La nouvelle crise gouvernementale et parlementaire s’inscrira dans les annales des records politiques.
Depuis la création de l’Etat d’Israël il existait à ce jour, tant bien que mal, certaines limites dans les arcanes de la politique. Un code de conduite et une responsabilité certaine pour les affaires de l’Etat. En principe, elles devraient prévaloir sur les caprices de chacun et les intérêts personnels.
Le 29 mai 2019, à minuit, ce principe fondamental a été bafoué grotesquement. La Knesset, bastion de la démocratie israélienne, s’est transformée soudainement en théâtre de l’absurde. L’opposition sioniste a refusé la dissolution, les partis arabes ont voté avec les partis religieux et la Droite, tandis que le parti travailliste, seul avec ses six députés, souhaitait, in extremis, rejoindre le gouvernement Nétanyahou pour « sauver la démocratie » …
Bizarrement, l’opposition ne s’opposait plus à la chute du gouvernement et a cru trouver une solution magique pour pouvoir former une coalition de centre-gauche. Il faut dire aussi que Nétanyahou s’est conduit avec une assurance exagérée, pensant toujours trouver un compromis. Par cette confiance excessive, il fut humilié par Liberman et par une partie de l’opinion publique, et également dans son propre fief. Il aurait dû superviser, bien avant et de près, les tractations en cours, sans attendre les dernières heures. Il aurait dû également s’abstenir de projet de loi qui concerne directement ses affaires juridiques.
Depuis Ben Gourion, nous avons connu des échecs pour former un gouvernement à majorité parlementaire mais aucun observateur chevronné n’avait imaginé un tel scénario. Tous les moyens ont été employés, toutes les lignes rouges franchies sans scrupule pour pouvoir survivre politiquement. En tous cas, cette conjoncture devra être étudiée dans les facultés de Sciences Po.
Ce n’est pas la première fois qu’Avigdor Liberman préfère la crise politique et le déchirement de la société israélienne à l’union et à la solidarité entre les partis de droite. N’a–t-il pas compris que le peuple israélien forme une société à multiples facettes ? Qu’il est difficile et compliqué de gérer de la sorte un gouvernement disparate, et de satisfaire tout le monde ? L’égalité est une priorité absolue, mais les devoirs des citoyens aussi. Pour y parvenir, ce ne sont pas de sévères lois qui réussiront à mobiliser tous les ultra-orthodoxes à faire leur service militaire, mais un dialogue sincère et constructif selon les besoins sécuritaires et les exigences des militaires. Chacun devrait contribuer, à sa manière, à la construction et à la défense de l’Etat et ainsi alléger le fardeau et économiser des dépenses inutiles.
Le maître-chanteur de la politique israélienne avait rejoint pourtant les partis ultras orthodoxes pour élire un maire religieux à Jérusalem en rejetant la candidature de celui qui présentait courageusement un programme laïc, tel que Liberman le souhaitait.
Pourquoi donc ce double langage hypocrite ? Comment donc expliquer le nouvel entêtement concernant la mobilisation des ultra-orthodoxes ? Ne serait-il pas un prétexte ? Une aubaine inespérée pour pouvoir augmenter son influence au sein des russophones laïcs, au moment où certains membres de son parti étaient mis en examen et dégringolaient dans les sondages en risquant d’être gommés complètement de l’échiquier politique ?
Le 16 novembre 2018, Liberman avait déjà démissionné du ministère de la Défense. Une étrange et incompréhensible démission, intervenue quelques heures seulement après des salves de roquettes sur Israël.
C’était un acte irresponsable de la part d’un homme chargé de la sécurité et la défense de l’Etat d’Israël.
Il n’est sans doute pas lié à de solides principes ou à une idéologie, ni à l’intérêt public. Il s’agit d’un calcul tactique et cynique d’un leader opportuniste qui réussit depuis plusieurs décennies, grâce aux méandres de la politique, à jongler habilement avec des hommes d’affaires et surtout avec des oligarques… Soulignons qu’un maître chanteur exerce toujours un chantage, mais ses menaces pour obtenir un gain rapide ou un avantage sont tôt ou tard dévoilées.
Plus encore, cette conduite s’inscrit dans une longue rivalité cynique avec Benjamin Nétanyahou depuis que le leader de la Droite a fait ses premières armes dans les arcanes de la politique. Conscient de l’importance du vote russophone avec la venue massive des juifs de l’ex-Union soviétique, il désigna Liberman pour diriger la campagne électorale du Likoud contre le parti travailliste de Shimon Pérès.
La dernière conduite de Liberman est donc une revanche et elle s’inscrit dans le cadre d’une longue et interminable bataille politique intérieure israélienne. Elle marque une fois de plus les faiblesses de notre système électoral où chaque chef de petit parti charnière devient capricieux et lunatique, et agit en fonction d’intérêts personnels et souvent par des haines partisanes. En 2019, un parti religieux n’a pas sa place au sein d’un gouvernement, ni un parti séfarade, arabe ou russophone.
Dans ce contexte, de nouvelles élections anticipées ne changeront pas fondamentalement l’échiquier politique. Ces élections sont inutiles et le prix que le contribuable payera aurait dû être destiné à des secteurs nécessiteux et pour combler le fossé des disparités sociales.
Désormais, l’homme politique israélien tel que Liberman ou Kahlon perd toute confiance au sein de son propre électorat. Comment peut-il être crédible si les promesses ne sont plus tenues et les mensonges permanents deviennent loi ?
Face aux menaces existentielles et la guerre permanente que nous affrontons quotidiennement, et les défis socio-économiques et tant d’autres, il est temps de changer de cap et de créer une réforme électorale adéquate où s’affronteront seulement quelques partis.
Cette nouvelle campagne électorale a très mal commencé et elle s’annonce sale et virulente. Jusqu’au 17 septembre 2019, deux semaines avant la nouvelle année hébraïque, Rosh Hashana, nous appelons les leaders politiques à jouer fair-play et s’abstenir de coups-bas et vulgaires. Descendre dans l’arène sans couteaux tirés et dans la seule intention de nous offrir un spectacle de qualité et honorable à l’image de nos valeurs juives et démocratiques.
Freddy Eytan, Le CAPE de Jérusalem, jcpa-lecape.org
Au lieu de nous présenter une analyse neutre, réaliste et argumentée de la crise politique israélienne actuelle Freddy Eytan nous gratifie d’une diatribe biaisée anti-Liberman qui représente surtout sa propre préférence partisane.
Que peut-on dire qu’il omet de signaler ?
Que le système électoral israélien ressemble à celui de la quatrième République en France ; avec son instabilité permanente qui voyait des gouvernements valser tous les six mois et des élections en quasi-permanence.
Et que si la France a pu changer de système en adoptant la constitution de la 5eme République ce n’est pas par sagesse, mais « grâce » au danger existentiel que représentait, certes la guerre d’Algérie, mais surtout le clivage de l’opinion face au problème algérien.
Sans oublier l’autorité de Charles De Gaulle, très haut au-dessus de la mêlée.
Ce n’est donc hélas pas les appels aux bonnes intentions qui contribueraient à la solution.