serez une traitresse ou un beau salopard, taxé de complicité de pédophilie, de frère du camp du Mâle, et jeté en pâture à leurs pareilles. Enfin : c’est ce qu’Elles nous promettent.
A l’heure où je boucle ce papier, Harvey Weinstein vient de se voir signifier une sentence honnête, quelque vingt-trois ans de prison, mais je doute qu’Elles acceptent de faire soigner leur paranoïa et de jamais admettre que la libération de la parole des femmes pût ne pas se faire au prix de toute pensée divergente. Qu’elles auraient pu, les péronnelles, être féministes et féminines. Militer pour les droits des femmes aux côtés des Hommes.
Elles nous donnent furieusement envie de les bouter hors d’ici. De nous ressaisir du beau mot de féminisme, pour qu’il ne devienne pas, entre leurs seules mains, l’instrument de la revanche la plus épaisse. Pour qu’il re-devienne celui d’une émancipation.
Elles ont voulu nous faire accroire, ces femmes sans cervelle, que le cinéma avait récompensé un pédocriminel, Salle Pleyel, et c’est pourquoi elle nous a fait tant chaud au cœur, le 8 mars, la Tribune de ces 114 avocates et pénalistes qui, confrontées chaque jour à la douleur des victimes mais aussi à la violence de l’accusation, décident, concernant l’Affaire Polanski, de défendre la présomption d’innocence[1], comme le firent ici-même, l’un après l’autre, un Pierre Saba, un Frédéric Sroussi ou un Philippe-Emmanuel Toussaint, et comme le fit hier 10 mars Hervé Témime, redisant, lui, que Roman Polanski n’avait pas à être le symbole qu’il était devenu aujourd’hui.
Qualifiant les principes de prescription et respect de la présomption d’innocence de seuls remparts efficaces contre l’arbitraire, elles viennent, une semaine après la cérémonie des César marquée par la polémique Polanski et sommant chacun d’entre nous de se positionner entre défenseurs du réalisateur et partisans d’Adèle Haenel et sa bande, cette Tribune comme les paroles de Maître Témime, rappeler à raison qu’aucune accusation n’est jamais la preuve de rien et que Roman Polanski n’est pas le coupable qu’Elles nous décrivent avec force détails, à croire qu’elles avaient toutes été violées par le même.
Elles furent bienvenues, ces récentes interventions, car elles eurent le mérite de briser le cercle infernal de la parole unique, puisqu’à J+12 de la soirée des César, nous voilà tous contraints à entendre les cris et autres lamento d’une foule de passionarias qui suit docilement celle qui en serait devenue l’égérie, celle qui croit avoir libéré la parole empêchée des femmes violées, depuis qu’Elle est, Elle, sortie de la Salle Pleyel, se voulant outragée mais en réalité devenue aussitôt pauvre caricature d’un geste qui se crut éclatant. Sortie, donc, de la célèbre Salle, parce que Roman Polanski fut désigné … Meilleur Réalisateur.
Sortie, disé-je, se croyant altière guerrière, suivie timidement d’une poignée d’autres, quittant les lieux salis pour rejoindre une meute de semblables, hystériques faisant le pied de grue devant ladite Salle, ce Collectif #NousToutes hurlant … Violanski Violanski.
Qui sont ces gens, demanda, ébaubi, un Lambert Wilson ?
Qui sont ces femmes, lui répondé-je en écho ? Et comment en sommes-nous arrivés là, si vous me dites qu’ils sont, ces visages haineux et grimaçants, ceux des neo-féministes qui auraient in fine réalisé une sorte de rapt, de prise en otage des combats féministes menés jusqu’alors, guidés jadis par la noblesse d’une Simone Veil et aujourd’hui par la grâce déterminée d’une Chimamanda Ngozi Adichie[2].
Avec Elles, nous n’avons qu’un point commun, et pas des moindres : se féliciter qu’aujourd’hui la parole des victimes fût facilitée, prise en compte, et là est le mérite des mouvements metoo et autres Balance ton porc.
Nos affinités s’arrêtent là. Définitivement. Car elles, activistes déchaînées, elles n’entendent pas cueillir aujourd’hui les fruits de cette victoire : non. Elles veulent davantage : dans une guerre à toute la gent masculine et à toutes celles qui oseraient ne pas suivre leur élan pathologique, ces furies, réunies par une radicalité assumée mais encore par une parole antisémite revendiquée, elles ont fait de cette cause le centre de leur vie, lancées qu’elles sont dans une guerre grotesque à l’autre sexe.
Qui sont ces femmes. Amies entre elles. Génération Instagram Liée par une idéologie haineuse. Qui font la guerre aux hommes, à tous les hommes, mais encore aux femmes qui ne les suivent pas. Qui sont ces femmes dont la colère est laide, grimaçante, ces femmes qui, à bien les regarder, se ressemblent toutes. Liées par ladite sororité. N’ayant de cesse que de nous donner, à tous, des leçons.
Pensant pareil. Disant pareil. Commençant leurs phrases par « de base », et les ponctuant de « voilà, quoi », sœurs de combat truffant leurs propos de mots parasites. Ces tics verbaux desquels Balzac disait qu’ils servaient de signal de reconnaissance sociale et générationnelle, et que le psychiatre Yves Prigent qualifie de … scories, permettant de nous retrancher derrière des barricades verbales … dépourvues de signification.
Ecrivant certainement en … écriture inclusive.
Qui sont ces égarées, dont les cris déchaînés et les traits déformés s’acharnent à imposer une autre image du combat féministe. Ces idéologues au regard hagard. Qui ne semblent avoir de cesse que de dresser la liste. Celle des prédateurs. Y mêlant, dans un empressement dicté par une colère folle, tout : les hommes. Pourvu qu’ils soient blancs et dotés d’une certaine réussite. Suspecte toujours à leurs yeux. Qui sont ces femmes. Dépourvues du RSA de la subtilité. Demandant pour certaines que Polanski fût … gazé.
Regardez plutôt. Elle, Adèle H, qui, en 2014, capable qu’elle était donc à l’époque de séparer … l’homme et l’œuvre, déclarait à Télérama que son auteur préféré était … Louis-Ferdinand Céline…
Adèle H, c’est celle qui s’est … levée. Levée, rendez-vous compte. Levée et puis partie, quittant la salle au moment où le violeur fut annoncé Cesar du meilleur réalisateur. Sans doute pensa-t-elle être suivie dans cet élan par la moitié de l’auditoire. Ne la suivirent que quelques-uns. Quelques-unes. La réalisatrice Céline Sciamma, forcément. Forcément.
Mais pourquoi donc sont-elles venues, ce soir-là. Fallait pas en être, de cette assemblée ou le risque que fût prononcé le nom du violeur, juif de surcroît, était grand. Fallait marquer sa désapprobation en laissant vide son fauteuil. Fallait Dire Non. A l’instar du … pleutre Brad Pitt qui refusa le César d’honneur, Cuvée 2020, beurk beurk Beurk. Il avait dû se dire : ça pue, ce truc, ça sent le sperme de Polanski
Pourquoi la choisirent-elles, la plus jolie parure, les Louboutin casse gueule: N’est pas Fanny Ardant qui veut. Belle dans une chemise blanche et une jupe. Belle dehors car … belle dedans
Fallait rester chez soi: Nominé 12 fois, le nom du cinéaste avait 12 chances d’être dit et donc de porter l’offense à tout ce qui est, selon elle, femme: puisqu’à les voir, à les entendre, nous avions bien saisi qu’elles auraient toutes toutes été violées par Polanski. Et moi qui ne le savais point.
Après ce coup d’éclat qui consista à … quitter les lieux, elles se répandirent en interviews. La presse ?
Oui mais. Pas n’importe laquelle. Nos neo-Féministes, elles parlent au New York Times, l’un des titres les plus xénophobes qui fût, mais encore aux Inrocks, à Libé, Mediapart bien sûr, et comme attendu, voilà Télérama qui vint leur porter soutien. Comme ils le firent tous pour ce pauvre Mehdi. Mehdi Meklat.
Ovationnée par l’autre, l’autrice, Virginie, dont la Tribune fut qualifiée de … Tribune choc. N’avait-elle pas résumé ainsi le nouvel héroïsme : On se lève et on se barre. L’autrice ? Accusée aujourd’hui à son tour par une actrice de harcèlement[3], Elle en a dit et écrit, des fadaises. Et pire encore. Notamment après les attentats. Elle aimait tout le monde, elle. Même les frères Kouachi : Elle est autrice, vous comprenez. Alors voilà. Elle écrit ça[4]. Ces lignes folles : Et j’ai été aussi les gars qui entrent avec leurs armes. Ceux qui venaient de s’acheter une kalachnikov au marché noir et avaient décidé, à leur façon, la seule qui leur soit accessible, de mourir debout plutôt que vivre à genoux. […] J’ai aimé aussi leur désespoir. Leur façon de dire – vous ne voulez pas de moi, vous ne voulez pas me voir, vous pensez que je vais vivre ma vie accroupi dans un ghetto en supportant votre hostilité sans venir gêner votre semaine de shopping soldes ou votre partie de golf – je vais faire irruption dans vos putains de réalités que je hais parce que non seulement elles m’excluent mais en plus elles me mettent en taule et condamnent tous les miens au déshonneur d’une précarité de plomb. […] Je les ai aimés dans leur maladresse – quand je les ai vus armes à la main semer la terreur en hurlant “on a vengé le Prophète” et ne pas trouver le ton juste pour le dire.
Atterrée en vous contant cela, je me demande comment nous avons pu, moi la première, qui me suis battue avec d’autres pour que fût censurée la pièce de Mohamed Kacimi sur les dernières heures de Mohamed Merah, laisser passer cela. Ces lignes de Virginie Despentes.
Laquelle, dans sa Tribune déjantée, hagarde, toute naze, déformée par la haine et ne pouvant qu’être écrite par un esprit dérangé, mêla tout, s’adressant aux puissants, aux boss, aux chefs, aux gros bonnets. On vous entend jouir de ce que vous êtes les vrais patrons, les gros caïds. Parlant … d’orgie d’impunité. De gens sourds à la voix des opprimés. Mélangeant étrangement cinéma, idéologie et recours au 49-3. Parlant aussi, et beaucoup, d’argent. Du respect dû aux plus riches, un respect qui s’étendra désormais jusqu’à leurs bites tachées du sang et de la merde des enfants qu’ils violent. Elle leur dit Elle nous dit qu’on veut exiger le silence des victimes. Par quelque moyen que ce fût. La terreur. La frappe monétaire. C’est terminé. On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde.
Philippe Lançon parla de l’objet de leur détestation, Roman Polanski. De procès expéditif et de confondante ineptie, rejoint par Géraldine Ketz qui conclut que Nous n’avions plus besoin des tribunaux depuis que nous avions les César[5]… Cette chasse à l’homme fort justement résumée par Michel Ciment, critique de cinéma: Ce qu’on voulait, c’était que Roman Polanski disparût, on voulait qu’il restât Violanski. Le rêve, c’était que Polanski fût rayé de l’histoire du cinéma. Alain Finkielkraut voyant lui aussi dans tout ça férocité, laideur et rire barbare. Citant ces mots de Tristan Bernard au début de l’Occupation : À Cannes, on bloque les comptes et on compte les Bloch.Lambert Wilson parlant de terrorisme. D’une espèce de tribunal. De lynchage public. Patrick Chesnais ajoutant : Je suis effondré et révolté. Isabelle Huppert citant Faulkner : Le lynchage est une forme de pornographie… Barbara Lefebvre faisant mine de s’étonner: Rien à charge contre Ladj Ly, tout à charge contre Polanski. Ajoutant que le tribunal de la rue était Toujours un tribunal fasciste. Concluant : Je suis tentée même de penser que le ressentiment antisémite s’exprime sans entraves dans la haine contre Polanski.
Non décidément. Laissons ces irrécupérables et poursuivons
notre chemin. Soyons, aux côtés des hommes, comme l’auteur nigérienne, des féministes
heureuses qui mettent du brillant à lèvres et des talons hauts[6].
Rappelons-nous que ni Roman Polanski, ni Woody Allen ne sont, aujourd’hui, sous
le coup d’une quelconque procédure.
[1] Le Monde.
[2] Nous sommes tous des féministes. Folio. Décembre 2019.
[3] Valeurs actuelles. 9 mars 2020 .
[4] 17 janvier 2015. Les Inrocks.
[5] Géraldine Ketz. La Règle du jeu. N° 69-70.
[6] Nous sommes tous des féministes. Folio. Décembre 2019.
Précisons : dire, comme cet article, que Polanski et Woody Allen ne sont « aujourd’hui, sous le coup d’une quelconque procédure » est vrai pour le second mais faux pour le premier.
Woody Allen, à 84 ans, n’est effectivement accusé par la Justice de rien ; et non par défaut.
Des commissions d’enquête officielles spécialisées dans la maltraitance à l’égard d’enfants des Etat US de New-York et du Connecticut ont conclu à la nullité des accusations contre lui lancées par son ancienne compagne Mia Farrow, dont les motivations pourraient relever d’une jalousie maladive sinon de la psychiatrie.
Notons que cela n’a pas empêché Hachette de céder au chantage en refusant la publication de ses mémoires. Nous sommes clairement dans une chasse aux sorcières ; un lynchage public au grand jour aux motivations commerciales non-avouées ; un nouveau Maccarthisme attisé par des Walkyries hystériques en carton-pâte.
C’est plus compliqué pour Polanski. Il n’existe certes aucune procédure à son encontre en France ; MAIS il ne mettra jamais les pieds aux USA vu qu’il y serait arrêté immédiatement.
Il y a donc bel et bien une procédure ; même si son bien-fondé prête à controverse.
Par ailleurs l’article, comme d’autres, caractérise l’attitude de certain(e)s à l’égard de Polanski de « revanche ». Mais pourquoi ?
Comment ne pas évoquer la théorie freudienne, expliquant certaines attitudes de femmes à l’égard des hommes par la petite fille qui constate, surprise, que les garçons sont dotés d’un membre qu’elle n’a pas ?
Et qui chercherait, toute sa vie, à se venger ?
Cet éclairage explique certains comportements « féministes », aux motivations manifestement irrationnelles et inavouables.
Freud est souvent violemment contesté par elles ; et elles ne cessent de lui donner raison.
Avez vous lu Francoise Lheritier ?
Elle s’appelle Héritier (et non Lheritier).
L’ai-je lu ? Non. Me suis-je intéressé à ses dires en ayant lu des extraits et des commentaires ? OUI.
Globalement :
1) Que je sache elle ne contredit pas Freud sur la question par moi citée. Elle est hors sujet sur ça.
2) Ses prises de position étaient parfois idéologiques, voire politiques, et pas toujours corroborées par l’observation.
Etre ethnologue ET féministe me semble une contradiction dans les termes.
Tout comme être ethnologue et ANTIféministe.
Tout comme être scientifique et propagandiste.
Pour ma part j’aurais voulu (mais c’est trop tard…) qu’elle m’explique la longévité (très) supérieure des femmes, PARTOUT sur la planète ; ça fait voler ses théories en éclat et illustre clairement le privilège naturel des femmes.
Tout comme sa tentative de raconter que les différences de masse corporelle entre hommes et femmes, toujours PARTOUT sur la planète, sont d’origines culturelles, et non biologique.
Oubliant que chez nos cousins mammifères, et surtout les grands singes qui nous en sont les plus proches, ces différences sont encore plus importantes que chez nous sans AUCUNE exception…
Ce petit passage de Wikipedia me semble suffire pour la mettre à sa place : “En juillet 2011, elle intègre l’équipe de campagne de Martine Aubry pour l’élection présidentielle de 2012, chargée avec Caroline De Haas de la thématique « Femmes »… En 2012, avec plusieurs autres intellectuels, elle rédige un article dans Le Monde en faveur du candidat à la présidentielle François Hollande intitulé « Pourquoi il faut voter François Hollande », dans lequel elle développe les « raisons impératives d’élire François Hollande Président de la République ».
Dites-moi qui sont vos amis et je vous dirais qui vous êtes…
Ses amis à elle ? Martine Aubry, Caroline De Haas, François Hollande….
Toute la bienpensance visqueuse et dégoulinante de bonnes intentions comme le chemin de l’enfer.
Comme quoi, on peut être bardé de diplômes et avoir pondu un paquet de papiers « scientifiques » ET être stupide comme ses pieds.
Avec Hollande et Macron le terme “médiocratie” prend en effet tout son sens. Je pense d’ailleurs que toute société démocratique (à quelques exceptions près ? ) est condamnée à évoluer vers une médiocratie qui est également une post-démocratie. Ce que Nietzsche avait déjà annoncé il y a plus d’un siècle.
Merci pour cet article pertinent et juste de A à Z. Je like 10.000 fois.
A noter l’abjection absolue d’une partie de la presse française (L’Obs Libé etc) qui fait l’éloge de ces imbuvables individus. La presse hexagonale est globalement l’une des pires au monde : en terme de démagogie et de désinformation, elle réussit à battre les réseaux sociaux sur leur propre terrain. J’ai d’ailleurs perdu toute estime pour Caroline Fourest qui défend Despentes et Foresti. En revanche, attitude digne et intelligente de Natacha Polony, l’une des rares figures médiatiques honnêtes et cultivées.