Tribune Juive

La judéité de Sarah Halimi aurait joué le rôle de … l’étincelle. Sarah Cattan

Des affaires en Justice qui font les Une, il n’en manque guère. Du jeune homme qui s’est pris de la prison ferme pour avoir volé de quoi manger au Petit Théâtre Balkany en passant par les délinquants du jour qui vont se retrouver en Correctionnelle et en n’oubliant pas Soral que le Parquet a sauvé in extremis et dont on finit par se dire que non, Lui, il n’ira décidément jamais en taule, il y a depuis lundi, sur un bureau du Ministère public, et désormais sur celui de la Juge, le Dossier Sarah Halimi.

Un assassinat antisémite ? Chuuuut : Faut pas le dire ainsi : l’homicide volontaire n’est toujours pas requalifié en assassinat. Et la cause antisémite … reste … à prouver…

On avance : Après que 7 experts psychiatriques se fussent penchés sur le cas du mis en examen, restait à ce jour à décider si l’individu pouvait encourir un Procès en bonne et due forme : car voilà et chacun le sait : les expertises parlaient d’altération, et puis d’abolition du discernement du gus. Lequel était en attendant préservé en UMD où on s’occupait de le soigner.

On avance. Le Parquet en effet réagit. Et demande aux 2 Juges Anne Ihuellou et Laurence Lazerges … que le cas de Traoré soit discuté … en Cour d’Assises.

Il paraît qu’il faut à présent laisser travailler la Juge Anne Ihuellou. Dans la tête de laquelle j’aimerais bien me trouver, Elle qui géra le Dossier dès le début, Elle qui dut faire face à une quirielle d’avocats, à des Parties civiles éprouvées, à une Presse, sinon hostile, pour le moins perplexe et pressée… que la chose fût entendue. Que Kobili Traoré répondît de son acte odieux.

Voilà la Juge mise désormais face aux 76 pages d’un Réquisitoire définitif de Mise en Accusation devant la Cour d’Assises de l’individu.

Tout ça remonte à fort loin, direz-vous. Rappel

Le Parquet rappelle que Kobili Traoré est bien mis en examen des chefs d’homicide volontaire sur la personne de Sarah Halimi, le 04 avril 2017, en raison de l’appartenance vraie ou supposée de la victime à une race ou une religion déterminée, et puis encore de séquestration de la famille Diarra.

76 pages signées de la Substitut du Procureur listent les faits. Heure par heure. Minute par minute. A la seconde près. Avec quelques étrangetés, incohérences, maladresses, divergences parfois.

Afin d’établir le plus précisément possible la chronologie des faits, les conversations radios des équipages de police engagés le 04 avril 201 7 ont été analysées de même que les appels passés aux services de secours. La fiche PEGASE établit la chronologie des interventions des équipages de police comme dit ici :

De 04h25, ce 4 avril 2017, où les effectifs de la BAC, assistés d’effectifs de la BAC de Nuit, sont appelés par une des filles de la famille Diarra, victime d’une séquestration dans leur propre domicile, à 05h25, où les effectifs du 2ème District de Police Judiciaire de Paris sont ensuite avisés du décès d’une femme des suites d’une défenestration, avec l’arrivée du premier équipage de police de la BAC sur les lieux trois minutes après leur saisine. Une jeune-femme leur jette, à leur demande, par la fenêtre, le pass Vigik de l’immeuble : les voilà en mesure de monter chez la famille séquestrée.

Dès 04h41, des appels sont lancés au 17 pour signaler un homme frappant sa femme, que les faits se passent à présent sur un balcon, puis informant de la chute de la femme.

Concomitamment, un appel passé par un pompier au SAMU informe l’interlocuteur du SAMU qu’ils sont engagés sur une défenestration du 3e étage d’une femme.

Entre 05h14 59s et 05h17, la BAC II précise que le témoin, alerté par des cris stridents, a vu un individu rouer de coups la victime qui paraissait inconsciente au moment où elle était jetée dans le vide

Nous avions laissé nos fonctionnaires de police devant la porte du domicile des Diarra, entendant des hurlements incompréhensibles visiblement d’individu masculin et des paroles proférées en langue arabe par la même voix : La porte reste close malgré l’injonction Police, Ouvrez. Ils ne peuvent la forcer. 

Un des policiers récupère les équipements techniques : gilets lourds, boucliers, casques lourds. Un brigadier-chef rend compte de la situation à l’Etat-Major de la Direction de la Sécurité Publique de l’Agglomération Parisienne : n’étant pas détenteur d’un bélier, ils ne peuvent procéder à l’ouverture de la porte du domicile des Diarra.

Pendant ce temps, un gardien de la paix cherchant, quant à elle, l’origine de cris entendus alors qu’elle était dans le hall, se rend dans le jardin de la résidence. Elle sollicite de plus amples renforts. C’est alors que le brigadier-chef, alors qu’il éclaire avec sa lampe le balcon en question, éclaire machinalement le jardin et constate la présence d’une masse qu’il prend dans un premier temps pour une bâche : Il s’agit du corps de Sarah Halimi. Juste en dessous du balcon qu’il venait d’éclairer.

Voilà les deux policiers rejoints par un équipage de la BAC 75 N, composé notamment d’un brigadier doté d’une formation de secouriste, lequel se rend au chevet de la victime : 5h10. Examen du corps fracassé de la victime en arrêt cardio-respiratoire. Le décès est constaté.

Les fonctionnaires de police aperçoivent alors un individu au niveau d’un balcon du 3e étage, dont les vêtements comportaient des traces rouges pouvant être du sang.

05h35 : les fonctionnaires de police investissent l’appartement des DIARRA et procèdent à l’interpellation sans résistance de TRAORE Kobili.

C’est hélas seulement là que les fonctionnaires de police forcent la porte correspondant à l’appartement de Sarah Halimi. Ils y découvrent de multiples objets attestant d’une lutte. Du sang partout. Des livres en hébreu. Quatre chandeliers disposés sur un plateau.

Autopsie :

Le rapport est accablant et on ne peut le relire et rester impassible : Le corps de Sarah Halimi présentait au toucher une impression de dislocation. Un traumatisme thoracique majeur avec fracas costal. Un traumatisme cranio facial. Une plaie du ventricule droit. Un traumatisme abdominal avec plaie déchiquetée intra-parenchymateuse du foie. Un traumatisme pelvien avec fractures du bassin. Un traumatisme des membres avec fracture du fémur gauche, de la cheville gauche, de la rotule droite, du poignet gauche, du coude droit et de la clavicule gauche, tout cela compatible avec une chute d’un lieu élevé : de surcroît la présence d’infiltrations hémorragiques voisines des lésions démontrait que la victime devait être encore vivante au moment de sa chute.

Il est conclu à une mort par polytraumatisme par Chute d’un lieu élevé. Les magistrats instructeurs demandent qu’il soit précisé si la défunte était encore vivante et/ou consciente au moment de la défenestration. Selon l’expert, il n’est pas possible de préciser l’état de conscience de la victime au moment de la précipitation, les traumatismes crânio-faciaux étant cependant suffisants pour entraîner une perte de conscience

Les échanges radios des effectifs de police du 2e District couvrant les I1e, 12e et 20e arrondissements de Paris, relatifs à leurs interventions au 26-30 rue de Vaucouleurs sont exploités. Entre 04h38 et 04h42, l’heure ne pouvant être déterminée plus précisément compte tenu du chevauchement de plusieurs conversations, l’opérateur 17 recontactait en urgence son homologue de la salle de commandement du 2e District afin de l’informer d’un appel selon lequel un homme venait de jeter une femme par la fenêtre du 3e étage du 30 rue de Vaucouleurs. L’opérateur de la salle de commandement donne pour instruction d’attendre, le temps qu’il en réfère à l’Etat-Major de la DSPAP…

Deux des fonctionnaires primo-intervenant précisent qu’il s’est écoulé 25 minutes entre l’arrivée de l’équipage d’intervention de la BAC 75 N et le positionnement de leur colonne équipée pour l’intervention derrière la porte du domicile des Diarra. Ils estimaient à 30/35 minutes le temps d’attente entre l’arrivée de leur équipage derrière ladite porte et leur remplacement par la colonne d’intervention, rappelant que durant ce temps, ils ignoraient qui se trouvait derrière la porte et s’il y avait des armes. La colonne d’intervention a ensuite attendu les instructions de sa hiérarchie pour entrer dans les lieux, tandis qu’ils se rendaient au domicile de la famille Traoré, au cas où l’auteur des faits déciderait de retourner à son domicile par les balcons.  

La famille de Sarah Halimi, La reconstitution …

Les enfants de Sarah Halimi ne sont pas sur des témoignages de propos ou comportements antisémites desquels ils auraient été témoins. Seul William Attal affirme. : Kobili TRAORE se serait radicalisé en prison puis aurait fréquenté une mosquée salafiste. Son crime était prémédité, preuve en était qu’il s’était rendu à la mosquée prier quelques heures avant les faits…

Le magistrat instructeur rappelait par ordonnance le 29 janvier 2018 que l’organisation d’une reconstitution n’apparaissait pas compatible avec les contraintes liées à l’état de santé de Traoré et n’était pas nécessaire à la manifestation de la vérité, la matérialité des faits n’étant pas   contestée par ce dernier.

Appel était formé contre cette ordonnance par les parties civiles le 30 janvier 2018. Le lendemain, le procureur de la République de Paris faisait appel du refus de procéder à une reconstitution.

Par arrêt du 05 juillet 2018, la Chambre de l’Instruction confirmait l’ordonnance du magistrat instructeur aux motifs que c’était à bon droit que ce dernier avait rejeté la demande de requalification des faits, cet acte n’étant pas utile à la manifestation de la vérité. Selon la chambre de l’instruction, la reconstitution n’était pas utile à la manifestation de la vérité et ne présentait aucun caractère obligatoire ni automatique…

Les témoins

Celui-là entend parler en arabe et entend des coups. Il déclare avoir vu la chute d’une masse au travers de la séparation en verre opaque de son balcon. Celle-là entend vers 04h30 un homme crier en langue arabe sans pouvoir localiser ces cris. Elle perçoit ensuite distinctement des voix disant Appelez la police ! Ce qu’elle fait. Elle entend les gémissements d’une femme. Cet autre pense à une dispute conjugale. Il entendait l’homme dire Tu vas voir et une autre voix crier Non ! Arrête ! Lui voit alors le corps d’une femme passer au-dessus de la rambarde et atterrir dans un coin de la cour. Celui-là raconte les pleurs et les cris d’une femme ainsi que la voix d’un seul homme. Lui ? Il entend l’homme réciter des versets du coran et traiter sa proie de Sheitan. Elle ? Elle évoque des hurlements de femme et contacte immédiatement la police à 04h38. Celle-là, lorsqu’elle appelle la police, s’entend répondre : C’est pour le différend ?

Cet autre raconte un homme ne cessant de frapper en criant Arrête de bouger. Après un acharnement qualifié de bestial alors que la femme ne gémissait plus, l’homme semblant apercevoir la présence de policiers les informe, du balcon, qu’une femme allait se suicider. Puis il saisit la femme par les poignets, la soulève et la pose sur la rambarde du balcon, avant de la faire basculer dans le vide.

Traoré et 3 expertises

Les vérifications démontrèrent que Traoré n’était pas sous présence d’alcool. En revanche, son test urinaire se révéla positif au cannabis.

Traoré affirmera avoir connaissance de la religion de la victime : elle portait une tenue traditionnelle pour aller à la synagogue et ses proches la kippa.

Le docteur Zagury, missionné par les magistrats instructeurs aux fins de déterminer si Kobili Traoré est  susceptible de participer utilement à des opérations de reconstitution, le rencontre : Lorsque Traoré enjambe le balcon, il aurait ignoré qu’il se retrouvait dans l’appartement de Sarah Halimi, mais, en entrant dans les lieux, il voit les chandeliers ainsi qu’une Torah posée sur la table. Il dit à Zagury avoir demandé à Sarah Halimi de faire appel à la police, pensant qu’il allait se faire agresser par des démons. II aurait ensuite paniqué en l’entendant parler au téléphone avec des policiers. Il lui arracha alors le téléphone puis ne cessa de la frapper, pensant qu’elle était un démon, jusqu’à ce qu’il la jette par la fenêtre.

Le docteur Zagury précise que Kobili Traoré conservait des bribes de souvenirs filmiques, ce qui correspond à ce qui est observé à la suite d’une bouffée délirante aiguë.

En réponse à la question d’un éventuel lien entre l’homicide de Sarah Halimi et la religion juive, l’expert indique qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la qualification de l’infraction commise. Il apporte néanmoins un éclairage psychiatrique en rappelant notamment qu’un délire, s’il témoignait d’une autre logique que la rationalité, ne pouvait être considéré comme absurde ou irrationnel, les délirants puisant dans l’ère du temps pour nourrir leurs idées délirantes.

Le docteur Zagury précise alors qu’il est fréquent d’observer à notre époque, lors d’efflorescences délirantes chez des sujets de religion musulmane, une thématique antisémite : Il était possible d’être délirant et antisémite. Ainsi, dans l’hypothèse où Traoré partageait des préjugés antisémites largement répandus, ceux-ci pouvaient avoir été amplifiés par les bouleversements délirants, l’exaltation de l’humeur et ce, au point de transformer ces préjugés en convictions : Sarah Halimi n’était plus une voisine mais la personnification du Diable et l’incarnation du danger. S’il n’apparaissait pas possible, selon le docteur Zagury, de considérer que Sarah Halimi avait été délibérément recherchée et tuée parce que juive, il était en revanche possible que le fait qu’elle ait été juive l’ait immédiatement diabolisée aux yeux de Traoré et ait augmenté le vécu délirant, au point de focaliser sur sa personne le principe diabolique qu’il fallait combattre et d’amplifier un déchaînement frénétique, haineux et vengeur.

Le docteur Zagury conclut donc à la survenue d’une bouffée délirante aigüe, trouble induit par l’augmentation de la consommation de cannabis.

En conclusion, en dépit du caractère indiscutable du trouble mental aliénant, le discernement de Kobili Traoré ne pouvait être considéré comme aboli du fait de la consommation volontaire et régulière de cannabis, de surcroît récemment augmentée.

Il apparaissait en revanche légitime au Docteur Zagury de retenir l’altération du discernement au sens de l’article 122-1 alinéa 2 du Code pénal

Dans leur rapport, déposé le 11 juin 2018, les 3 experts suivants qualifiaient d’excellente l’expertise réalisée par le docteur Zagury, ajoutant être en plein accord avec le diagnostic. En revanche, ils divergeaient sur les conséquences médico-légales de la consommation de cannabis, estimant que la conscience du danger de troubles psychotiques induits par celle-ci était absente chez Kobili Traoré.

La dimension antisémite du geste ne leur apparaissait pas déterminante dans le processus psychopathologique du passage à l’acte. Si la prise de conscience de l’appartenance confessionnelle de la victime existait, il ne s’agissait pas pour autant d’un crime motivé par la haine antisémite.

Ces 3 -là rejoignaient l’analyse du docteur Zagury selon laquelle le contexte sociétal d’animosité d’une partie des musulmans envers la communauté juive, même si Kobili Traoré ne partageait pas ces préjugés, avait favorisé la diabolisation de Sarah Halimi dans un contexte d’angoisse extrême et de sentiment de persécution par le diable : La vue d’un chandelier à sept branches et d’une Torah avait précipité le passage à l’acte, la conscience du judaïsme de Sarah Halimi avait joué le rôle de l’étincelle.

Les experts concluaient à un diagnostic de trouble psychotique aigu, classiquement bouffée délirante compte tenu de la survenue d’un délire de persécution et de possession de nature satanique, chez un individu dénué de tout antécédent psychiatrique. Ils n’estimaient pas que ce trouble ait pu être induit par la consommation de cannabis, compte tenu des résultats des analyses sanguines, correspondant à une consommation modérée de ce stupéfiant.

L’infraction était en lien avec ce trouble psychotique et le discernement de Kobili Traoré evait être considéré comme aboli. Les experts étaient sur ce point en désaccord avec le docteur Zagury, considérant que l’augmentation de la consommation de cannabis de Kobili Traoré n’était que relative.

Du fait des conclusions divergentes des experts sur la question de la responsabilité pénale, une troisième expertise psychiatrique du mis en examen fut ordonnée par les magistrats instructeurs.

L’expertise fut confiée le 03 octobre 2018 à un collège de trois experts. Leur examen les amena à considérer que Kobili Traoré n’était pas atteint d’une maladie mentale au long cours et ne présentait pas de trouble mental de l’ordre de la psychose. Ils excluaient par conséquent une schizophrénie. Ils retenaient en revanche une appétence se circonscrivant au cannabis. De plus, ils indiquaient se trouver face à un sujet ayant fait l’objet d’une bouffée délirante en 2017, sans antécédent psychiatrique connu et sans antécédent de délire aigu sous consommation exotoxique. Ils précisaient cependant que le débat entre bouffée délirante aiguë isolée et symptôme d’une entrée dans la schizophrénie devrait pouvoir être tranché.

Les 3 experts éliminèrent l’hypothèse d’une simulation ou d’une sursimulation de la part du mis en examen : Pour eux, l’évocation d’un possible suicide de la victime avant de la faire basculer par-dessus la rambarde du balcon ne constituait pas une stratégie de sa part, l’individu, sous le coup d’une bouffée délirante, n’avait pas la capacité de sélectionner sa victime.

L’hypothèse de la bouffée délirante d’origine exogène leur apparaissait comme l’explication clinique. Sur le rapport entre cette bouffée délirante et une éventuelle abolition du discernement, ils ne se prononcèrent pas de façon formelle et conclurent leur rapport en indiquant la présence d’une bouffée délirante caractérisée d’origine exotoxique. Dans la synthèse de leur rapport, les experts estimèrent que Kobili Traoré n’était pas, actuellement, accessible à une sanction pénale.

Par courrier du 23 avril 20 19, les conseils des enfants de Sarah Halimi soulevaient que le seul consensus se dégageant des trois expertises psychiatriques était la survenue d’une bouffée délirante aiguë d’origine exotoxique, provoquée par une prise de cannabis. En revanche, les positions des expertises sur la question de la responsabilité pénale différaient. Ce qui ne permettait pas de déterminer si Kobili Traoré était atteint d’une abolition ou d’une altération de son discernement lors des faits : dès lors la saisine d’une juridiction de jugement leur apparut nécessaire.

Discussion proposée par le Parquet

Sur l’imputabilité de l’homicide volontaire en raison de l’appartenance à la religion juive commis au préjudice de Sarah Halimi, Kobili Traoré a reconnu dès ses entretiens avec le docteur ZAGURY, intervenus antérieurement à son premier interrogatoire, qu’il avait frappé sa victime à de multiples reprises au moyen d’un téléphone puis de ses poings et de ses pieds avant de la basculer dans le vide.

Kobili Traoré a toujours affirmé avoir ignoré qu’en passant par le bacon de la famille Diarra, il se retrouverait au domicile de Sarah Halimi. Il a également été formel Sur l’absence de volonté de s’en prendre à la victime en raison de sa religion.

En revanche, le mis en examen a indiqué avoir pris conscience qu’il se trouvait dans l’appartement d’une personne juive en apercevant un livre, qu’il identifiait comme étant une Torah, et des chandeliers. II précisa aux magistrats instructeurs avoir alors ressenti une oppression plus importante. De surcroît, lors de son entretien du 22 juin 2017 avec le docteur Zagury, il avait indiqué avoir pensé que la victime était en lien avec le Sheitan et avoir eu le sentiment de se battre avec le démon lorsqu’il la frappait.

Il ressort des déclarations de Kobili Traoré que la vision de la Torah et du chandelier aurait précipité son passage à l’acte, au travers d’une assimilation de Sarah Halimi au diable…

Selon le docteur Zagury, si Sarah Halimi n’avait pas été délibérément recherchée et tuée parce que juive, le fait qu’elle l’ait été l’avait possiblement diabolisée aux yeux de Kobili Traoré et avait augmenté le vécu délirant de ce dernier.

Le second collègue d’expert précisait que la conscience du judaïsme de Sarah Halimi avait joué le rôle de l’étincelle : Ces éléments justifient que la circonstance aggravante de l’appartenance de la victime à la religion juive soit retenue à l’encontre de Kobili Traoré. 

Sur la responsabilité pénale de Kobili TRAORE

Les trois expertises psychiatriques auxquelles Kobili Traoré a été soumis ne concordent donc que sur un point, en l’espèce la survenue des faits dans le cadre d’une bouffée délirante aiguë.

Le docteur Zagury concluait à l’absence d’une évolution du mis en examen vers une schizophrénie au regard de l’absence d’antécédents psychiatriques. Pour lui, la bouffée délirante aigue était d’origine exotoxique en ce qu’elle résultait de sa consommation de cannabis. Dès lors, il considérait qu’en dépit du caractère indiscutable du trouble mental aliénant, le discernement de Kobili Traoré ne pouvait être aboli du fait de sa consommation volontaire et régulière de cannabis, de surcroît récemment augmentée.

Au contraire, le second collège psychiatres considérait que la bouffée délirante aiguë du 04 avril 2017 marquait l’entrée du mis en examen dans la schizophrénie et était sans lien avec sa consommation de cannabis. Ils soulignaient l’extrême dangerosité psychiatrique de ce dernier du fait de sa personnalité pathologique antisociale et de son trouble psychotique et concluaient à l’abolition du discernement de Kobili Traoré.

Le troisième collège d’experts ne se prononçait pas de façon certaine sur les différentes questions posées. Les trois experts considéraient, comme le docteur Zagury, qu’il s’agissait d’un épisode de bouffée délirante aiguë, rien ne permettant selon eux d’établir l’existence d’une schizophrénie, Ils estimaient également que ce trouble psychiatrique avait pour origine la consommation de cannabis de Kobili Traoré. En outre, ils indiquaient que le constat de cette bouffée délirante aiguë orientait classiquement vers une abolition du discernement.  

Ainsi, pour le Parquet, l’appréciation de l’existence d’un trouble de nature à abolir ou altérer le discernement d’un individu relève de l’appréciation souveraine des juges répressifs et doit s’effectuer au regard des circonstances de faits.

Selon les docteurs Zagury, Coutanceau, Guelfi et Pascal, la bouffée délirante aiguë du 04 avril 2017 procédait de cette prise de cannabis. Le docteur Zagury se fonde notamment sur le début brutal et la résolution rapide de ce trouble, sa dimension onirique et l’extrême brutalité des conduites agressives de Kobili Traoré pour conclure à des troubles psychotiques induits par le cannabis. Or le mis en examen n’ignorait pas que la consommation de ce stupéfiant était pénalement répréhensible. ElIe constitue de surcroît la circonstance aggravante de plusieurs infractions.

Par son comportement volontaire de consommation de cannabis, Kobili Traoré a directement contribué au déclenchement de sa bouffée délirante aigue. Le fait qu’il n’ait pas souhaité être atteint de ce trouble et commettre les faits ne peut suffire à l’exempter de toute responsabilité. II ne saurait en effet se prévaloir de l’état de démence dans lequel il se trouvait, celui-ci résultant de son comportement fautif préexistant.

En conséquence, la bouffée délirante aiguë dont était atteint Kobili Traoré au moment des faits doit être considérée comme ayant altéré et non aboli son discernement 

L’ensemble de ces éléments justifie dès lors la mise en accusation de Kobili Traoré devant la Cour d’Assises de Paris des chefs de séquestration au préjudice de la famille Diarra, et d’homicide volontaire en raison de l’appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion, fait commis au préjudice de Sarah Halimi.

Pour ces raisons, le Parquet requit, au 17 juin, qu’il plaise à Mesdames les vice-présidentes chargées de l’instruction bien vouloir ordonner la mise en accusation de Kobili TRAORE devant la COUR d’assises de Paris pour avoir commis le crime et le délit connexe susvisés.

Moi, pauvre citoyenne, je dis que la masturbation intellectuelle de tout ce joli monde frise l’offense faite au bon sens.

Moi, juive, je m’inquiète : ainsi, voir en mon domicile une menorah servirait… d’étincelle…

Moi, française, je suis offusquée. La républicaine en moi, l’éprise de Justice sont accablées.

Pauvre Sarah Halimi. Un jour toutes ces pièces dont je n’ai pu taire quelques extraits feront école dans les lieux où s’apprend le droit.

Moi, je n’ose pas un instant croire qu’une Juge pût ici refuser que Traoré soit jugé aux Assises.

Et moi, enfin, j’ai foi en ces avocats qui ne sauront se prosterner.

Bien sûr que Kobili Traoré sera jugé aux assises pour avoir jeté, vivante, Sarah Halimi par la fenêtre : elle était Juive, que voulez-vous ! Juive !

Sarah Cattan

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