Rosh Ha Shana : notre place et notre rôle -Rabbin Moshe Pitchon

Si nous ne sommes pas meilleurs êtres humains demain que nous ne le sommes aujourd’hui,
Pourquoi avoir un demain ?

Rabin Moshe Pitchon

À travers une série de métaphores, la liturgie de Roch Hachana soulève et répond à des questions concernant notre place et notre rôle dans le monde. Si l’on doit chercher où que soit ce que le judaïsme a à dire sur ce que signifie être un être humain, il n’y a pas de meilleur endroit que le livre de prières de Roch Hachana et Yom Kippour, le «Mahzor».

À l’un des moments les plus dramatiques du service religieux de la matinée de Roch Hachana – le sonner du shofar, par exemple, est suivi d’une prière avec une déclaration particulière. Commençant par les mots «Hayom Harat Olam» la phrase suggère que le début du monde ne doit pas être compris comme un acte de création isolé, mais plutôt comparé au processus d’accouchement.

En déclarant qu’« aujourd’hui [à Roch Hachana], le gestation du monde a commencé» (au lieu de dire « qu’aujourd’hui le monde a été » créé « ), la vie est entendue non pas comme un événement passé, mais comme un processus continu dont nous sommes partie.

Ainsi, en pensant au début du monde, le judaïsme ne cherche pas à décrire un événement mais à répondre à des questions critiques sur nous-mêmes. Pourquoi sommes-nous nés sans connaissance ni compréhension ? Pourquoi devons-nous passer par un processus de « maturation » ? Avons-nous jamais « diplômé »? Pourquoi les carences assaillent nos vies ? Comment gérer le peu de temps dont nous disposons pour les surmonter ?

Les sages d’Israël soulignent généralement que tout ce qui est créé est incomplet, inachevé, imparfait. L’expérience, et donc la sagesse accumulée du judaïsme, est que la vie humaine est un processus doté d’un potentiel énorme de croissance spirituelle et psychologique continue.

En bref, Roch Hachana ne célèbre pas la création passée, mais le potentiel qui permet aux êtres humains d’élever leurs regards, leurs rêves et leurs attentes.

Ce que la fête nous demande d’explorer, c’est ce qui peut naître de nouveau, quelles barrières physiques, émotionnelles, intellectuelles et spirituelles nous empêchent de continuer à apprendre et à comprendre, afin que le processus commencé à la naissance continue de s’effondrer.

La fête nous invite à méditer sur la manière dont de nouvelles possibilités naissent en opportunités et en espoirs pour ce que nous pouvons être. C’est une journée au cours de laquelle nous devons nous concentrer sur les rêves et les attentes.


Roch Hachana nous rappelle que, même si nous sommes juifs, nous sommes également membres de la communauté mondiale, avec la mission d’engager le monde en tant qu’émissaires du changement et de la justice sociale, en contribuant au bien-être du monde auquel nous appartenons.

La vie peut être un développement continu, un progrès, un développement de croissance morale, spirituelle et intellectuelle, ou elle peut atteindre un stade de développement arrêté la rendant sans but; Roch Hachanah nous dit que nous avons le choix et que ce choix nous appartient.

Voici une prière de Roch Hachana dans une langue qui peut correspondre davantage à notre façon de penser au 21ème siècle, même ci elle dit ce que les Juifs disent depuis des milliers d’années:

« Que la nouvelle année soit pour nous une occasion d’améliorer la qualité de nos vies, d’enrichir son contenu et d’en approfondir son sens.

Puisse la conscience de notre existence nous aider à garder nos esprits en vie, ouverts à de nouvelles idées, nourrissant des doutes stimulants, à réexaminer des opinions même que bien établies, à nourrir une vive curiosité et à nous efforcer à élargir notre réservoir de connaissances.

Puisse-t-il nous aider à garder nos cœurs en vie, développer une plus grande compassion, être réceptif à de nouvelles amitiés, maintenir un enthousiasme joyeux.

Puissions-nous être plus sensibles aux besoins des autres, moins vulnérables à la cupidité qui nous consume, plus attentifs au désir de fraternité.

Puisse cela nous aider à garder notre esprit en vie. Puissions-nous faire face à l’avenir avec confiance, sachant que chaque époque a ses propres joies et ses satisfactions, que chaque période de notre vie est une gloire en soi.

Si Roch Hachana transmet un message heureux, c’est que le passé et le présent n’excluent jamais l’avenir. Bien que l’avenir ne soit pas complètement ouvert, il reste ouvert et requiert notre effort constant, notre imagination et notre volonté de continuer à grandir.

Le rabbin Moshe Pitchon est le président du centre médical Friends of Ziv (https://www.friendsofziv.org/)

Directeur de l’Institut Meriane Albagli Geni Cassorla pour le développement séfaradi au XXIe siècle (https://www.21stcenturyjudaism.com/sephardic-institute-meriane-albagli-geni-cassorla/)

Membre du conseil d’administration d’ OZ, la coalition de communautés confessionnelles (https://www.oz-us.org/)

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

3 Comments

  1. Je pense que tous les juifs sont fiers d’un aussi beau texte qui éclaire la création divine. Les catholiques seront fiers de ce texte qui lie nos deux fois. Les racines juives du catholicisme sont bien une source de vie, non un flot canalisé pour le regard de quelques théologiens, et le dialogue judéo-chrétien n’est pas une agitation d’expiation, telle que présentée par des esprits étroits.

    • De portée universelle, le texte de Roch Hachana est assurément très beau.
      En aparté, Monsieur Comte, pourriez-vous m’expliquer le sens du septième paragraphe qui se termine par le mot « s’effondrer » ? Ce dernier mot est-il un lapsus ?

  2. Il ne m’appartient pas de commenter sur le fond un texte du judaïsme.

    Cependant, sur la forme, je ne vois rien d’irrationnel dans le septième paragraphe:
    Une logique fausse aurait demandé que le processus continue sa croissance ou construction; le terme français « s’effondrer » évoquant, de façon émotionnelle, le résultat nécessaire d’une faute ou d’un vice. Le texte évoque l’apprentissage/connaissance et la compréhension dont la continuité est « empêchée » par des barrières que l’homme dresse lui-même au cours de sa vie. La destruction de ces barrières est nécessaire, le terme « effondrement » me semble correct, par sa neutralité qui n’indique pas si la disparition de cet obstacle est le but ou le résultat de l’exploration nécessaire.

    Je ne sais pas si « effondrer » évoque des liaisons particulières en hébreu; vous me pardonnerez de traiter ce texte comme un commentaire d’arrêt juridique. Ce qui intéresse le catholique est l’idée de nouvelle naissance favorisée par Roch Hachana.
    Pour notre Eglise, le baptême offre seul une naissance nouvelle.
    La dangereuse hérésie des « born again christians » vient de cette vanité humaine de créer immédiatement des liens personnels avec le ChriSt.

    Ce texte contraste heureusement avec les bavardages de M Comte-Spontini, triste exemple des modes qui traitent la philosophie comme un élixir narcissique et la religion come une émotion esthétique. Il a souvent été dit que le judaïsme est l’étude du Livre mais cette étude serait invraisemblable sans la soumission à Dieu, fondement du judaïsme et du christianisme.
    La Doctrine catholique n’est pas un bâton pour frapper le pécheur; son étude permet d »enrichir sa foi et je regrette que l’exemple de nos frères aîné juifs ne soit pas suivi par l’ensemble de la communauté des chrétiens.

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*