Tribune Juive

Sarah Cattan. Affaire Halimi: la plume est serve, la parole est libre

Le Procureur Général est le supérieur hiérarchique du Procureur de la République, et ses instructions doivent être suivies par ce dernier. Du moins par écrit, car la plume est serve, la parole est libre : Ce principe s’attache aux Procureurs de la République, lesquels sont sous l’autorité du Ministère de la Justice.

Ce principe veut dire que cette autorité ne s’applique qu’à leurs écrits, et qu’ils sont libres de leurs réquisitions (qui sont orales) devant les juridictions.

Autrement dit, cet adage signifie qu’un magistrat du Parquet, s’il est lié par des instructions écrites de sa hiérarchie, qui en quelque sorte le menottent, a le droit de dire oralement ce qu’il pense.

A titre de rappel, L’affaire Ferrand…

Pour rappel, dans l’Affaire Ferrand, le Parquet s’était empressé de nous dire qu’il n’y avait rien à voir. Et, faisant fi des révélations du Canard Enchaîné, qu’on pouvait circuler. Le Premier Ministre  lui emboîta le pas, annonçant que rien ne se passerait s’il n’y avait pas de mise en examen.

Or, qui met en examen ? Un juge.

Un Procureur de la République n’est pas un Juge. Mais ce dernier, même si la Chancellerie clame le contraire, est soumis à sa hiérarchie. Cela veut dire que, pour un Juge également, la plume est serve. Les robes noires tiennent compte du pouvoir politique, du moment qu’il s’exprime … sous forme de circulaires notamment: Les Juges, chacun le sait, reçurent au sommet des instructions pour qu’aucune mise en examen ne se fît. Et le Parquet ? Aussi.

La plume est donc serve côté Juges comme côté Ministère public, et le Garde des Sceaux d’alors, François Bayrou, garda le silence : La parole était libre, bien sûr, mais les lèvres étaient closes, avait écrit le Prof De Guermont[1].

Tout le monde ne s’appelle pas Paul Didier

François Bayrou garda le silence, car tout le monde ne s’appelle pas Paul Didier, le seul magistrat à avoir refusé de prêter serment de fidélité à la personne du maréchal Pétain. Il avait décidé, conforté par la rigueur de ses convictions, que s’il devait n’y en avoir qu’un, il serait celui-là. Le lendemain, il était arrêté et devait être bientôt dirigé sur le camp d’internement du Camp de Choisel, parfois nommé Camp de Châteaubriant, qui laissa de si dramatiques souvenirs…

Retour à L’Affaire Sarah Halimi, une « Affaire signalée »

L’une des choses surprenantes, en l’Affaire Sarah Halimi, c’est précisément d’avoir un Réquisitoire écrit du Procureur de la République qui, sur la question de la responsabilité pénale du mis en examen, est contredit par le Réquisitoire du Procureur Général.

Cette affaire est suivie pas à pas : ce que l’on appelle une Affaire signalée, avec rapport du Procureur de la République au Procureur Général, à chaque nouvel épisode, et information immédiate de la Chancellerie.

Dès lors : Pourquoi cette position du Procureur de la République ? Une question que seuls les habitués de la boutique peuvent se poser.

Ma question au Parquet Général

Cette question reste légitime: qu’on nous explique pourquoi le Parquet Général, forcément au courant de la position du Procureur de la République, laisse faire. Et pourquoi il rend, de surcroît, des réquisitions opposées alors qu’il existe une subordination hiérarchique pour les écrits.

Mais encore ça

Où était le Parquet de Paris la nuit du crime ?

Pourquoi la circonstance aggravante liée à l’antisémitisme n’a-t-elle pas été retenue par le Réquisitoire introductif ?

Aucun élément nouveau dans le dossier quand il fait un supplétif: or on ouvre toujours a maxima, quitte à abandonner certaines circonstances aggravantes ou à disqualifier par la suite.

Cette Histoire concerne la communauté nationale. Et que l’on cesse de nous parler des inquiétudes Juives.


[1] Posté par Pont-Melvez Info. 31 mai 2017.

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