La montée des super-bactéries peut quasiment être qualifiée d’épidémie. Aujourd’hui, près de 700 000 personnes dans le monde ne meurent pas de la maladie pour laquelle elles ont consulté un médecin ou un hôpital, mais d’une infection résultant d’un contact avec une bactérie résistante aux antibiotiques. Aux États-Unis uniquement, 2 millions de patients contractent des infections causées par des super-bactéries, 23 000 personnes en meurent. Jim O’Neill, économiste chez Goldman Sachs, estime que « d’ici 2050, plus de personnes mourront d’infections bactériennes résistantes aux antibiotiques que de cancers » .
Les super-bactéries se développent notamment lorsque les mauvais antibiotiques sont prescrits à un patient. Elles «apprennent» de ce traitement incorrect et peuvent partager leur nouvelle résistance avec d’autres bactéries.
«Le corps devient alors un incubateur de bactéries résistantes», explique Diane Abensur Bessin, PDG de Nanosynex, une start-up israélienne qui travaille sur une nouvelle approche pour aider les médecins à éviter les mauvais traitements aux antibiotiques. « Si nous donnons au patient le traitement approprié à la bonne dose, aucune résistance ne sera créée, le patient sera guéri plus rapidement et les autres patients ne seront pas infectés par une bactérie résistante« , a-t-elle expliqué à ISRAEL21c.
Née à Paris, Diane Abensur Bessin a toujours été très intéressée par l’identification d’une technologie médicale pour créer une entreprise. L’entreprise de son père en France distribue des outils de diagnostic à travers l’Europe. Avec les canaux de marketing déjà en place, l’invention de Shulamit Levenberg a matché avec les ambitions des deux cofondatrices.
La solution de Nanosynex est un test de diagnostic qui détermine quelles bactéries du corps d’un patient sont résistantes à quels antibiotiques – le tout en seulement quatre heures. Résultat : les médecins peuvent plus rapidement prescrire les antibiotiques efficaces.
Cela entraînera un changement de comportement chez les médecins, qui ont tendance à prescrire un traitement à large base plutôt que de prendre du sang ou de l’urine et d’attendre les résultats. Ce n’est pas que les médecins soient en conflit avec les mauvaises bactéries ; leurs patients souffrent et les médecins veulent apporter un soulagement rapide.
«Chaque minute compte lorsque vous traitez avec des bactéries résistantes», explique Diane Abensur Bessin. Si vous ne recevez pas les résultats de votre test dans les jours qui suivent, il est peut-être déjà trop tard pour arrêter le développement de la résistance.
La prescription excessive d’antibiotiques est un problème particulier des soins primaires, car ce sont les virus, et non les bactéries, qui causent la plupart des infections. Aux États-Unis, environ 90% de toutes les prescriptions d’antibiotiques sont émises par des médecins généralistes.
Nanosynex est en train de créer un kit qui sera vendu aux laboratoires qui contient des cartes jetables, un appareil de lecture fluorescent et un logiciel d’analyse.
La technologie est basée sur des caractéristiques microfluidiques, nécessitant une plus petite quantité de bactéries que les autres technologies de test, explique Diane Abensur Bessin. L’échantillon est mélangé avec un colorant fluorescent; l’intensité du signal fluorescent est proportionnelle à toute croissance bactérienne.
Diane Abensur Bessin a eu l’idée de créer Nanosynex avec sa cofondatrice, la Brésilienne Michelle Heyman, alors qu’elles étudiaient pour obtenir leur MBA au Technion – Israel Institute of Technology. Les deux femmes ont contacté le bureau de transfert de technologies de l’université et ont demandé quels chercheurs possédaient des technologies suffisamment matures pour être transposées dans un projet entrepreneuriale.
«Nous avons rencontré cinq professeurs différents. Nous voulions quelque chose qui mettait peu de temps à être commercialisé, cinq ans ou moins» , a déclaré Diane Abensur Bessin.
C’est ainsi que les deux jeunes femmes ont été présentées au Pr Shulamit Levenberg, Doyen de la faculté d’ingénierie biomédicale du Technion. Shulamit Levenberg et son équipe travaillaient déjà depuis plusieurs années sur la «puce» microfluidique qui allait devenir la base du kit Nanosynex.
«Nous savions qu’il y avait un potentiel énorme. Il n’y a pas eu de débat sur la nécessité de créer cela», explique Diane Abensur Bessin.
Nanosynex s’est constituée en société en 2017 et a collecté 1 million de dollars US avec 500 000 dollars supplémentaires annoncés par l’Israel Innovation Authority. La société de cinq personnes opère à partir de l’accélérateur interne du Technion, mais déménagera bientôt dans ses propres bureaux.
En 2018, Nanosynex était l’une des 10 entreprises acceptées par l’accélérateur IBM destiné aux start-ups du secteur de la santé, basé à Tel Aviv. La société reçoit du sang à analyser au Rambam Healthcare Campus à Haïfa et au centre médical Shaare Zedek à Jérusalem. Le responsable du département de microbiologie de Rambam est membre du conseil consultatif scientifique de Nanosynex.
Selon Diane Abensur Bessin, « lorsque les résultats de Nanosynex ont été comparés à ceux d’appareils de diagnostic existants, ils étaient exactement les mêmes mais étaient réalisés deux fois plus vite. Ralentir la progression des superbactéries n’est que le début de ce qu’Abensur Bessin espère être une entreprise durable qui se développera à l’international».
En attendant, si votre médecin vous dit d’attendre quelques heures avant de vous prescrire un antibiotique, ne vous inquiétez pas trop : ce sera pour le bien de votre santé et du bien-être de la planète entière.
Sources : Israel21C et techtalk Technion France
Adaptation/enrichissements : Israël Science Info
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