L’imposture Yann Moix. Sarah Cattan

Pas une ligne sur Lui, m’étais-je promis. Rien. je l’avais presque aimé…

Peu avaient lu l’écrivain. La plupart l’avaient découvert dans cette émission décidément insupportable si on en juge par la qualité de ses chroniqueurs. la bande qui, par 2, se succéda pour faire les samedis de France 2. Assignés à piétiner-caillasser ceux, un brin maso, qui eurent la mauvaise idée d’aller se faire descendre sur le plateau-télé du samedi soir.

Polémistes, écrivains, journalistes, apprentis-avocats: nous n’en retînmes que la mauvaise foi outrancière de beaucoup, quelques envolées lyriques, des océans de culture assénés à un spectateur qui croyait en sortir plus intelligent, des blagues douteuses, un paquet d’humiliations.

Le job une fois fait, ils nous revenaient, de ci de là, pour nous vendre qui sa daube, qui sa vegan-religion, qui son amouuuur pour le judaïsme.

Lui, il était, disait-il, en chemin de conversion.

Ça lui avait pris comme ça. Juste une révélation.

Et pour nous en convaincre, il nous sortit des pages et des pages d’interviews sur la chose : plus judéophile que lui, tu mourais. Moi qui vous parle, je l’ai, alors, ici même, relayé, son amour du judaïsme. Comme je m’en veux. De n’avoir point suffisamment travaillé.

C’est qu’à Lui, on lui passa peut-être plus qu’à d’autres certains excès : comprenez bien ! Il était l’enfant battu, l’enfant martyrisé, humilié. Et nous analysâmes tout au prisme de cet attentat : l’enfant battu a toutes les excuses du monde.

Sa vie amoureuse, nous contait l’indécent dans Rompre, était une cata. L’enfant battu Que voulez-vous.

Jusqu’à cet été où il nous sortit Orléans

Jusqu’à cet été où il nous sortit Orléans, consacré à ladite enfance. En long et en large. A en pleurer, car le bougre sait écrire. A s’interroger aussi : mais comment diable cet instituteur accepta-t-il de coopérer avec l’ogresse, la mère malveillante qui humilia l’enfant en le déposant en pyjama en plein cours, et le sommant de nous avaler ainsi accoutré son petit déjeuner, tout ça devant le public-classe.

Mais Moix avait des parents. Un père. Un kiné. Un frère aussi, lequel, écrivain, se fendit à son tour d’une forme de droit de réponse, père et frère niant ce qu’Orléans nous narrait.

Un goût de cendres

C’était déjà assez pour qu’un goût de cendres nous montât aux lèvres. Nous ôtant définitivement tout désir de nous mêler de la chose. Les psys s’y mettaient.


Mais il fallut, pour le grand malheur de Yann Moix, que sortît cette affaire de dessins. Antisémites. Négationnistes. Excusables, nous assura l’auteur, car il n’avait alors que 20 ans. 20 ans, rendez-vous compte. L’agneau de La Fontaine, quoi.

L’âge d’un Mehdi Meklat!

Il n’avait que 20 ans, répétait-il, et il n’était pas le seul responsable, s’enfonçait-il, persuadé que lui, lui qui depuis peu nous vendait son amour pour le judaïsme, allait de ce fait être exonéré de tout : Nous l’oublierions, cet épisode nauséabond.

Lui, pourtant inexcusable. Lui qui l’eut, le temps, le temps mais encore toutes les opportunités de tenter avant le scandale de nous expliquer la mauvaise farce, cette chose que d’aucuns appellent la part d’ombre que nous porterions tous en nous

Lui qui ne le fit guère. Lui que son silence sur ses écrits de l’époque interrogent quant à sa sincérité actuelle.

Lui acculé aujourd’hui à se défendre puisque la chose est à présent sur la Place publique.

Lui, qui ne peut même pas, de surcroît, invoquer le lointain d’une époque:
Qu’on se réfère à la date du livre  écrit par Paul -Eric Blanrue, compagnon de route de Dieudonné et proche de Faurisson: 2007.

Qu’on se réfère à la préface rédigée par notre … philosémite: 2007.

https://youtu.be/B-YAYw03I1Q

Qu’on se réfère à l’interdiction de diffusion  du bouquin aux motifs d’injure envers un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une religion déterminée, de négation de crime contre l’humanité , mais encore de provocation à la haine raciale: 2013.

Qu’on se réfère à la signature que le même accola à celles de ses amis en guise de pétition pour l’abrogation de la loi Gayssot: 2010.

Qu’on se réfère aux propos du sieur Paul-Eric Blanrue, lequel affirme avoir fréquenté le futur converti jusqu’en 2013.

Qu’on s’en réfère au selfie auquel notre philosémite se prêta encore, toujours à l’insu de son plein gré, aux côtés de l’ex président du Gud, Fréderic Chatillon: 2016.

Moix et Frédéric Chatillon

Pendant que ses amis volent à son secours, telle une Noémie Halioua qui dans une grotesque envolée lyrique nous chante le philosémitisme de son pote, tel un Eric Naulleau qui ose parler d’essentiel à propos du bouquin, – les dessins devenant accessoires – , tel son avocat qui nous avait habitué à mieux et qui ce matin se lança dans un salmigondis inaudible, Moix ayant endossé la chose, comme si cela pouvait-devait le disculper, Pendant enfin que la maison d’éditions d’Orléans tire et retire des milliers d’exemplaires, moi je me désole de ma crédulité : Pourquoi et Comment n’ai-je pas su cette sombre affaire. A temps.

Le fait qu’un écrivain nous parlât joliment de la religion juive

Le fait qu’un écrivain nous parlât joliment de la religion juive m’avait donc, moi comme vous, endormie, voire séduite ? En serions-nous là, nous, Juifs, pour accepter en somme ce qui ressemble, sinon à une aumône, en tout cas à une vaste escroquerie ? Juste pour être aimés. Acceptés ?

Pas moi. Jamais.

A Tribune juive, il y eut débat. André-Simon Mamou me parla ce matin … d’antisémitisme qui faisait honte et renaissait comme un feu mal éteint… Avant d’ajouter : Moix anti juif repenti , il est le symbole de tous les non juifs que j’ai croisés ! Quand on gratte plus profond on retrouve parfois la haine venue de l’inaptitude à comprendre .

Tu avais dit: Rien, me reprocha cette amie.

Rien, certes, Si seulement il avait eu le courage et l’intégrité de narrer la chose avant qu’elle ne fût éventée par d’autres. Lui qui savait écrire et parler nous avait donc trahis de façon moche.

Il a fait Techouva, me reprochent les résilients, et puis aussi les croyants.

Peu me chaut. Il n’est pas Celui que je croyais qu’Il était. Je ne parlerai plus jamais de lui.

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18 Comments

    • Quant à moi, je préfère évoquer l’expression britannique qui sied : wait and see : attendons voir.
      Ce disant, je pense à Benny Lévy qui au contraire de Yann Moix commença sa carrière idéologique comme directeur de La Gauche Prolétarienne dans les années 1970, sous le pseudonyme de Pierre Victor, et qui la termina comme féru du Talmud après avoir repris son nom d’origine, passant ainsi sans coup férir de Mao à Moïse.
      Dans certaines circonstances l’être humain est imprévisible,
      attendons donc voir ce que deviendra le personnage Yann Moix.

      • Benny avait l’obligation de prendre un pseudo ca il était clandestin, apatride. Ceci il a pendant de nombreuses années lui et Leo sa femme”oublié” sa judeité. Pas tout à fait cependant car il faisait de temps en temps des clin d’oeil pour Kippour par exemple. Il est revenu au judaîsme par Levinas.La spécialité de Benny, c’était de faire trop de tout.
        marie france Le dantec.

  1. C’est étrange, sa tête ne me revenait pas et grâce á Sarah Cattan je constate aujourd’hui que sa culture n’était autre qu’un masque qui cachait son vrai visage. Merci Sarah

  2. Chacun de nous a droit à la rédemption, dans le christianisme,à tout le moins…
    Mais chacun évolue au film des jours et de la vie. Des expériences aussi. Qui, déçu de l’église catholique va se faire moine bouddhiste, ou entrer en laïcité,ou changer de genre,lassé d’être un homme,et n’aimant pas le football… Le sujet est grace, certes, et n’inspire pas l’humour donne même plutôt la nausee mais n’oublions pas qu’il faut savoir pardonner pour que nos péchés soient pardonnés aussi un jour par le Très-Haut…

  3. Je ne m’en cache pas; il m’était sympathique et jamais ne m’avait paru suspect !
    Tout le talent d’un grand malade qui rejoint la cohorte des menteurs pathologiques, imposteurs, mythomanes, délirants, qui fonctionnent sur le registre de la “contre-vérité psychique”. Cette notion a été développée par le psychanalyste franco-américain James Gammill disparu en décembre 2017 à Paris.

  4. M’étant aperçue de quelques fautes figurant dans mon commentaire après envoi, celui-ci (de ” à “) annule remplace le précédent…Merci de votre attention !

    “Chacun de nous a droit à la rédemption, dans le christianisme, à tout le moins …
    Mais chacun évolue au fil des jours et de la vie. Des expériences aussi. Tel, déçu de l’église catholique va se faire moine bouddhiste, ou entrer en laïcité, ou encore changer de genre, lassé d’être un homme, et n’aimant plus le football…
    Le sujet est grave, certes, et n’inspire pas l’humour, il donnerait même plutôt la nausée. N’oublions pas pourtant qu’il faut savoir pardonner pour que nos péchés soient pardonnés aussi un jour par le Très-Haut…

  5. Visiblement vous n’avez pas lu la préface rédigée par lui. C’est un des plus beaux plaidoyers contre l’antisémitisme que j’ai lu. Ne vous déplaise.

    La réédition du livre écrit par Paul-Eric Blanrue, compagnon de route de Dieudonné et proche de Faurisson n’a justement été interdit que parce qu’elle ne comportait pas la préface de Yann Moix.

    En gros le crime de Yann Moix est surtout d’avoir trahi la cause antisémite et d’être devenu philosémite. La téchouva est pourtant complète.

    • J’ai bien évidemment lu ladite préface mais encore j’en donne le lien:
      https://laregledujeu.org/2017/04/01/31057/yann-moix-la-preface-evoquee-ce-soir-a-onpc/
      Elle est une déclaration d’amour à Peguy, certes.
      Concernant tout ce qui est dit des Juifs, comment donc voudriez-vous empêcher toute réticence lorsque chacun, et vous aussi, sait les accointances de l auteur avec un Nabe par exemple, ou encore ses propos que par compassion je ne cite pas, concernant BHL ou encore Anne Sinclair
      Ah Me direz-vous, Moix est à présent l’ami de BHL.
      Demain il sera face à Franz-Olivier Giesbert, et gageons qu’il saura plaider sa cause.
      Resteront ses dessins. Ses commentaires nauséabonds. Ses amitiés discutables. L’enfant sans doute battu.
      Chacun se fera son idée.
      Ne me demandez pas d’admirer ce qui s’est soudain révélé de détestable chez un écrivain que j’estimais.

  6. « Il (Moix) a fait Téchouva (repentance) » ? NON. Contraint et forcé sous le poids des évidences il avoue ce qu’il lui était devenu impossible à nier. Cela relevé du calcul, de la stratégie et de la gestion de crise, non de la repentance.
    Moix serait donc menteur ? La belle affaire.
    Vu qu’il est commun d’admettre qu’un écrivain, ça raconte des histoires. Sinon, il aurait peut-être été comptable.
    Sachant que l’art exige une certaine dose de folie, croire à ses propres histoires pourrait être une caractéristique fondamentale d’un écrivain.
    Il est hélas à craindre que cette affaire ne fasse qu’amplifier sa notoriété et augmenter ses ventes.
    L’espoir de Goncourt est fini pour lui, mais nul besoin de Goncourt pour vendre du papier…

  7. Je suis effrayé par la teneur (très sévère) de la plupart des commentaires qui ont précédés le mien.
    Si vous n’êtes pas capables d’accorder ou d’accepter le pardon de Yann Moix, c’est que vous êtes incapables de pardon, en général et dans ce cas, abstenez vous l’hypocrisie du prochain Yom Kippour et des suivants. Ce qui est encore plus triste, c’est que certains d’entre vous citent les textes pour appuyer leur critique acerbe contre Yann Moix.
    Mais rendez-vous compte … En n’acceptant pas son pardon, vous considérez qu’ils restent comptables des fautes de “jeunesse”. En n’acceptant pas son pardon, vous vous montrez aussi sévère qu’envers Dieudonné qui lui, non seulement n’a pas demandé pardon ou sous une forme sarcastique avec son spectacle “Mes excuses”, mais encore, persiste et signe dans son ignominie antisémite.
    Vous savez quoi, votre intransigeance, vos certitudes et votre aveuglement des qu’il s’agit d’évoquer l’antisémitisme, me font honte (d’être juif) … parfois.

    • Vous venez deriger une nouvele regle… il suffit de demander pardon de faire croire qu’on est philosemite…
      Merci de ne pas taper sur les jeunes fachos.. crux ne sont que des yann moix en devenir…

  8. J’ai remarqué par ailleurs sur Twitter que les antisémites étaient souvent les plus virulents contre lui. Son crime est d’avoir trahi la cause antisémite

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