Livre : le judaïsme s’accommode-t-il de l’innovation scientifique et biologique
A l’heure ou le gouvernement promet la Procréation médicale assistée à toutes, le rabbin Michaël Azoulay a tenu à introduire dans le débat public une réflexion personnelle et érudite sur l’éthique du judaïsme.
Il est devenu commun de dire que les problèmes éthiques traditionnels sont bouleversés en profondeur par l’innovation scientifique et biologique. A l’heure ou une femme de 70 ans peut techniquement donner naissance à un enfant, à l’heure ou une mère peut techniquement porter l’enfant d’une autre, à l’heure ou une femme peut se passer d’un homme pour procréer et ou un homme peut se faire greffer un utérus pour enfanter directement, les religions ne peuvent pas rester silencieuses. Aussi sont-elles régulièrement sollicitées pour accompagner la réflexion éthique générale, indispensable à l’évolution du savoir et à son impact sur les pratiques sociales des uns et des autres.
Toute la question ici est de savoir si le judaïsme dispose d’une parole spécifique sur tous ces sujets ? Il convient d’être reconnaissant au rabbin Michaël Azoulay d’avoir, avec son livre « Ethiques du judaïsme », apporté sa pierre à la réflexion commune. Le lecteur sera d’abord reconnaissant à l’auteur de n’avoir pas cherché à produire un ouvrage encyclopédique. « Ethiques du judaïsme » est un texte court de 114 pages à gros caractères. Il est simple d’accès et accorde une grande importance aux définitions. Les lecteurs qui ont une culture scientifique réduite ne se sentiront pas agressés et ceux qui ont une culture rabbinique restreinte non plus.
Le livre de Michaël Azoulay fait non seulement le point sur les avancées de la bioéthique. Mais le texte rappelle aussi que l’action gouvernementale ne se produit pas dans un désert éthique. Au contraire même. La bioéthique existe depuis quelques dizaines d’années et informe le médecin comme le savant que la règle fondamentale est de ne pas nuire au patient et que l’action est possible si le bien recherché est supérieur aux effets négatifs qui pourraient accompagner ce bien.
L’un des traits essentiels de l’éthique juive est de ne pas s’opposer frontalement au progrès scientifique quand ce progrès heurte les règles de la morale traditionnelle. « La bioéthique juive se caractérise par une approche casuistique – au cas par cas – qui s’accommode mal du caractère général de la loi » écrit le rabbin Azoulay. En d’autres termes, quand la loi civile détermine un nombre restreint de principes éthiques pour l’ensemble des cas de la vie réelle, l’éthique juive préconise que chaque cas fasse l’objet d’un examen particulier. Dans le judaïsme, une interdiction peut se transformer en autorisation en fonction du cas. Les exemples donnés par le rabbin Azoulay sur la question simple de l’avortement – en principe interdit – par la loi juive, montrent qu’en réalité, le champ des possibles est très vaste.
On apprend également que la loi juive n’interdit pas la recherche sur l’embryon, ni les cellules souches. On apprend que la procréation médicale assistée n’est pas non plus interdite et a suscité l’intérêt des autorités rabbiniques israéliennes qui y voient une opportunité pour les mères juives que la nature a placé dans l’incapacité d’enfanter.
Les réflexions du rabbin Azoulay sur le transhumanisme ne sont pas dénuées d’intérêt non plus. Il ne pose pas la question de l’utilité des religions dans un monde ou l’homme travaille à rendre possible une vie terrestre éternelle. Il pose seulement la bonne question éthique : « accroître nos capacités physiques et mentales augmentera-t-il nos capacités morales, notre altruisme et notre compassion ? »
Le livre est court, mais il est riche d’une multitude d’informations propices à la réflexion. Michaël Azoulay n’apporte pas de réponses préfabriquées, il aide le lecteur à se former un jugement. Habileté ou respect du lecteur, peu importe, il faut lui en être reconnaissant.
Yves Mamou
Ethiques du judaïsme du rabbin Michaël Azoulay, La Maison d’Edition, 114 pages, 10€.
Vous dites : « On apprend également que la loi juive n’interdit pas la recherche sur l’embryon, ni les cellules souches. ». Or on sait que la recherche sur l’embryon et le prélèvement des cellules souches nécessitent la destruction de l’embryon. Dans la Bible (Genèse à Apocalypse), l’embryon, qui résulte d’un ovule fécondé, est un être humain à part entière puisque Dieu le prend déjà en compte à ce stade : «Tes yeux me voyaient quand j’étais une masse INFORME, et sur ton livre se trouvaient inscrits tous les jours qui m’étaient réservés avant qu’un seul fut éclos. » (Psaume 139, 15 du roi David). Donc quand Dieu dit : « Tu ne tueras pas » (pas de dérogation), ce commandement s’applique aussi vis à vis des embryons, et on doit en tenir compte car les conséquences de la manipulation bioéthique de l’embryon sont extrêmement graves. En effet, le prophète Haggaï (2, 12-13) dit : « Si une personne devenue impure par le contact d’un mort touche ces choses (pain, légume, vin, etc.), deviendront-elles impures ? Les prêtres répondirent en disant : Elles seront impures. » (cf aussi Nombres 19)*.
La Torah déclare le cadavre humain impur. Or l’embryon est un organisme formé de cellules. Donc quand on tue l’embryon, et l’embryon mort étant impur, alors automatiquement toutes les cellules qui le constituent sont impures, quand bien même elles seraient encore « vivantes » lors de leur prélèvement. De ce fait, quand on les utilise, elles vont à leur tour rendre impur tout ce qu’elles vont toucher. Et non seulement cela, mais encore tout ce qui sera fabriqué à partir d’elles deviendra impur, et donc souillera également tout ce qui entrera ensuite en contact avec… On voit ici comment se propage la MALEDICTION à partir d’un cadavre humain, ici l’embryon mort, consécutivement à la transgression (consciente ou non) de la loi divine. Et cette malédiction n’atteint pas seulement le corps qui reçoit « les soins » à partir de ces cellules souches (greffe…) mais également l’âme et l’esprit puisque la Bible établit un lien certain entre le sang qui irrigue tout le corps et l’âme qui lui est attachée (Lévitique 17, 11), par conséquent l’esprit, d’où risques de problèmes non seulement d’ordre physique mais encore psychique, psychiatrique…
Si donc « la loi juive n’interdit pas la recherche sur l’embryon, ni les cellules souches », et que cette manipulation se fait à partir de cadavres avec toutes ces conséquences dramatiques, alors assurément cette « loi juive » ou « éthique juive » n’est absolument pas la loi DIVINE biblique. En outre, compte tenu du fait que les effets (la malédiction) du bien recherché sont de toute évidence nuisibles au patient, et impactent gravement tout son environnement (personnes et choses), la règle fondamentale de la bioéthique dont vous avez parlé voudrait alors que l’on cesse immédiatement toute manipulation de ce genre, c’est-à-dire faites à partir d’embryons délibérément tués…
* Dans l’alliance mosaïque (culte en lien avec le Temple de Jérusalem) l’impureté liée à un cadavre était purifiée par les eaux dans lesquelles on avait mis les cendres d’une vache rousse (Nombres 19). Cette alliance a disparu officiellement avec le Temple, en 70. Depuis lors, l’alliance messianique en Jésus étant la seule en vigueur, « le sang de Jésus nous purifie de TOUT péché » (Bible, 1ière Lettre de Yohanan-Jean 1, v. 7)