Bon
Jeudi
Je ne bois que de l’eau. Mais il doit arriver que les torrents charrient des fruits fermentés qui alcoolisent la flotte, car après absorption d’une bouteille d’eau, des vapeurs éthyliques m’ont gravement ébranlé l’entendement.
Et m’ont conduite à cette activité habituellement honnie: le shopping.
Beurk le shopping!! Tous ces vêtements, ces formes, ces couleurs, cette construction fantasmagorique de notre corps dans une de ces toilettes qui nous donnera l’air d’une Schéhérazade enjôlant son seigneur dans une transparence suggestive, d’un mercenaire en tenue de camouflage pour une opération de déminage, ou d’une jeune campagnarde exfiltrant de sa longue robe de fermière une poignée de maïs jetée aux poules, me provoque un urticaire éruptif géant..
Mais ce jour là, sans doute un peu grise, j’enfournai dans un grand panier, robes, vestes,, pantalons, chemises, escarpins,tout un arsenal de supplétifs séductifs propres à étourdir un parterre d’admirateurs en délire..
Retour atterré.
J’ai dessoûlé.
Et je contemple ce dressing d’une féminité claironnée, m’interrogeant sur le taux d’alcool du liquide avalé.
Retour à l’envoyeur.
Je fourre le tout dans un grand panier, et me voilà, telle Eliza Doolittle, traînant mon balluchon dans les allées d’un grand centre commercial.
Eh bien! Oui!
J’ai rendu jusqu’au dernier ces objets vaporeux, aériens, mousseux, soyeux , sardanapalesques,ainsi que les uniformes soldatesques jouant sur une bi sexualité luxurieuse assez trouble et dans chacune des boutiques , on m’a remboursée rubis sur l’ongle sans un battement de cils alors que j’avais préparé en amont un super laïus faisant valoir l’incompatibilité de ces toilettes provocantes avec un amoureux conservateur et ombrageux qui bla bla..
Inutile.
Le chef arrive, sec et hiératique, des dreadlocks plein la tête.
Il vérifie l’étiquette, s’assure que le vêtement n’a pas été porté en loucedé, et me rembourse sans un mot.
Je remercie avec effusion.
J’entame un hommage à sa grande humanité, son inespérée compréhension, son immense..
Il s’en fout.
Des pochtronnes qui ont fantasmé sur des pages glacées,il en voit tous les jours ..
Merci à ces enseignes qui prennent en considération les cellules de dégrisement qui lavent les cerveaux des écervelées..
Que cette journée vous offre le choix entre sagesse et égarement, les deux cohabitant parfois dans une envolée qui fait danser les étoiles…
Je vous embrasse
Michèle Chabelski
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