Riss, Zineb, Coco, Nous sommes là !!! par Sarah Cattan

Jour de deuil

Jours de deuils

A jamais ces dates seront une plaie.

Rien décidément pour panser la douleur

 

Parler d’Eux à l’imparfait

Toujours cette interrogation.

Imaginer une rédaction

Un jour de rentrée

Entre bons vœux T’as fait quoi à Noël Wouaaaa J’ai une de ces flemmes

A jamais on ressasse. Comment cela a-t-il pu être possible

Toujours cette haute considération pour Vous. Qui continuez.

Sans faillir

Le courage c’est incontestablement Vous

 

Du Tout est pardonné au Retour des anti-lumières

Trois ans dans une boîte de conserve, titriez-vous en 2018, évoquant cette liberté devenue un produit de luxe. Comme le sont les voitures de sport ou les rivières de diamants de la place Vendôme[1]

Votre adresse à Cherif : Passe nous voir au journal quand tu auras 5 minutes

Votre coucou à Houellebecq[2] dans la rubrique Trouillards Hebdo : la dernière fois ça ne nous a pas franchement réussi

Apprendre à Vivre sous protection. Locaux blindés. Menaces répétées

En être, des douloureuses et insupportables commémorations officielles.

Vous êtes encore là ?

 

Entendre Riss nous demander : Vous êtes encore là ?

Les lecteurs sont là.

Un abonnement sur deux finance le service de sécurité, lequel frise le million d’euros

Vous êtes encore là ?

On doit pas avoir fait assez de bruit

Vous êtes encore là ?

 

Sur fond noir, Un évêque et un imam soufflent la flamme d’une bougie qui n’éclaire plus la Une du numéro historique : Tout est pardonné

Le ton est amer. A en croire Riss, beaucoup se seraient déjà lassés des combats du journal

La société anti-lumières. Riss dit qu’elle n’est plus uniquement une hostilité venue d’extrémistes religieux. Elle viendrait aussi d’intellectuels

Ecoutez-le plutôt : Ce ne sont pas seulement nos histoires personnelles qu’on oublie, c’est aussi ce qu’a signifié ce qui nous est arrivé. On a l’impression qu’on tourne le dos à ça, alors que ces phénomènes de réactions rétrogrades sont toujours présents. Encore plus qu’il y a quatre ou cinq ans. La situation à l’égard du totalitarisme islamiste n’a fait que se dégrader. Comme la créature d’Alien qui pond ses œufs sans interruption, Le blasphème a fait des petits. Tout est devenu blasphématoire. 

Si ça n’est pas un cri.

Sur une double page centrale, Juin a dessiné les Obscurantistes en train de célébrer l’anniversaire de l’attentat : Le pape Les Le Pen. Donald Trump. Dieudonné. Zemmour. Cyril Hanouna. Houellebecq, objet de la caricature du numéro du 7 janvier 2015.

Lançon, qui raconte dans Le lambeau sa lente reconstruction, écrit : Que le dernier qui s’en va éteigne les Lumières. Même s’il n’y voit rien.

Zineb El Rhazoui ? La fière La courageuse n’est pas en reste : S’ils me tuent, des milliers se lèveront. A ma place.

Eux, ce sont les quelques lampes sistantes.  

(à gauche) Coco , (à droite) Riss, (en bas) Zined

Souvenez-vous : en 2015, le PEN club international[3] avait remis à New York le Prix du courage et de la liberté d’expression à l’équipe des survivants de Charlie.

Vous êtes encore là ?

Comme au concert. Faites du bruit. Dites-leur que vous êtes là. A Riss. Biard. Catherine. Coco. Foolz. Gros. Juin. Vuillemin. Willem.

A Zineb et tous les rédacteurs.

A Luz.

Sarah Cattan

[1] Riss. 3/1/2018.

[2] 19 décembre 2018.

[3] Association d’écrivains internationale. Fondée en 1921, elle rassemble des écrivains de tous pays attachés aux valeurs de paix, tolérance et liberté, sans lesquelles la création devient impossible.

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