La psychiatrie décrit des comportements, des affects, des humeurs, des types de personnalités (diagnostic), ensuite elle les classe par catégories psychopathologiques (nosographie) et propose pour chacune d’entre elles un traitement approprié. La psychiatrie est une machine à nommer les choses dans un langage médical savant, les maladies mentales, et elle a deux outils à sa disposition, le diagnostic et les statistiques (fréquences d’apparition selon plusieurs critères, culturel, familiaux, génétiques, association de risques de dangerosité, passages à l’acte, suicide, addiction etc).
Mais ce que la psychiatrie n’explique pas et ce dont elle ne s’occupe jamais, ce sont les causes profondes des pathologies mentales. C’est la psychanalyse qu’il faut convoquer pour cette tâche.
Quelles que soient les critiques fondées que l’on peut légitimement formuler à l’égard de Freud, Lacan et Jung, les trois grandes figures marquantes, nous ne pouvons nous fier à la seule méthode statistique et descriptive de la psychiatrie pour établir un diagnostic solide et complet sur la personnalité d’un individu, encore moins lorsqu’il s’agit d’une personne qui a commis un crime barbare. La psychiatrie est un outil descriptif et statistique utile, un immense tableau Excel input/output, il permet d’affiner le diagnostic d’un point de vue strictement statistique et neurologique, mais sans l’apport de la lecture psychanalytique, il lui manque une dimension essentielle. La psychiatrie et la psychanalyse n’utilisent pas les mêmes concepts, ni les mêmes catégories pour établir un diagnostic. Le concept de structure de personnalité par exemple est différent, certaines pathologies ont changé de catégorie en changeant de nomination, comme la maniaco-dépression devenue un trouble bipolaire, sorte de fourre-tout dans lequel n’importe quelle variation de l’humeur peut devenir une maladie mentale avec traitement approprié.
L’idéal est de combiner les deux disciplines. Or, dans l’affaire Sarah Halimi, toutes les expertises ont été réalisées par des psychiatres réputés et estampillés par l’Ordre médical et par les institutions d’état (Justice police), ce qui en fait des “experts”. Cependant, à ma connaissance, aucun n’est psychanalyste (cela reste à vérifier).
Quoi qu’il en soit, la décision du tribunal qui s’est fondée sur les conclusions des experts semble souffrir d’une dimension essentielle, celle qui convoque tout ce que la psychanalyse peut apporter pour mieux cerner la personnalité de l’assassin. Ceci n’est pas sans conséquence pour la suite des effets dévastateurs induits par la décision du tribunal de ne pas renvoyer l’assassin en Cour d’assises. Car en toute logique, si Kobili Traoré est déclaré à la fois pénalement irresponsable ET normal d’après les dernières conclusions des psychiatres dont aucun ne prétend aujourd’hui qu’il est atteint d’une maladie mentale, son passage à l’acte étant le résultat d’une Bouffée Délirante Aiguë due au cannabis (notamment le Dr Zagury), l’intéressé n’étant plus en traitement depuis un an et déclaré psychiquement stable (Le Dr Bensussan vient de déclarer qu’il s’est trompé sur le diagnostic), son confinement en UMD (unité pour Malades Difficiles) sera désormais médicalement et judiciairement difficile voire impossible. Les psychiatres et les juges auront donc pris une énorme responsabilité, non seulement envers la famille de la victime, mais aussi envers la société.
Michel Rosenzweig, philosophe de formation (histoire de la philosophie, ULB) et psychanalyste, s’intéresse à la géopolitique, et notamment aux enjeux relatifs à la montée de la nouvelle judéophobie inscrite dans l’idéologie de l’islam politique radical et conquérant. Il a, par ailleurs, travaillé dans le domaine de la recherche sur les psychotropes (drogues légales et illégales, médicaments) pendant de nombreuses années, en se spécialisant dans la gestion des consommations, des comportements à risques, des dépendances et des addictions, et a publié à ce sujet: Notamment Drogues et civilisations, une alliance ancestrale, préfacé par le Prof. Bernard Roques de l’Académie des Sciences de Paris, De Boeck Université, Paris Bruxelles, 2008.
Rosenzweig écrit pour Metula News Agency, Guysen news international et Causeur.
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